Penser la vie, la vie des pensées ; l’art à la rescousse

Chantal Lapointe

Table des matières cliquable

 La pensée discursive.. 1

Objectivité et sentiment.. 4

L’art et la pensée.. 5

Pensée vivante et science.. 8

La pensée doit devenir un art. 12

 

L’aventure de la modernité occidentale en est une de distanciation entre la pensée et la vie. Au Moyen-Âge, la religion et ses prescriptions occupaient toutes les sphères de l’activité humaine; elles insufflaient le sens et la valeur de la vie, et l’être humain se pensait dans la cohérence de l’Univers. Puis, prenant peu à peu conscience de son individualité et de la possibilité de prendre en main les rênes de son destin, l’Homme a commencé à voir le monde autour de lui d’un regard propre : celui de l’observateur. On en voit l’expression dans la victoire du nominalisme, qui ouvre une brèche dans ce monde ordonné où désormais le réel et la connaissance ne sont accessibles que par l’observation extérieure alors que le monde spirituel, le monde des Idées, et Dieu avec lui, sont relayés au domaine de la foi. Avec l’effacement de l’essence, « toute finalité intrinsèque étant exclue, écrit Charles Taylor, la cause finale s’effondre jusqu’à ce que la cause efficiente seule demeure. Il se produit alors ce qu’on a appelé la “mécanisation de la représentation du monde” qui, en retour, ouvre la voie à une représentation scientifique où la vérité d’une hypothèse est établie en fonction de l’utilité que celle-ci peut avoir pour nous dans l’action »[1]. La science moderne, dont l’influence atteint aujourd’hui toutes les sphères d’activité spirituelle, inscrit la distanciation dans ce qui la distingue : la méthode expérimentale où le chercheur adopte la posture d’un sujet indépendant de l’objet de recherche qui est à son tour isolé, décomposé et soumis à une modélisation mathématique. Une voie est ainsi tracée pour que, dans la démarche de connaissance, s’impose la pensée discursive, avec toutes les conséquences que cela entraine sur notre façon de concevoir la vie.

La pensée discursive

La façon d’appréhender le monde de la pensée discursive, qu’on appelle aujourd’hui la pensée objective ou critique relève d’un mode particulier. Il s’agit du mode de penser qui analyse, classe, calcule, organise et établit des relations causales, des liens logiques. Cette pensée propre à l’entendement est une étape nécessaire à tout processus de connaissance. Il nous faut bien nous détacher de la forêt pour connaître l’arbre et nous devons bien examiner chacune de ses constituantes, racines, tronc, bourgeons, feuilles, fleurs, fruits, graines, etc., dans le temps et dans l’espace, si nous voulons le saisir dans son développement. Cependant, si cette pensée peut nous mener à une forme de connaissance, une forme descriptive, elle ne conduit pas à la compréhension du vivant, car elle n’est pas adaptée au mouvement continuel et à la métamorphose perpétuelle caractéristiques du vivant; elle ne peut saisir le monde organique qu’en l’isolant ou en le retirant de son milieu de vie. Goethe avait bien saisi qu’en utilisant une approche propre à l’inorganique pour observer le vivant, on ne pouvait que développer une science qui observe le vivant comme un objet mort.

Pour connaître et décrire une chose vivante,

On cherche tout d’abord à en chasser l’esprit;

On tient dans sa main les parties,

Ne manque, hélas! que l’esprit qui les lie [2]

La pensée discursive, ou pensée réflexive s’applique à ce qui est mort, au passé, puisqu’elle réfléchit et que ce qui est réfléchi est nécessairement déjà passé. Voici ce que le biologiste Wolfgang Schad écrit au sujet du rapport de la science actuelle avec le vivant :

