L'obésité
«Si j’avais été médecin avec diplôme, j’aurais d’abord fait une bonne monographie de l’obésité ; j’aurais ensuite établi mon empire dans ce recoin de la science ; et j’aurais eu le double avantage d’avoir pour malades les gens qui se portent le mieux, et d’être journellement assiégé par la plus jolie moitié du genre humain ; car avoir une juste portion d’embonpoint, ni trop ni peu, est pour les femmes l’étude de toute leur vie. Ce que je n’ai pas fait, un autre docteur le fera ; et s’il est à la fois savant, discret et beau garçon, je lui prédis des succès à miracles: exoriare aliquis nostris ex ossibus hoeres ! en attendant, je vais ouvrir la carrière ; car un article sur l’obésité est de rigueur dans un ouvrage qui a pour objet l’homme en tant qu’il se repaît. J’entends par obésité cet état de congestion graisseuse où, sans que l’individu soit malade, les membres augmentent peu à peu en volume, et perdent leur forme et leur harmonie primitives. Il est une sorte d’obésité qui se borne au ventre ; je ne l’ai jamais observée chez les femmes : comme elles ont généralement la fibre plus molle, quand l’obésité les attaque, elle n’épargne rien. J’appelle cette variété gastrophorie, et gastrophores ceux qui en sont atteints. Je suis même de ce nombre ; mais, quoique porteur d’un ventre assez proéminent, j’ai encore le bas de la jambe sec, et le nerf détaché comme un cheval arabe. Je n’en ai pas moins toujours regardé mon ventre comme un ennemi redoutable ; je l’ai vaincu et fixé au majestueux ; mais pour le vaincre, il fallait le combattre : c’est à une lutte de trente ans que je dois ce qu’il y a de bon dans cet essai. Je commence par un extrait de plus de cinq cents dialogues que j’ai eus autrefois avec mes voisins de table menacés ou affligés de l’obésité.
L’Obèse: Dieu! Quel pain délicieux ! Où le prenez-vous donc ? Moi: chez M. Limet, rue de Richelieu : il est le boulanger de leurs altesses royales le duc d’Orléans et le prince De Condé ; je l’ai pris parce qu’il est mon voisin, et je le garde parce que je l’ai proclamé le premier panificateur du monde.
L’Obèse: J'en prends note ; je mange beaucoup de pain, et avec de pareilles flûtes je me passerais de tout le reste.
Autre Obèse: Mais que faites-vous donc là ? Vous recueillez le bouillon de votre potage, et vous laissez ce beau riz de la Caroline. Moi: c’est un régime particulier que je me suis fait.
L’Obèse: Mauvais régime ! Le riz fait mes délices ainsi que les fécules, les pâtes et autres pareilles : rien ne nourrit mieux, à meilleur marché, et avec moins de peine.
Un Obèse renforcé: Faites-moi, monsieur, le plaisir de me passer les pommes de terre qui sont devant vous. Au train dont on va, j’ai peur de ne pas y être à temps. Moi: Monsieur, les voilà à votre portée.
L’Obèse: Mais vous allez sans doute vous servir ? Il y en a assez pour nous deux, et après nous le déluge. Moi: Je n’en prendrai pas ; je n’estime la pomme de terre que comme préservatif contre la famine ; à cela près, je ne trouve rien de plus éminemment fade.
L’Obèse: Hérésie gastronomique ! Rien n’est meilleur que les pommes de terre ; j’en mange de toutes les manières ; et s’il en paraît au second service, soit à la lyonnaise, soit au soufflé, je fais ici mes protestations pour la conservation de mes droits.
Une Dame obèse: Vous seriez bien bon si vous envoyiez chercher pour moi de ces haricots de Soissons que j’aperçois au bout de la table. Moi: après avoir exécuté l’ordre en chantant tout bas sur un air connu : les Soissonnais sont heureux, les haricots sont chez eux...
L’Obèse: Ne plaisantez pas ; c’est un vrai trésor pour ce pays-là. Paris en tire pour des sommes considérables. Je vous demande grâce aussi pour les petites fèves de marais, qu’on appelle fèves anglaises ; quand elles sont encore vertes, c’est un manger des dieux. Moi: Anathème aux haricots ! Anathème aux fèves de marais...
L’Obèse, d’un air résolu: Je me moque de votre anathème ; ne dirait-on pas que vous êtes à vous seul tout un concile ? Moi: à une autre: Je vous félicite sur votre belle santé ; il me semble, madame, que vous avez un peu engraissé depuis la dernière fois que j’ai eu l’honneur de vous voir. L’Obèse: Je le dois probablement à mon nouveau régime. Moi: Comment donc ?
L’Obèse: Depuis quelque temps, je déjeune avec une bonne soupe grasse, un bol comme pour deux et quelle soupe encore ! La cuiller y tiendrait droite. Moi à une autre: Madame, si vos yeux ne me trompent pas, vous accepterez un morceau de cette charlotte ? Et je vais l’attaquer en votre faveur.
