Langue

Définition proposée par l'écrivain québécois Fernand Ouellette :

«La langue est à la fois le code d'une société dont les membres communiquent par le mot, et celui d'un psychisme qui a le pouvoir de se distancer par rapport premièrement à lui-même, sujet, donc de se saisir comme objet, et deuxièmement par rapport à l'objet ou le monde qui l'entoure. Par conséquent tout ce qui est verbalisable glisse du niveau de l'existence au niveau d'éléments de code. Ainsi par ce code l'homme se structure et structure le monde. (...) Ces quelques considérations soulignent qu'une langue est un fait social qui dans sa transmission même à l'individu propose, selon les lois internes de sa propre structure, un acquis codé de l'humanité, tout en permettant, supportant et rendant communicable la pensée soit d'une façon objective en se présentant essentiellement comme un code où la nécessité de faire passer clairement le message l'emporte sur la subjectivisation qu'implique l'expression (signe); soit d'une façon subjective en étant une mutation du code puisque celui-ci se charge de l'expérience personnelle du sujet et s'appuie davantage sur le symbole que sur le signe.»

Fernand Ouellette (1969)

Enjeux

«Les ethnolinguistes estiment entre quinze mille et vingt mille le nombre de langues jadis parlées sur la planète. Plus des deux tiers se sont déjà éteintes. À l’heure où j’écris, dans les cultures minoritaires et dans le monde sous-développé, des langues meurent à un rythme qui ne cesse de s’accélérer. (...) La puissance économico-technique de l’anglo-américain a déferlé sur le monde tel un rouleau compresseur. (...) L’idée d’un monde plus ou moins monoglotte n’est plus inconcevable.

Comme je l’ai suggéré, le coût serait, est immense. (…) Chaque langue, on le sait, engendre et exprime une vision du monde, une histoire de la destinée humaine, une construction d’événements à venir pour laquelle il n’est de fac-similé dans aucune autre. (…) La mort d’une langue, fût-elle chuchotée par une infime poignée sur quelque parcelle de territoire condamné, est la mort d’un monde.»

George Steiner, Errata. Récit d’une pensée, Paris, Gallimard, «Folio», c1998, p. 166-168


Un point de vue critique. Détruire les nations en détruisant les langues

«L’anglo-américain (...) vise à détruire ou effacer les nations qui sont le dernier obstacle à la mondialisation. Or, la dissolution des nations passe par la destruction des langues nationales destinées à être remplacées par la langue de l’Empire américain. Par un apparent paradoxe dont l’Histoire a le secret, l’uniformisation linguistique et culturelle passe dans un premier temps par la promotion des “nouveaux parlers” (initiés par des modes comme le rap) et des vieilles langues régionales. Le but est clair: achever l’atomisation des individus et préparer l’avènement du communautarisme (...) de façon à ce que plus personne ne se comprenne. Alors, de cette guerre des mots surgira, comme un sauveur, l’anglo-américain.»

Christian Authier, "Le français est-il perdu?", L'Opinion indépendante (date non précisée, 2000; lien désactivé)

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