La méthode analytique causale de recherche physiologique est bien consciente — dans la mesure où elle réfléchit sur elle-même — qu’elle n’est pas en mesure d’étudier la Vie elle-même. Bünning a souligné ceci : « Une fois que nous avons compris ce que nous entendons par la vie dans son sens physiologique, il devient clair que la Vie dans son sens réel, telle qu’elle était connue avant la science biologique, n’est pas ce qu’en disent les biologistes. » Par conséquent, c’est principalement la partie de la nature qui peut être isolée et quantifiée qui est considérée comme importante par les scientifiques d’aujourd’hui. Et la méthode elle-même interfère avec les phénomènes observés. Heisenberg a formulé ce fait et ses conséquences comme suit : « La méthode scientifique d’isolement, d’explication et de classification est consciente de ses propres et strictes limites, à savoir que l’application de la méthode elle-même altère et remanie l’objet d’étude, de sorte que la méthode et l’objet ne peuvent plus être séparés. L’image du monde formulée par les sciences naturelles cesse à ce stade d’être véritablement scientifique »[3].

Pour comprendre l’arbre, il ne suffit pas de décrire ses constituants, d’identifier ses gènes et de les compter, il faut le saisir dans son intégrité en tant qu’organisme vivant, dans ce qui fait de lui un arbre, et il n’est pas possible de l’extraire de l’environnement auquel il participe, au sol, au climat, à l’air ambiant, aux organismes vivants qui entrent en relation avec lui et sans lesquels il ne pourrait survivre. Mais la science moderne, qui a fait de la raison discursive son outil privilégié, avait-elle vraiment pour objectif de comprendre la vie? Ou ne voulait-elle pas plutôt de « maîtriser » la nature et la transformer? Depuis sa séparation d’avec la philosophie, écrivait le mathématicien René Thom, la science, « a oublié sa vocation première, celle qui fleurissait des présocratiques à Aristote, et qui était de nous faire comprendre la réalité »[4]. Nombreux sont ceux qui lui ont justement reproché de ne plus répondre aux questions fondamentales :

Dans la détresse de notre vie (…), cette science n’a rien à nous dire. Les questions qu’elle exclut par principe sont précisément les plus brulantes à une époque malheureuse pour une humanité abandonnée aux bouleversements du destin : ce sont les questions qui portent sur le sens ou sur l’absence de sens de toute cette existence humaine[5].

L’image scientifique du monde réel qui m’entoure est très pauvre. Elle apporte énormément d’information de détail, ordonne toute expérience selon une magnifique consistance, mais elle est affreusement silencieuse concernant les diverses choses qui sont près de nous, qui nous importent vraiment. Elle ne peut rien nous dire du rouge ou du bleu, de l’amer ou du doux, de la douleur ou du plaisir physique; elle ignore tout du laid et du beau, du bien et du mal, de Dieu et de l’éternité. La science fait parfois mine de répondre aux questions de ces domaines, mais ses réponses sont alors très souvent tellement ridicules qu’on est porté à ne pas les prendre au sérieux[6].

S’il nous faut reconnaître que le processus d’objectification de la pensée discursive a permis les formidables avancées de la science moderne et ses exploits technologiques, nous devons néanmoins constater qu’il a également refroidi notre rapport au monde, à nous-mêmes et à la vie. Comme l’écrit Guy Debord, « Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation »[7], tout est devenu un spectacle auquel nous assistons sans ressentir le lien profond qui nous unit au déroulement des évènements. Avec les conséquences que nous connaissons au point de vue environnemental, la disparition accélérée des espèces, la mort des océans, etc., mais aussi avec la volonté observée aujourd’hui de penser une continuité entre l’homme et la machine, d’espérer que la machine soit l’avenir de l’homme!

Objectivité et sentiment

L’objectif de la science moderne, en adoptant ce mode de penser, était de mettre derrière elle les spéculations métaphysiques et de parvenir à des certitudes en se concentrant sur les expériences concrètes. Cette quête de certitude et d’objectivité ne pouvait se concevoir, estimait-on, sans s’assurer de la distance entre le sujet et l’objet, de la non-implication personnelle du chercheur dans l’expérience. La vie était donc écartée à la fois du côté de l’objet, comme nous l’avons vu, et du côté du sujet.