L’Obèse: Eh bien ! Monsieur, mes yeux vous trompent : j’ai ici deux objets de prédilection, et ils sont tous du genre masculin : c’est ce gâteau de riz à côtes dorées, et ce gigantesque biscuit de Savoie ; car vous saurez pour votre règle que je raffole des pâtisseries sucrées. Moi à une autre: Pendant qu’on politique là-bas, voulez-vous, madame, que j’interroge pour vous cette tourte à la frangipane ?
L’Obèse: Très-volontiers : rien ne me va mieux que la pâtisserie. Nous avons un pâtissier pour locataire ; et entre ma fille et moi, je crois bien que nous absorbons le prix de la location, et peut-être au-delà. Moi après avoir regardé la jeune personne: Ce régime vous profite à merveille ; mademoiselle votre fille est une très-belle personne, armée de toutes pièces.
L’Obèse: Eh bien! croiriez-vous que ses compagnes lui disent quelquefois qu’elle est trop grasse ? Moi: C'est peut-être par envie...
L’Obèse: Cela pourrait bien être. Au surplus, je la marie, et le premier enfant arrangera tout cela.
C’est par des discours semblables que j’éclaircissais une théorie dont j’avais pris les éléments hors de l’espèce humaine ; savoir, que la corpulence graisseuse a toujours pour principale cause une diète trop chargée d’éléments féculents et farineux, et que je m’assurais que le même régime est toujours suivi du même effet. Effectivement, les animaux carnivores ne s’engraissent jamais (voyez les loups, les chacals, les oiseaux de proie, le corbeau, etc.). Les herbivores s’engraissent peu, du moins tant que l’âge ne les a pas réduits au repos ; et au contraire ils s’engraissent vite et en tout temps, aussitôt qu’on leur a fait manger des pommes de terre, des grains et des farines de toute espèce. L’obésité ne se trouve jamais ni chez les sauvages, ni dans les classes de la société où on travaille pour manger et où on ne mange que pour vivre.
Causes de l’obésité
D’après les observations qui précèdent, et dont chacun peut vérifier l’exactitude, il est facile d’assigner les principales causes de l’obésité. La première est la disposition naturelle de l’individu. Presque tous les hommes naissent avec certaines prédispositions dont leur physionomie porte l’empreinte. Sur cent personnes qui meurent de la poitrine, quatre-vingt-dix ont les cheveux bruns, le visage long et le nez pointu. Sur cent obèses, quatre-vingt-dix ont le visage court, les yeux ronds et le nez obtus. Il est donc vrai qu’il existe des personnes prédestinées en quelque sorte pour l’obésité, et dont, toutes choses égales, les puissances digestives élaborent une plus grande quantité de graisse. Cette vérité physique, dont je suis profondément convaincu, influe d’une manière fâcheuse sur ma manière de voir en certaines occasions. Quand on rencontre dans la société une petite demoiselle bien vive, bien rosée, au nez fripon, aux formes arrondies, aux mains rondelettes, aux pieds courts et grassouillets, tout le monde est ravi et la trouve charmante ; tandis que, instruit par l’expérience, je jette sur elle des regards postérieurs de dix ans, je vois les ravages que l’obésité aura faits sur ces charmes si frais, et je gémis sur des maux qui n’existent pas encore. Cette compassion anticipée est un sentiment pénible, et fournit une preuve entre mille autres, que l’homme serait plus malheureux s’il pouvait prévoir l’avenir.
La seconde des principales causes de l’obésité est dans les farines et fécules dont l’homme fait la base de sa nourriture journalière. Nous l’avons déjà dit, tous les animaux qui vivent de farineux s’engraissent de gré ou de force ; l’homme suit la loi commune. La fécule produit plus vite et plus sûrement son effet quand elle est unie au sucre : le sucre et la graisse contiennent l’hydrogène, principe qui leur est commun ; l’un et l’autre sont inflammables. Avec cet amalgame, elle est d’autant plus active qu’elle flatte plus le goût et qu’on ne mange guère les entremets sucrés que quand l’appétit naturel est déjà satisfait, et qu’il ne reste plus alors que cet autre appétit de luxe qu’on est obligé de solliciter par tout ce que l’art a de plus raffiné et le changement de plus tentatif. La fécule n’est pas moins incrassante quand elle est charroyée par les boissons, comme dans la bière et autres de la même espèce. Les peuples qui en boivent habituellement sont aussi ceux où on trouve les ventres les plus merveilleux, et quelques familles parisiennes qui, en 1817, burent de la bière par économie, parce que le vin était fort cher, en ont été récompensées par un embonpoint dont elles ne savent plus que faire.
