Perceptions des secteurs privés et publics

L'Agora
Il apparaît de plus en plus clairement que le gouvernement québécois devra, en matière d'éducation, choisir entre le point de vue et les intérêts de la population et ceux des groupes dont l'existence même dépend des fonds publics distribués par le ministère de l'Éducation: syndicats d'enseignants, associations de directeurs d'écoles, fédérations de commissions scolaires, etc. Tous ces groupes sont hostiles à l'école privée. La population du Québec est d'un autre avis, comme l'a montré il y a quelques mois un sondage Léger et Léger.

L'essentiel de ce sondage portait sur une comparaison des perceptions entre les réseaux privés et publics de l'enseignement au Québec quant à leur structure, leurs caractéristiques principales, et leurs modes de financement.

Le choix entre les deux réseaux: avantage ou désavantage
86% des répondants considèrent que le fait d'avoir le choix entre les réseaux d'enseignement, privé et public, constitue un avantage pour le Québec. La possibilité d'exercer un choix représente ici un avantage pour la vaste majorité des répondants, tous paramètres considérés. Les parents ayant un ou des enfant(s) à l'école privée ont répondu oui à 96% et ceux dont les enfants vont à l'école publique sont du même avis à 87%. En outre, plus les répondants sont scolarisés, plus ils sont d'accord avec le fait qu'avoir le choix entre les deux réseaux constitue un avantage: de 75% pour les moins scolarisés à 88% pour ceux qui ont plus de 16 ans de scolarité.

Aussi, ils sont 80,9% à croire que la présence d'un réseau d'enseignement privé ne nuit pas au réseau d'enseignement public, contre seulement 16,5% à croire que cela puisse nuire. Là encore, il s'agit de la vaste majorité des personnes interrogées(81%), dont l'avis est favorable au réseau d'enseignement privé, tous paramètres et toutes variables confondus, cet avis variant de 75% à 90%, selon la catégorie de répondants.

Éléments de perception des deux réseaux
Les répondants au sondage ont ensuite été invités à donner leur opinion sur divers éléments qui caractérisent un système d'enseignement, à savoir: un meilleur encadrement, une école plus humaine, une meilleure discipline et une plus grande implication des parents.

Un meilleur encadrement
Sans distinction de sexe, de région de provenance, de langue ou de situation parentale, 68% des répondants sont d'accord pour dire que le réseau privé offre un meilleur encadrement que le réseau public. Plus on est scolarisé, plus on pense que l'encadrement est une caractéristique du réseau privé, le pourcentage passant de 45%, pour ceux qui n'ont fait que le primaire, à 73% pour les personnes ayant 16 ans et plus de scolarité.

Cette perception de la qualité de l'encadrement est encore plus significative quand on observe le point de vue des parents d'enfants d'âge scolaire. Alors que 64% des parents ayant un ou des enfant(s) au public croient que l'encadrement est le fait de l'école privée, ce pourcentage grimpe à 89% pour ceux qui ont leur(s) enfant(s) au secteur privé, et à 92% pour les parents qui ont un enfant dans l'un et l'autre des réseaux. Ces derniers sont très bien placés pour avoir un avis éclairé sur la question.

Une meilleure discipline
73% des répondants disent que le secteur privé assure une meilleure discipline que le secteur public et ce, pour la plupart des variables sauf: le revenu familial, la scolarité et le fait d'avoir ou non un enfant au secteur privé.

Une école plus humaine
Fait intéressant, ils ne sont que 35,6% à penser que l'école privée est plus humaine, alors qu'ils sont 45% à ne pas distinguer les deux secteurs sur ce sujet. 15,5% seulement pensent que l'école publique est plus humaine. Cela dit, on ne semble pas avoir spécifié ce qu'on entend par humanité... Mais il s'agit là d'une question délicate qui rejoint la suivante.

Une plus grande implication des parents
Sur l'ensemble des personnes interrogées, 41,3% croient que les parents sont plus impliqués si leurs enfants vont à l'école privée; 42,2% pensent que l'implication des parents ne permet pas de faire une distinction, alors que seulement 14,2% sont d'avis que les parents d'enfants à l'école publique sont plus impliqués.


Une comparaison des réseaux
La majorité des répondants au sondage (75,8%) est d'avis que le secteur privé représente une longue tradition d'excellence au Québec. En fait, selon la catégorie de personnes, cet avis varie de 66%, pour les non francophones, à 94%, pour les parents dont les enfants vont à l'école privée.

Une majorité, mais un peu plus faible cette fois (58%), pense que la concurrence entre le secteur privé et le secteur public stimule le système scolaire québécois. Il y a tout de même 35,4% des gens qui ne sont pas de cet avis.

Cependant, les avis sont plutôt partagés quant à savoir si l'existence d'un réseau privé fait économiser de l'argent au gouvernement. 47,9% pensent que oui et 43,3%, non. Ils ne sont que 8,8% à ne pas savoir ou à ne pas répondre. Seraient-ils si peu nombreux à ne pas être vraiment informés sur la question?

Enfin, les avis sont aussi très partagés devant l'affirmation suggérant que le secteur privé est surtout faite pour l'élite. 48,5% d'accord contre 49,9% pas d'accord.

Participation de l'État au réseau privé
En incluant les taxes scolaires, cela coûte environ la moitié moins cher à l'État pour former un élève dans le secteur privé en comparaison avec le secteur public. L'État devrait-il augmenter sa part dans le financement des écoles privées, la diminuer ou la maintenir telle qu'elle est?

À cette question, 20, 9% sont d'avis qu'il faut augmenter la participation de l'État, 55,4% sont pour le maintien du niveau actuel des subventions, alors que seulement 18,7% verraient d'un bon oeil qu'on diminue la part du gouvernement.

Ainsi, plus de la moitié des gens sont pour le maintien de la participation de l'État à son niveau actuel, bien que l'école privée coûte moins cher. Peut-être est-on de cet avis pour ne pas aller à contre-courant de la tendance actuelle où on semble confondre rationalisation et rationnement. On est donc généralement plus favorable au maintien qu'à la diminution mais, somme toute, un peu moins favorable à la diminution qu'à l'augmentation.

Cependant, dans un même ordre d'idées, la majorité des gens (57%) ne croient pas que la qualité de l'enseignement public pourrait être influencée par un retrait des subventions de l'État au secteur privé. Ceux qui croient que cela apporterait une amélioration sont près de 20%, alors qu'ils sont 18% à penser le contraire. La plupart des gens pensent tout de même que cela ne changerait pas grand chose.

Avoir le choix
Actuellement, au Québec, les commissions scolaires imposent aux parents l'école où ils doivent envoyer leurs enfants. Les parents devraient-ils avoir le choix de l'école ou bien devrait-on maintenir la manière de faire?

À cette question, 70,5% des répondants préféreraient avoir le choix alors que 27,6% pensent qu'on devrait seulement maintenir la manière de faire actuelle. D'une manière générale, ceux qui ont déjà eu à faire un choix sont plus favorables au libre choix.

Dans le sondage dont il est question ici, 82% des parents envoient leurs enfants à une école du réseau public, 13% à une école du réseau privé et 5% ont des enfants dans les deux réseaux. Cependant, 50,4% des parents dont les enfants vont à l'école publique auraient préféré les envoyer au secteur privé. Ainsi, si tous les parents envoyaient leurs enfants aux écoles de leur choix, c'est près de 60% des parents qui choisiraient l'école privée.

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