Pourtant, la connaissance est difficilement envisageable sans investissement personnel. Le neurobiologiste G. Hüther soutient que l’enthousiasme est le moteur de l’apprentissage, qu’il est un « engrais pour le cerveau » et que la seule façon d’apprendre de nouvelles choses ou de changer sa façon de penser implique d’être « touché au cœur », d’être « ému », de s’enthousiasmer pour quelque chose[8]. Les Anciens ne l’auraient pas contredit, eux qui voyaient dans « l’étonnement » le prélude nécessaire à la connaissance. Pour pouvoir connaître, il faut d’abord une certaine ouverture face au monde, une curiosité, un questionnement, le sentiment que tout ne nous est pas donné d’emblée, mais qu’il reste une part d’étrangeté. Cet étonnement ne vient donc pas seul, il est accompagné d’une forme d’intérêt personnel pour l’objet à connaître. Bien qu’on ait voulu extraire de la science tout ce qui n’était pas mathématisable, c’est néanmoins sur l’impondérable qu’elle a continué à reposer. « La première exigence d’un homme de science est qu’il soit curieux. Il doit être capable de s’étonner et d’avoir soif de découvrir »[9] soutenait Erwin Schrödinger. « En réalité, affirme Olivier Reboul, tout sentiment s’oppose à la connaissance “froide” »[10]. En fait, poursuit-il, la vie du sentiment peut difficilement être dissociée de la vie de la pensée. C’est conjointement qu’elles évoluent jusqu’à pouvoir servir de motif pour des actions volontaires, jusqu’à nous « presser d’agir sans délai »[11]. La Dre Carla Hannaford, neurophysiologiste souligne que même les chercheurs en informatique reconnaissent aujourd’hui le rôle essentiel des émotions pour la pensée. Reprenant les constats de David Gelernter, elle résume : « si nous retirons l’émotion à la pensée, ce qui reste est purement et simplement l’extrémité d’un spectre continu – pensée linéaire et logique – et l’identification de cette étroite bande est généralement inexacte »[12].

Le rôle du sentiment ne se situe pas simplement en amont de la connaissance, on le retrouve aussi dans le jugement. Le jugement, écrit Noël Mouloud « est l’acte de la pensée qui affirme ou nie, et qui ainsi pose le vrai; plus largement, c’est le point d’arrêt d’un problème, qui s’achève dans une décision »[13]. Il implique de synthétiser « les contenus de la perception ou de la représentation » et de les porter « au niveau d’un critère de vérité qui permet leur affirmation »[14]. Ce qui nécessite, souligne Reboul, de prendre une certaine distance face à l’objet et face à soi-même : « Le vrai jugement implique à la fois l’examen et la compréhension de son objet; juger vraiment, c’est se déterminer par la chose, en faisant taire ses propres passions; […] c’est décider non pas en individu, mais en homme »[15]. Faire taire ses propres passions exige une maturité du sentiment; le critère de vérité également relève du sentiment et non de l’intellect qui ne donne accès qu’aux relations objectives et logiques. « Si l’on doit juger, c’est-à-dire décider, c’est qu’on ne comprend pas tout », c’est que la logique et les relations objectives ne suffisent pas à tout expliquer, car « une compréhension parfaite rendrait le verdict inutile » poursuit Reboul[16].

L’art et la pensée

C’est parce qu’il reconnaît le rôle des sentiments dans la vie de la pensée que Rudolf Steiner accorde une grande importance à la beauté et à la pratique artistique, qui sont les grands éducateurs des sentiments. Aussi, il estime que : « Pour l’homme qui aspire à un épanouissement de toutes ses facultés, la connaissance des choses va de pair avec le développement et l’affinement de la vie du sentiment »[17].