Une double cause d’obésité résulte de la prolongation du sommeil et du défaut d’exercice. Le corps humain répare beaucoup pendant le sommeil ; et dans le même temps il perd peu, puisque l’action musculeuse est suspendue. Il faudrait donc que le superflu acquis fût évaporé par l’exercice ; mais, par cela même qu’on dort beaucoup, on limite d’autant le temps où l’on pourrait agir. Par une autre conséquence, les grands dormeurs se refusent à tout ce qui leur présente jusqu’à l’ombre d’une fatigue ; l’excédant de l’assimilation est donc emporté par le torrent de la circulation ; il s’y charge, par une opération dont la nature s’est réservée le secret, de quelques centièmes additionnels d’hydrogène, et la graisse se trouve formée, pour être déposée par le même mouvement dans les capsules du tissu cellulaire.
Une dernière cause d’obésité consiste dans l’excès du manger et du boire. On a eu raison de dire qu’un des privilèges de l’espèce humaine est de manger sans avoir faim et de boire sans avoir soif ; et, en effet, il ne peut appartenir aux bêtes ; car il naît de la réflexion sur le plaisir de la table et du désir d’en prolonger la durée. On a trouvé ce double penchant partout où l’on a trouvé des hommes ; et on sait que les sauvages mangent avec excès et s’enivrent jusqu’à l’abrutissement toutes les fois qu’ils en trouvent l’occasion. Quant à nous, citoyens des deux mondes, qui croyons être à l’apogée de la civilisation, il est certain que nous mangeons trop. Je ne dis pas cela pour le petit nombre de ceux qui, serrés par l’avarice ou l’impuissance, vivent seuls et à l’écart : les premiers, réjouis de sentir qu’ils amassent ; les autres, gémissant de ne pouvoir mieux faire ; mais je le dis avec affirmation pour tous ceux qui, circulant autour de nous, sont tour à tour amphitryons ou convives, offrent avec politesse ou acceptent avec complaisance ; qui, n’ayant déjà plus de besoin, mangent d’un mets parce qu’il est attrayant, et boivent d’un vin parce qu’il est étranger ; je le dis, soit qu’ils siègent chaque jour dans un salon, soit qu’ils fêtent seulement le dimanche et quelquefois le lundi ; dans chaque majorité immense, tous mangent et boivent trop, et des poids énormes en comestibles sont chaque jour absorbés sans besoin. Cette cause, presque toujours présente, agit différemment suivant la constitution des individus ; et pour ceux qui ont l’estomac mauvais, elle a pour effet non l’obésité, mais l’indigestion.
Anecdote
Nous en avons eu sous les yeux un exemple que la moitié de Paris a pu connaître. M Lang avait une des maisons les plus brillantes de cette ville ; sa table surtout était excellente, mais son estomac était aussi mauvais que sa gourmandise était grande. Il faisait parfaitement les honneurs, et mangeait surtout avec un courage digne d’un meilleur sort. Tout se passait bien jusqu’au café inclusivement ; mais bientôt l’estomac se refusait au travail qu’on lui avait imposé, les douleurs commençaient, et le malheureux gastronome était obligé de se jeter sur un canapé, où il restait jusqu’au lendemain à expier dans de longues angoisses le court plaisir qu’il avait goûté. Ce qu’il y a de très-remarquable, c’est qu’il ne s’est jamais corrigé ; tant qu’il a vécu, il s’est soumis à cette étrange alternative, et les souffrances de la veille n’ont jamais influé sur le repas du lendemain. Chez les individus qui ont l’estomac actif, l’excès de nutrition agit comme dans l’article précédent. Tout est digéré, et ce qui n’est pas nécessaire pour la réparation du corps se fixe et se tourne en graisse. Chez les autres, il y a indigestion perpétuelle : les aliments défilent sans faire profit, et ceux qui n’en connaissent pas la cause s’étonnent que tant de bonnes choses ne produisent pas un meilleur résultat.
On doit bien s’apercevoir que je n’épuise point minutieusement la matière ; car il est une foule de causes secondaires qui naissent de nos habitudes, de l’état embrassé, de nos manies, de nos plaisirs, qui secondent et activent celles que je viens d’indiquer. Je lègue tout cela au successeur que j’ai planté en commençant ce chapitre, et me contente de préliber, ce qui est le droit du premier venu en toute matière. Il y a longtemps que l’intempérance a fixé les regards des observateurs. Les philosophes ont vanté la tempérance ; les princes ont fait des lois somptuaires, la religion a moralisé la gourmandise ; hélas ! On n’en a pas mangé une bouchée de moins, et l’art de trop manger devient chaque jour plus florissant. Je serai peut-être plus heureux en prenant une route nouvelle, j’exposerai les inconvénients physiques de l’obésité ; le soin de soi-même (self-preservation) sera peut-être plus influent que la morale, plus persuasif que les sermons, plus puissant que les lois, et je crois le beau sexe tout disposé à ouvrir les yeux à la lumière.
