Essentiel
Dans un tel contexte, le citoyen ne peut jouer pleinement son rôle sans une vigilance constante et
éclairée qui n'est à la portée que d'un très petit nombre de personnes. Lourde responsabilité de ce petit nombre!
Peut-être l'esprit critique n'est-il accessible qu'à un petit nombre de personnes lorsque l'usage des statistiques dans des sciences comme l'épidémiologie est en cause, mais il n'en est pas de même pour ce qui est des manipulations plus grossières de l'opinion. Elles ont au contraire provoqué une réaction de méfiance qui suscite quelque inquiétude parmi les observateurs des médias.
«Un soupçon ontologique, écrit Jean-Claude Guillebaud, a eté jeté sur le médiatique en général et la télévision en particulier . Il faut se féliciter de cette exigence informative sans cesse plus aiguë, de ces pinaillages toujours plus minutieux. Ils prouvent qu'en matière d'information audiovisuelle et photographique nous sortons de l'enfance et du premier degré. Plus personne - enfin! - n'accepte de prendre simplement pour argent comptant ce que ses yeux voient et ses oreilles entendent. Nous accédons à plus de complexité. La demande de vérité s'accroît. On a appris à « lire » les images, au lieu de les consommer. Oh, la bonne nouvelle! Une gêne bizarre, cependant, commence très paradoxalement à nous habiter. Il faut la prendre comme un signal. En s'obnubilant sur la critique du reflet, c'est-à-dire la couverture médiatique, ne finira-t-on pas par oublier la chose elle-même ?Autrement dit, une critique médiatique, sans cesse plus élaborée, ne risque-t-elle pas de reléguer au second plan l'événement proprement dit, avec sa rugosité, son poids de sang ?
Un événement qui, comble d'ironie, se trouverait insensiblement déréalisé, transformé en pur artefact journalistique par le fait d'une névrose questionneuse qui basculerait sans s'en rendre compte dans l'hypercriticisme. On éprouva cet indéfinissable malaise en regardant, l'autre dimanche (le 29 octobre) l'excellent «
Arrêt sur images » de Schneidermann. A dépiauter systématiquement les photos publiées, à débusquer l'esbroufe, à mettre en question les choix inconscients des reporters, à pointer les prétendues mises en scène deslanceurs de cailloux palestiniens, à mettre en doute la vérité des cadrages, l'émission buta au bout du compte sur un soupir effaré - et assez extraordinaire dans sa simplicité - du photographe Patrick Chauvel: « Mais ces enfants meurent pour de vrai !On n'y pensait plus. »
Essentiel
Dans un tel contexte, le citoyen ne peut jouer pleinement son rôle sans une vigilance constante et
éclairée qui n'est à la portée que d'un très petit nombre de personnes. Lourde responsabilité de ce petit nombre!
Peut-être l'esprit critique n'est-il accessible qu'à un petit nombre de personnes lorsque l'usage des statistiques dans des sciences comme l'épidémiologie est en cause, mais il n'en est pas de même pour ce qui est des manipulations plus grossières de l'opinion. Elles ont au contraire provoqué une réaction de méfiance qui suscite quelque inquiétude parmi les observateurs des médias.
«Un soupçon ontologique, écrit Jean-Claude Guillebaud, a eté jeté sur le médiatique en général et la télévision en particulier . Il faut se féliciter de cette exigence informative sans cesse plus aiguë, de ces pinaillages toujours plus minutieux. Ils prouvent qu'en matière d'information audiovisuelle et photographique nous sortons de l'enfance et du premier degré. Plus personne - enfin! - n'accepte de prendre simplement pour argent comptant ce que ses yeux voient et ses oreilles entendent. Nous accédons à plus de complexité. La demande de vérité s'accroît. On a appris à « lire » les images, au lieu de les consommer. Oh, la bonne nouvelle! Une gêne bizarre, cependant, commence très paradoxalement à nous habiter. Il faut la prendre comme un signal. En s'obnubilant sur la critique du reflet, c'est-à-dire la couverture médiatique, ne finira-t-on pas par oublier la chose elle-même ?Autrement dit, une critique médiatique, sans cesse plus élaborée, ne risque-t-elle pas de reléguer au second plan l'événement proprement dit, avec sa rugosité, son poids de sang ?
Un événement qui, comble d'ironie, se trouverait insensiblement déréalisé, transformé en pur artefact journalistique par le fait d'une névrose questionneuse qui basculerait sans s'en rendre compte dans l'hypercriticisme. On éprouva cet indéfinissable malaise en regardant, l'autre dimanche (le 29 octobre) l'excellent «
Arrêt sur images » de Schneidermann. A dépiauter systématiquement les photos publiées, à débusquer l'esbroufe, à mettre en question les choix inconscients des reporters, à pointer les prétendues mises en scène deslanceurs de cailloux palestiniens, à mettre en doute la vérité des cadrages, l'émission buta au bout du compte sur un soupir effaré - et assez extraordinaire dans sa simplicité - du photographe Patrick Chauvel: « Mais ces enfants meurent pour de vrai !On n'y pensait plus. »