Chacun peut concevoir combien la fréquentation du beau et une pratique artistique assidue et variée peut éveiller et nourrir la vie des sentiments. Qu’on considère également tout ce peut apporter à la pensée le fait de côtoyer, de pratiquer, de ressentir, de vivre, dans la peinture par exemple, les nuances, les contrastes, la complémentarité des couleurs qui s’appellent les unes les autres; dans l’écriture la recherche du mot juste pour exprimer la subtilité et la profondeur d’une idée ou d’un sentiment, les temps du récit où le passé, le présent et le futur s’entrecroisent dans une nécessité imposée par les événements, bien loin l’enchaînement « logique » ; l’importance du rythme et de la rime, dans la poésie et dans la musique également, ainsi que la quête d’harmonie, les voix instrumentales qui se répondent, les dissonances, etc. Dès lors la pensée échappe aux relations de cause à effet et la vie reprend ses droits.

Pour saisir également l’apport des arts au développement du jugement, il nous faut dépasser cette idée selon laquelle la faculté de penser ne concerne que la tête. Car un jugement sain, qui tient compte de la réalité objective et du contexte et génère un sentiment de vérité implique l’être tout entier. C’est une des raisons pour lesquelles Steiner soutient qu’on développe mieux la faculté de jugement en faisant faire du tricot aux enfants qu’en leur faisant faire des exercices « logiques »[18]. Dans son Éloge de la main, Henri Focillon illustre bien ce dont il est question :

La possession du monde exige une sorte de flair tactile. La vue glisse le long de l’univers. La main sait que l’objet est habité par le poids, qu’il est lisse ou rugueux, qu’il n’est pas soudé au fond de ciel ou de terre avec lequel il semble faire corps. L’action de la main définit le creux de l’espace et le plein des choses qui l’occupent. Surface, volume, densité, pesanteur ne sont pas des phénomènes optiques. C’est entre les doigts, c’est au creux des paumes que l’homme les connut d’abord. L’espace, il le mesure, non du regard, mais de sa main et de son pas. Le toucher emplit la nature de forces mystérieuses. Sans lui elle restait pareille aux délicieux paysages de la chambre noire, légers, plats et chimériques[19].

Ces perceptions de la densité, du volume, de la mesure, ne sont-elles pas déjà des jugements? Il en est de même dans le tricot ou dans le filage, où les mains perçoivent la tension, la finesse, la régularité; dans le modelage où les mains saisissent à la fois la texture, la souplesse, la chaleur et tentent, par le mouvement de donner forme. Que dire aussi des mains applaudissant une scène réjouissante; déjà, le jeune enfant le fait naturellement. La main qui gifle aussi, emportée par le bras dans une réaction quasi automatique, un jugement instantané. Est-ce en reconnaissance de cette faculté de jugement que les médias sociaux utilisent la main, pouce vers le haut ou vers le bas, pour signifier un accord ou un désaccord? N’est-il pas aussi question de jugement quand, à la suite de Wittgenstein, Thomas De Koninck attribue à la main la quête de certitude : « Ainsi donc, la main et l’intelligence ont en partage la quête de certitude et la vérification. C’est ma main qui m’assure d’abord que le bâton dans l’eau est bien droit, en dépit des assurances contraires, claires et distinctes, de mon œil »[20].

Ainsi, les représentations formées par la tête tantôt nourrissent le jugement des mains et tantôt en découlent. « Entre l’esprit et la main, les relations ne sont pas aussi simples que celle d’un chef obéi et d’un docile serviteur. L’esprit fait la main, la main fait l’esprit » écrit Focillon[21]. Il y a une véritable collaboration et une complémentarité active entre l’esprit et la main, entre la main et la pensée. La main dont la libération, grâce à l’acquisition de la verticalité, a permis le développement de la pensée humaine. La main, qui, une fois libérée, a pu être consacrée à d’autres activités que simplement soutenir le corps et saisir la nourriture. « La liberté de la main implique presque forcément une activité technique différente de celle des singes et sa liberté pendant la locomotion, alliée à une face courte et sans canines offensives, commande l’utilisation des organes artificiels que sont les outils »[22] écrivait André Leroi-Gourhan. Il s’inquiétait d’ailleurs du devenir de la relation intime entre la pensée et la main, face à la diminution drastique de l’usage de cette dernière dans nos sociétés :