Inconvénients de l’obésité
L’obésité a une influence fâcheuse sur les deux sexes en ce qu’elle nuit à la force et à la beauté. Elle nuit à la force, parce qu’en augmentant le poids de la masse à mouvoir, elle n’augmente pas la puissance motrice ; elle y nuit encore en gênant la respiration, ce qui rend impossible tout travail qui exige un emploi prolongé de la force musculaire. L’obésité nuit à la beauté en détruisant l’harmonie de proportion primitivement établie ; parce que toutes les parties ne grossissent pas d’une manière égale. Elle y nuit encore en remplissant des cavités que la nature avait destinées à faire ombre : aussi, rien n’est si commun que de rencontrer des physionomies jadis très-piquantes et que l’obésité a rendues à peu près insignifiantes. Le chef du dernier gouvernement n’avait pas échappé à cette loi. Il avait fort engraissé dans ses dernières campagnes ; de pâle, il était devenu blafard, et ses yeux avaient perdu une partie de leur fierté. L’obésité entraîne avec elle le dégoût pour la danse, la promenade, l’équitation, ou l’inaptitude pour toutes les occupations ou amusements qui exigent un peu d’agilité ou d’adresse. Elle prédispose aussi à diverses maladies, telles que l’apoplexie, l’hydropisie, les ulcères aux jambes, et rend toutes les autres affections plus difficiles à guérir.
Exemples d’obésité
Parmi les héros corpulents, je n’ai gardé le souvenir que de Marius et de Jean Sobieski. Marius, qui était de petite taille, était devenu aussi large que long, et c’est peut-être cette énormité qui effraya le cimbre chargé de le tuer. Quant au roi de Pologne, son obésité pensa lui être funeste, car, étant tombé dans un gros de cavalerie turque devant lequel il fut obligé de fuir, la respiration lui manqua bientôt, et il aurait été infailliblement massacré, si quelques-uns de ses aides de camp ne l’avaient soutenu presque évanoui sur son cheval, tandis que d’autres se sacrifiaient généreusement pour arrêter l’ennemi. Si je ne me trompe, le duc De Vendôme, ce digne fils du grand Henri, était aussi d’une corpulence remarquable. Il mourut dans une auberge, abandonné de tout le monde, et conserva assez de connaissance pour voir le dernier de ses gens arracher le coussin sur lequel il reposait au moment de rendre le dernier soupir. Les recueils sont pleins d’exemples d’obésité monstrueuse ; je les y laisse pour parler en peu de mots de ceux que j’ai moi-même recueillis. M Rameau, mon condisciple, maire de La Chaleur, en Bourgogne, n’avait que cinq pieds deux pouces, et pesait cinq cents. M le duc De Luynes, à côté duquel j’ai souvent siégé, était devenu énorme ; la graisse avait désorganisé sa belle figure, et il passa les dernières années de sa vie dans une somnolence presque habituelle.
L'homme le plus gros des États-Unis. Non datée.
© National Library of Medicine.
Mais ce que j’ai vu de plus extraordinaire en ce genre était un habitant de New-Yorck, que bien des français encore existants à Paris peuvent avoir vu dans la rue de Broadway, assis sur un énorme fauteuil dont les jambes auraient pu porter une église. Édouard avait au moins cinq pieds dix pouces, mesure de France, et comme la graisse l’avait gonflé en tous sens, il avait au moins huit pieds de circonférence. Ses doigts étaient comme ceux de cet empereur romain à qui les colliers de sa femme servaient d'anneaux ; ses bras et ses cuisses étaient tubulés, de la grosseur d'un homme de moyenne stature, et il avait les pieds comme un éléphant, couverts par l'augmentation de ses jambes ; le poids de la graisse avait entraîné et fait bâiller la paupière inférieure ; mais ce qui le rendait hideux à voir, c'était trois mentons en sphéroïdes qui lui pendaient sur la poitrine dans la longueur de plus d’un pied, de sorte que sa figure paraissait être le chapiteau d’une colonne torse. Dans cet état, Édouard passait sa vie assis près de la fenêtre d'une salle basse qui donnait sur la rue, et buvant de temps en temps un verre d'ale, dont un pitcher de grande capacité était toujours auprès de lui. Une figure aussi extraordinaire ne pouvait pas manquer d’arrêter les passants ; mais il ne fallait pas qu’ils y missent trop de temps, Édouard ne tardait pas à les mettre en fuite, en leur disant d’une voix sépulcrale : " What have you to stare like wild cats ! ... go your way you, lazy body... be gone you good for nothing dogs... " (qu’avez-vous à regarder d’un air effaré, comme des chats sauvages ? ... passez votre chemin, paresseux... allez-vous-en, chiens de vauriens ! ) et autres douceurs pareilles. L’ayant souvent salué par son nom, j’ai quelquefois causé avec lui ; il assurait qu’il ne s’ennuyait point, qu’il n’était point malheureux, et que si la mort ne venait point le déranger, il attendrait volontiers ainsi la fin du monde.
