Snow John

15/03/1813-16/06/1858
Jacques Dufresne

Cet épidémiologiste anglais aura été, avec Semmelweis, Pasteur et Florence Nightingale, l'un des artisans de la victoire contre les maladies infectieses.

Pendant qu'à Vienne Semmelweis luttait contre les fièvres puerpérales, à Londres, John Snow s'attaquait au choléra avec un sens de l'observation aussi aigu et des méthodes similaires. Cette maladie, endémique depuis la haute antiquité en Inde, fit son apparition en Europe en 1832, et cette année-là elle causa 18 400 décès à Paris seulement.

En tant que médecin, Snow avait déjà fait des observations qui l'avaient amené à la conclusion que le choléra n'était pas causé par un phénomène tellurique ou par la conjoncture des astres, mais par un agent pathogène qui se propageait dans certaines conditions. Comme certains quartiers de Londres était moins atteints que d'autres où l'air était le même, Snow en vint à faire l'hypothèse que l'agent pathogène s'introduisait dans l'organisme par le système digestif et probablement par l'eau. Snow fut frappé par le fait que l'eau distribuée par la compagnie Southwark était associée à un taux élevé de mortalité par choléra, tandis que dans le cas l'eau distribuée par la compagnie rivale Lambeht, aucune mort n'était à déplorer. La compagnie Southwark puisait son eau dans la Tamise un peu plus bas que l'endroit où les égoûts étaient déversés. La compagnie Lambeth par contre puisait son eau avant le même endroit. Tout devenait clair: le choléra était causé par une eau impure. Les enquêtes subséquentes, très rigoureuses, prouvèrent que cette hypothèse était juste. Contrairement à Semmelweis et à bien des épidémiologistes contemporains, John Snow eut le bonheur de voir ses travaux pris au sérieux par les autorités et d'assister de son vivant à la victoire sur le choléra, qui disparut complètement de l'Europe et de l'Amérique en 1923. Snow est maintenant considéré comme le fondateur de l'épidémiologie moderne.

Il faut noter que Koch ne découvrira le bacille du choléra, appelé bacille virgule, qu'en 1883. Il faut noter également qu'en 1855, l'existence et la nocivité des micro-organismes n'avaient pas encore été établies par Pasteur. L'année même où Snow terminait sa recherche sur le choléra, Florence Nightingale, par des mesures d'hygiène élémentaires, obtint des succès fabuleux dans les hôpitaux militaires de l'armée anglaise, à Scutari, près de Constantinople. Ce qui contribua à modifier le cours de la guerre de Crimée. La victoire contre l'infection est donc celle de tout le XIXe siècle européen, dont il faut dire d'autre part qu'il avait favorisé la contagion par un développement urbain et industriel qui plongea une grande partie de la population dans la misère.

John Snow vu par ses contemporains.

Voici l'article sur John Snow du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales (Troisième série. Tome dixième, Sir-Spé / publié sous la direction de M. A. Dechambre, Paris, 1881. Dans cet article, Snow porte le prénom de Joseph plutôt que celui de John et ses travaux sur le choléra, son principal titre de gloire, passent au second plan.

«Médecin anglais distingué, né à York, le 15 juin 1815, John Snow était le fils d'un fermier. Il fit ses humanités à York, puis à l'âge de quatorze ans fut mis en apprentissage chez le chirurgien William Hardcastle, à Newcastle-on-Tyne ; il fréquenta en même temps l'hôpital de cette ville. C'est pendant son séjour dans cette localité, à l'âge de dix-sept ans, qu'il devint végétarien; il observa pendant une grande partie de sa vie ce nouveau régime. Lorsque le choléra éclata à Newcastle de 1831 à 1832, il soigna avec dévouement les ouvriers des mines de houille des environs. En 1833, il passa à Burnop-Field, comme assistant de Watson, puis en 1855 alla assister le chirurgien Warburton de Pately-Bridge, dans le Yorkshire. Enfin en 1836 il se rendit à Londres, où il suivit l'école huntérienne de médecine de Windmill-street. En octobre de l'année suivante, il suivit des cours à l'hôpital de Westminster et en mai 1858 se fit recevoir membre du Collège royal des chirurgiens d'Angleterre. Vers la même époque il devint membre de la Westminster medical Society.
Les débuts de Snow furent très pénibles. Il fut reçu bachelier en médecine de l'Université de Londres en 1844, docteur en 1845. Après avoir fait un court séjour à Beckington chez le docteur Parsons, son ami, et à 1'île de Wight, il revint à Londres et fut nommé peu après professeur de médecine légale à l'école de médecine d'Aldersgate-street, et conserva ces fonctions jusqu'en 1849, où cet établissement cessa d'exister.
C'est en 1846 que Snow commença la pratique de l'éthérisation, où il devait acquérir une vraie célébrité; les plus grands chirurgiens de Londres se firent assister par lui dans leurs opérations; plus tard, il expérimenta le chloroforme et l'appliqua avec le même succès. Le 7 avril 1853, il administra le chloroforme à la reine Victoria, lors de la naissance du prince Léopold, et de même le 14 avril 1857, à la naissance de la princesse Béatrix. Ajoutons qu'il fit des essais sur l'inhalation de diverses autres vapeurs narcotiques, morphine, stramoine, acide cyanhydrique, cicutine, etc.; il publia le résultat de ses expériences dans le London medical Gazette de 1848 à 1851 et dans le London Journal of Medicine de janvier 1851.
En 1855, la Medical Society de Londres, l'ancienne Westminster Society, le nomma son président. Snow était en outre fellow de la Royal Medical and Chirurgical Society, de la Pathological Society et de l'Epidemiological Society, licencié du Collège des médecins, membre de l'Association médicale britannique, etc. Mais il fréquentait surtout la Medical Society et l'Epidemiological Society, et publia un grand nombre de mémoires dans les Transactions de cette dernière. En 1858, l'année même de sa mort, il fit paraître dans le Medical Times and Gazette un travail résumant les idées qu'il avait défendues toute sa vie sur les causes de la propagation des maladies contagieuses et particulièrement du choléra.
Snow s'était en outre particulièrement occupé du cancer et avait publié plusieurs articles sur cette redoutable affection dans les Proceedings of the Medical Society of London. II mourut des suites d'une hémorrhagie cérébrale le 16 juin 1858. »

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