Il serait de peu d’importance que diminue le rôle de cet organe de fortune qu’est la main si tout ne montrait pas que son activité est étroitement solidaire de l’équilibre des territoires cérébraux qui l’intéressent. « Ne rien savoir faire de ses dix doigts » n’est pas très inquiétant à l’échelle de l’espèce, car il s’écoulera bien des millénaires avant que régresse un si vieux dispositif neuro-moteur, mais sur le plan individuel, il en est tout autrement; ne pas avoir à penser avec ses dix doigts équivaut à manquer d’une partie de sa pensée normalement, philogénétiquement humaine. Il existe donc à l’échelle des individus sinon à celle de l’espèce, dès à présent, un problème de la régression de la main[23].

Devons-nous ajouter que les arts doivent tous leur expression à l’acuité de nos sens en même temps qu’ils en stimulent l’épanouissement, parfois jusqu’au-delà même du sensible. De la peinture, Maurice Merleau-Ponty écrit qu’« elle donne existence visible à ce que la vision profane croit invisible, elle fait que nous n’avons pas besoin de “sens musculaire” pour avoir la voluminosité du monde. Cette vision dévorante, par-delà les “données visuelles”, ouvre sur une texture de l’Être dont les messages sensoriels discrets ne sont que les ponctuations ou les césures, et que l’œil habite, comme l’homme sa maison »[24]. Merleau-Ponty ne parle ici que de la vue, mais le peintre doit aussi beaucoup au mouvement, au toucher, à l’équilibre. En sollicitant ainsi les sens, ces médiateurs entre l’humain et le monde, les arts contribuent à nourrir la pensée et à la vivifier.

L’activité artistique et artisanale est l’expression d’une pensée vivante, une pensée en mouvement. Le lien direct entre le mouvement et la pensée est largement reconnu aujourd’hui. S’agissant de la petite enfance, des liens directs ont été établis entre le développement moteur et celui du langage et de la pensée. Ce lien n’est pas réservé au début de la vie, il perdure. « Le mouvement ancre la pensée et l’apprentissage »[25] écrit Hannaford. John Ratey abonde dans le même sens « movement is crucial to every other brain function, including memory, émotion, language, and learning. […] Our « higher » brain functions have evolved from movement and still depend on it »[26]. C’est pourquoi Wolfgang Schad, à la suite de Steiner, écrit qu’« On trouve l’esprit en s’ouvrant et en se reliant activement au monde. L’esprit est ce qui crée dans le monde et dans l’homme, l’esprit est activité »[27]. Activité de création dans laquelle nos membres sont nos meilleurs alliés. « Nous avons très peu conscience que nos membres sont les meilleurs organes de l’intuition » écrit Schad, soulignant que la langue française « indique déjà que “comprendre” ou “saisir” a quelque chose à faire avec les bras et les mains » et qu’en allemand, « le verbe “verstehen” (comprendre) précise qu’il s’agit aussi des pieds (stehen = se tenir debout) »[28]. Le physicien et physiologiste Hermann Helmholtz témoignait que l’intuition, cet « éclair de l’esprit », n’est « jamais sortie de mon cerveau fatigué, ni quand j’étais assis à mon bureau. […] Souvent, comme Goethe l’exprime […], elle est là le matin au réveil, comme Gauss l’a remarqué lui aussi. Mais elle vient le plus volontiers […] lorsque j’escalade tranquillement, sous un beau soleil, les pentes boisées d’une montagne »[29]. Chacun peut d’ailleurs faire l’expérience des idées qui jaillissent beaucoup plus facilement en marchant qu’en demeurant assis devant sa table de travail, ou encore au lever du lit, après une nuit salutaire dont les problèmes insolubles la veille encore ressortent tout à coup résolus.