De ce qui précède, il résulte que si l’obésité n’est pas une maladie, c’est au moins une indisposition fâcheuse, dans laquelle nous tombons presque toujours par notre faute. Il en résulte encore que tous doivent désirer de s’en préserver quand ils n’y sont pas parvenus, ou d’en sortir quand ils y sont arrivés ; et c’est en leur faveur que nous allons examiner quelles sont les ressources que nous présente la science aidée de l’observation.
MEDITATION 22 TRAITEMENT OBÉSITE
Je commence par un fait qui prouve qu’il faut du courage, soit pour se préserver, soit pour se guérir de l’obésité. M. Louis Greffulhe, que sa majesté honora plus tard du titre de comte, vint me voir un matin, et me dit qu’il avait appris que je m’étais occupé de l’obésité ; qu’il en était fortement menacé, et qu’il venait me demander des conseils. " monsieur, lui dis-je, n’étant pas docteur à diplôme, " je suis maître de vous refuser ; cependant je suis à vos ordres, mais à une condition : c’est que vous donnerez votre parole d’honneur de suivre, pendant un mois, avec une exactitude rigoureuse, la règle de conduite que je vous donnerai. " M Greffulhe fit la promesse exigée, en me prenant la main, et dès le lendemain je lui délivrai mon fetua, dont le premier article était de se peser au commencement et à la fin du traitement, à l’effet d’avoir une base mathématique pour en vérifier le résultat. À un mois de là, M Greffulhe revint me voir, et me parla à peu près en ces termes : " Monsieur, dit-il, j’ai suivi votre prescription comme si ma vie en avait dépendu, et j’ai vérifié que dans le mois, le poids de mon corps a diminué de trois livres, même un peu plus. Mais, pour parvenir à ce résultat, j’ai été obligé de faire à tous mes goûts, à toutes mes habitudes, une telle violence, en un mot, j’ai tant souffert, qu’en vous faisant tous mes remercîments de vos bons conseils, je renonce au bien qui peut m’en provenir, et m’abandonne pour l’avenir à ce que la providence en ordonnera. Après cette résolution, que je n’entendis pas sans peine, l’événement fut ce qu’il devait être ; M Greffulhe devint de plus en plus corpulent, fut sujet aux inconvénients de l’extrême obésité, et, à peine âgé de quarante ans, mourut des suites d’une maladie suffocatoire à laquelle il était devenu sujet.
Généralités
Toute cure de l’obésité doit commencer par ces trois préceptes de théorie absolue : discrétion dans le manger, modération dans le sommeil, exercice à pied ou à cheval. Ce sont les premières ressources que nous présente la science : cependant j’y compte peu, parce que je connais les hommes et les choses, et que toute prescription qui n’est pas exécutée à la lettre ne peut pas produire d’effet. Or, 1) il faut beaucoup de caractère pour sortir de table avec appétit ; tant que ce besoin dure, un morceau appelle l’autre avec un attrait irrésistible ; et en général on mange tant qu’on a faim, en dépit des docteurs, et même à l’exemple des docteurs. 2) proposer à des obèses de se lever matin, c’est leur percer le coeur : ils vous diront que leur santé s’y oppose ; que quand ils se sont levés matin, ils ne sont bons à rien toute la journée ; les femmes se plaindront d’avoir les yeux battus ; tous consentiront à veiller tard, mais ils se réserveront de dormir la grasse matinée ; et voilà une ressource qui échappe. 3) monter à cheval est un remède cher, qui ne convient ni à toutes les fortunes ni à toutes les positions. Proposez à une jolie obèse de monter à cheval, elle y consentira avec joie, mais à trois conditions : la première, qu’elle aura à la fois un beau cheval, vif et doux ; la seconde, qu’elle aura un habit d’amazone frais et coupé dans le dernier goût ; la troisième, qu’elle aura un écuyer d’accompagnement complaisant et beau garçon. Il est assez rare que tout cela se trouve, et on n’équite pas. L’exercice à pied donne lieu à bien d’autres objections : il est fatigant à mourir, on transpire et on s’expose à une fausse pleurésie ; la poussière abîme les bas, les pierres percent les petits souliers, et il n’y a pas moyen de persister. Enfin si, pendant ces diverses tentatives, il survient le plus léger accès de migraine, si un bouton gros comme la tête d’une épingle perce la peau, on le met sur le compte du régime, on l’abandonne, et le docteur enrage. Ainsi, restant convenu que toute personne qui désire voir diminuer son embonpoint doit manger modérément, peu dormir, et faire autant d’exercice qu’il lui est possible, il faut cependant chercher une autre voie pour arriver au but. Or, il est une méthode infaillible pour empêcher la corpulence de devenir excessive, ou pour la diminuer, quand elle en est venue à ce point. Cette méthode, qui est fondée sur tout ce que la physique et la chimie ont de plus certain, consiste dans un régime diététique approprié à l’effet qu’on veut obtenir. De toutes les puissances médicales, le régime est la première, parce qu’il agit sans cesse, le jour, la nuit, pendant la veille, pendant le sommeil ; que l’effet s’en rafraîchit à chaque repas, et qu’il finit par subjuguer toutes les parties de l’individu. Or, le régime antiobésique est indiqué par la cause la plus commune et la plus active de l’obésité, et puisqu’il est démontré que ce n’est qu’à force de farines et de fécules que les congestions graisseuses se forment, tant chez l’homme que chez les animaux ; puisque, à l’égard de ces derniers, cet effet se produit chaque jour sous nos yeux, et donne lieu au commerce des animaux engraissés, on peut en déduire, comme conséquence exacte, qu’une abstinence plus ou moins rigide de tout ce qui est farineux ou féculent conduit à la diminution de l’embonpoint. " Ô mon Dieu ! Allez-vous tous vous écrier, lecteurs et lectrices, ô mon Dieu ! Mais voyez donc comme le professeur est barbare ! Voilà que d’un seul mot il" proscrit tout ce que nous aimons, ces pains si blancs de Limet, ces biscuits d’Achard, ces galettes de... et tant de bonnes choses qui se font avec des farines et du beurre, avec des farines et du sucre, avec des farines, du sucre et des oeufs ! Il ne fait grâce ni aux pommes de terre, ni aux macaronis ! Aurait-on dû s’attendre à cela d’un amateur qui paraissait si bon ? " " Qu’est-ce que j’entends là ? Ai-je répondu en prenant ma physionomie sévère, que je ne mets qu’une fois l’an ; eh bien ! Mangez, engraissez ; devenez laids, pesants, asthmatiques, et mourez de gras-fondu ; je suis là pour en prendre note, et vous figurerez dans ma seconde édition... mais que vois-je ? Une seule phrase vous a vaincus ; vous avez peur, et vous priez pour suspendre la foudre... rassurez-vous ; je vais
tracer votre régime, et vous prouver que quelques délices vous attendent encore sur cette terre où l’on vit pour manger. Vous aimez le pain : eh bien, vous mangerez du pain de seigle : l’estimable Cadet De Vaux en a depuis longtemps préconisé les vertus ; il est moins nourrissant, et surtout il est moins agréable : ce qui rend le précepte plus facile à remplir. Car pour être sûr de soi, il faut surtout fuir la tentation. Retenez bien ceci, c’est de la morale. Vous aimez le potage, ayez-le à la julienne, aux légumes verts, aux choux, aux racines ; je vous interdis pain, pâtes et purées. Au premier service, tout est à votre usage, à peu d’exceptions près : comme le riz aux volailles et la croûte des pâtés chauds. Travaillez, mais soyez circonspects, pour ne pas satisfaire plus tard un besoin qui n’existera plus. Le second service va paraître, et vous aurez besoin de philosophie. Fuyez les farineux, sous quelque forme qu’ils se présentent ; ne vous reste-t-il pas le rôti, la salade, les légumes herbacés ? Et puisqu’il faut vous passer quelques sucreries, préférez la crème au chocolat et les gelées au punch, à l’orange et autres pareilles. Voilà le dessert. Nouveau danger : mais si jusque-là vous vous êtes bien conduit, votre sagesse ira toujours croissant. Défiez-vous des bouts de table (ce sont toujours des brioches plus ou moins parées) ; ne regardez ni aux biscuits ni aux macarons ; il vous reste des fruits de toute espèce, des confitures, et bien des choses que vous saurez choisir si vous adoptez mes principes. Après dîner, je vous ordonne le café, vous permets la liqueur, et vous conseille le thé et le punch dans l’occasion. Au déjeuner, le pain de seigle de rigueur, le chocolat plutôt que le café. Cependant je permets le café au lait un peu fort ; point d’oeufs, tout le reste à volonté. Mais on ne saurait déjeuner de trop bonne heure. Quand on déjeune tard, le dîner vient avant que la digestion soit faite ; on n’en mange pas moins ; et cette mangerie sans appétit est une cause de l’obésité très-active, parce qu’elle a lieu souvent.
Jusqu’ici je vous ai tracé, en père tendre et un peu complaisant, les limites d’un régime qui repousse l’obésité qui vous menace : ajoutons-y encore quelques préceptes contre celle qui vous a atteints. Buvez, chaque été, trente bouteilles d’eau de Seltz, un très-grand verre le matin, deux avant le déjeuner, et autant en vous couchant. Ayez à l’ordinaire des vins blancs, légers et acidulés, comme ceux d’Anjou. Fuyez la bière comme la peste, demandez souvent des radis, des artichauts à la poivrade, des asperges, du céleri, des cardons. Parmi les viandes, préférez le veau et la volaille ; du pain, ne mangez que la croûte ; dans le cas douteux, laissez-vous guider par un docteur qui adopte mes principes ; et quel que soit le moment où vous aurez commencé à les suivre, vous serez avant peu frais, jolis, lestes, bien portants et propres à tout. Après vous avoir ainsi placés sur votre terrain, je dois aussi vous en montrer les écueils, de peur que, emportés par un zèle obésifuge, vous n’outrepassiez le but. L’écueil que je veux signaler est l’usage habituel des acides que des ignorants conseillent quelquefois, et dont l’expérience a toujours démontré les mauvais effets.
Dangers des acides
Il circule parmi les femmes une doctrine funeste, et qui fait périr chaque année bien des jeunes personnes, savoir : que les acides, et surtout le vinaigre, sont des préservatifs contre l’obésité. Sans doute l’usage continu des acides fait maigrir, mais c’est en détruisant la fraîcheur, la santé et la vie ; et quoique la limonade soit le plus doux d’entre eux, il est peu d’estomacs qui y résistent longtemps. La vérité que je viens d’énoncer ne saurait être rendue trop publique ; il est peu de mes lecteurs qui ne pussent me fournir quelque observation pour l’appuyer, et dans le nombre je préfère la suivante qui m’est en quelque sorte personnelle. En 1776, j’habitais Dijon ; j’y faisais un cours de droit en la faculté ; un cours de chimie sous M Guyton De Morveau, pour lors avocat général, et un cours de médecine domestique sous M Maret, secrétaire perpétuel de l’académie, et père de M le duc De Bassano. J’avais une sympathie d’amitié pour une des plus jolies personnes dont ma mémoire ait conservé le souvenir. Je dis sympathie d’amitié, ce qui est rigoureusement vrai et en même temps bien surprenant, car j’étais alors grandement en fonds pour des affinités bien autrement exigeantes. Cette amitié, qu’il faut prendre pour ce qu’elle a été et non pour ce qu’elle aurait pu devenir, avait pour caractère une familiarité qui était devenue, dès le premier jour, une confiance qui nous paraissait toute naturelle, et des chuchotements à ne plus finir, dont la maman ne s’alarmait point, parce qu’ils avaient un caractère d’innocence digne des premiers âges. Louise était donc très-jolie, et avait surtout, dans une juste proportion, cet embonpoint classique qui fait le charme des yeux et la gloire des arts d’imitation. Quoique je ne fusse que son ami, j’étais bien loin d’être aveugle sur les attraits qu’elle laissait voir ou soupçonner, et peut-être ajoutaient-ils, sans que je pusse m’en douter, au chaste sentiment qui m’attachait à elle. Quoi qu’il en soit, un soir que j’avais considéré Louise avec plus d’attention qu’à l’ordinaire : " Chère amie, lui dis-je, vous êtes malade ; il me semble que vous avez maigri. Oh! Non, me répondit-elle avec un sourire qui avait quelque chose de mélancolique, je me porte bien ; et si j’ai un peu maigri, je puis, sous ce rapport, perdre un peu sans m’appauvrir. Perdre, lui répliquai-je avec feu ; vous n’avez besoin ni de perdre ni d’acquérir : restez comme vous êtes, charmante à croquer ; et autres phrases pareilles qu’un ami de vingt ans a toujours à commandement. Depuis cette conversation, j’observai cette jeune fille avec un intérêt mêlé d’inquiétude, et bientôt je vis son teint pâlir, ses joues se creuser, ses appas se flétrir... oh ! Comme la beauté est une chose fragile et fugitive ! Enfin, je la joignis au bal où elle allait encore comme à l’ordinaire ; j’obtins d’elle qu’elle se reposerait pendant deux contredanses ; et mettant ce temps à profit, j’en reçus l’aveu que fatiguée des plaisanteries de quelques-unes de ses amies qui lui annonçaient qu’avant deux ans elle serait aussi grosse que saint Christophe, et aidée par les conseils de quelques autres, elle avait cherché à maigrir, et, dans cette vue, avait bu pendant un mois un verre de vinaigre chaque matin ; elle ajouta que jusqu’alors elle n’avait fait à personne confidence de cet essai. Je frémis à cette confession : je sentis toute l’étendue du danger, et j’en fis part dès le lendemain à la mère de Louise, qui ne fut pas moins alarmée que moi ; car elle adorait sa fille. On ne perdit pas de temps ; on s’assembla, on consulta, on médicamenta. Peines inutiles ! Les sources de la vie étaient irrémédiablement attaquées ; et au moment où on commençait à soupçonner le danger, il ne restait déjà plus d’espérance. Ainsi, pour avoir suivi d’imprudents conseils, l’aimable Louise, réduite à l’état affreux qui accompagne le marasme, s’endormit pour toujours, qu’elle avait à peine dix-huit ans. Elle s’éteignit en jetant des regards douloureux vers un avenir qui ne devait pas exister pour elle ; et l’idée d’avoir, quoique involontairement, attenté à sa vie, rendit sa fin plus douloureuse et plus prompte. C’est la première personne que j’aie vue mourir ; car elle rendit le dernier soupir dans mes bras, au moment où, suivant son désir, je la soulevais pour lui faire voir le jour. Huit heures environ après sa mort, sa mère désolée me pria de l’accompagner dans une dernière visite qu’elle voulait faire à ce qui restait de sa fille ; et nous observâmes avec surprise que l’ensemble de sa physionomie avait pris quelque chose de radieux et d’extatique qui n’y paraissait point auparavant. Je m’en étonnai : la maman en tira un augure consolateur. Mais ce cas n’est pas rare. Lavater en fait mention dans son traité de la physionomie.
Ceinture antiobésique
Tout régime antiobésique doit être accompagné d’une précaution que j’avais oubliée, et par laquelle j’aurais dû commencer : elle consiste à porter jour et nuit une ceinture qui contienne le ventre, en le serrant modérément. Pour en bien sentir la nécessité, il faut considérer que la colonne vertébrale, qui forme une des parois de la caisse intestinale, est ferme et inflexible : d’où il suit que tout l’excédant de poids que les intestins acquièrent, au moment où l’obésité les fait dévier de la ligne verticale, s’appuie sur les diverses enveloppes qui composent la peau du ventre, et celles-ci, pouvant se distendre presque indéfiniment, pourraient bien n’avoir pas assez de ressort pour se retraire quand cet effort diminue, si on ne leur donnait pas un aide mécanique qui, ayant son point d’appui sur la colonne dorsale elle-même, devînt son antagoniste et rétablît l’équilibre. Ainsi, cette ceinture produit le double effet d’empêcher le ventre de céder ultérieurement au poids actuel des intestins, et de lui donner la force nécessaire pour se rétrécir quand ce poids diminue. On ne doit jamais la quitter ; autrement le bien produit pendant le jour serait détruit par l’abandon de la nuit ; mais elle est peu gênante, et on s’y accoutume bien vite. La ceinture, qui sert aussi de moniteur pour indiquer qu’on est suffisamment repu, doit être faite avec quelque soin, sa pression doit être à la fois modérée et toujours la même, c’est-à-dire qu’elle doit être faite de manière à se resserrer à mesure que l’embonpoint diminue. On n’est point condamné à la porter toute la vie ; on peut la quitter sans inconvénient quand on est revenu au point désiré, et qu’on y a demeuré stationnaire pendant quelques semaines. Bien entendu qu’on observera une diète convenable. Il y a au moins six ans que je n’en porte plus.
Du quinquina
Il existe une substance que je crois activement antiobésique ; plusieurs observations m’ont conduit à le croire ; cependant, je permets encore de douter, et j’appelle les docteurs à expérimenter. Cette substance doit être le quinquina. Dix ou douze personnes de ma connaissance ont eu de longues fièvres intermittentes ; quelques-unes se sont guéries par des remèdes de bonne femme, des poudres, etc. ; d’autres par l’usage continu du quinquina, qui ne manque jamais son effet. Tous les individus de la première catégorie, qui étaient obèses, ont repris leur ancienne corpulence ; tous ceux de la seconde sont restés dégagés du superflu de leur embonpoint : ce qui me donne le droit de penser que c’est le quinquina qui a produit ce dernier effet, car il n’y a eu de différence entre eux que le mode de guérison. La théorie rationnelle ne s’oppose point à cette conséquence ; car, d’une part, le quinquina, élevant toutes les puissances vitales, peut bien donner à la circulation une activité qui trouble et dissipe les gaz destinés à devenir de la graisse ; et, d’autre part, il est prouvé qu’il y a dans le quinquina une partie de tannin qui peut fermer les capsules destinées, dans les cas ordinaires, à recevoir des congestions graisseuses. Il est même probable que ces deux effets concourent et se renforcent l’un l’autre. C’est d’après ces données, dont chacun peut apprécier la justesse, que je crois pouvoir conseiller l’usage du quinquina à tous ceux qui désirent se débarrasser d’un embonpoint devenu incommode. Ainsi, dummodo annuerint in omni medicationis genere doctissimi facultatis professores, je pense qu’après le premier mois d’un régime approprié, celui ou celle qui désire se dégraisser fera bien de prendre pendant un mois, de deux jours l’un, à sept heures du matin, deux heures avant le déjeuner, un verre de vin blanc sec, dans lequel on aura délayé environ une cuillerée à café de bon quinquina rouge, et qu’on en éprouvera de bons effets. Tels sont les moyens que je propose pour combattre une incommodité aussi fâcheuse que commune. Je les ai accommodés à la faiblesse humaine, modifiée par l’état de société dans lequel nous vivons. Je me suis pour cela appuyé sur cette vérité expérimentale que, plus un régime est rigoureux, moins il produit d’effet, parce qu’on le suit mal ou qu’on ne le suit pas du tout. Les grands efforts sont rares ; et si on veut être suivi, il ne faut proposer aux hommes que ce qui leur est facile, et même, quand on le peut, ce qui leur est agréable. »