Pensée vivante et science

La pensée vivante a donc toujours été présente dans ce que l’être humain crée de ses mains, dans les arts, dans l’artisanat et dans les intuitions. C’est pourquoi les écrivains et les poètes ont, pour certains, contribué davantage à éclairer les mystères de l’humanité que toutes les recherches scientifiques. Parce que cette pensée vivante ne peut exister dans la dualité, elle exige de plonger dans la vie, de faire un avec l’objet, comme le conseillait le poète japonais Matsuo Bashö :

Si vous voulez connaître le pin, allez jusqu’au pin; si c’est le bambou, allez jusqu’au bambou. Cessez de songer à vous-même; sinon, vous vous imposez vous-même sur l’objet, et vous n’apprenez pas. La poésie naîtra quand vous serez devenus un l’objet et vous, quand vous aurez plongé suffisamment loin dans l’objet pour voir quelque chose comme une lumière cachée y scintiller. Aussi bien formulée que soit votre poésie, si votre sentiment n’est pas naturel, si vous et l’objet êtes séparés, votre poésie n’est pas une vraie poésie, mais tout au plus une contrefaçon de vous-même[30]. 

Pourtant, la pensée vivante peut aussi déborder le cadre artistique et s’inviter dans la recherche scientifique. Cette pensée vivante, ou pensée intuitive, le physicien Arthur Zajonc l’appelle « l’expérience eurêka » et soutient que toutes les découvertes scientifiques sont de cette nature, mais que souvent, dans le processus d’expression de l’idée, dans sa traduction en mots et en symboles, on ne retient que son pouvoir technique[31]. Depuis Kant, cette pensée intuitive s’est vue refuser l’accès à la connaissance, mais Goethe s’est insurgé, en son temps, contre les limites de la pensée décrétées par Kant, pour s’autoriser la connaissance du monde vivant grâce à sa « faculté de juger intuitive »[32]. Le travail accompli par Goethe dans sa quête pour comprendre le monde des plantes, qui l’avait conduit à percevoir intuitivement la plante originelle et à en faire « une description conforme à la nature », lui semblait tout à fait s’inscrire dans cette ouverture opérée par Kant, mais que ce dernier voulait, arbitrairement, réserver au domaine moral. Goethe démontre la possibilité humaine de développer une faculté de connaissance qui dépasse l’entendement et la raison discursive. Pour Goethe, le dualisme n’a pas lieu d’être, la séparation entre le monde spirituel et le monde sensible n’existe pas hors de l’Homme et si la connaissance implique l’analyse faite par l’entendement, elle doit néanmoins, par la raison, rétablir l’unité, non pas comme un universel analytique obtenu par abstraction, mais par la saisie intuitive de l’idée : « le concept est la somme, l’idée le résultat de l’expérience; faire la première exige l’entendement, appréhender le second, la raison »[33].

Dans un discours tenu en 1967 devant la Société Goethe de Weimar, Werner Heisenberg regrettait que les physiciens de sa génération n’aient pas tiré bénéfice du message de Goethe :

Simultanément, les dangers sont devenus aussi menaçants que Goethe l’avait prévu. Nous pensons par exemple au travail dépersonnalisé, dépourvu d’âme, à l’absurdité des armes modernes, à la fuite dans la folie, dans l’illusion, qui avait pris la forme d’un mouvement politique. Satan est un Seigneur puissant. Mais le domaine lumineux, dont nous avons parlé déjà tout à l’heure en rapport avec la musique romantique, et que Goethe savait reconnaître partout à travers la nature, (ce domaine) est aussi devenu visible dans les sciences naturelles modernes, là où elles font connaître le grand ordre cohérent du monde. Aujourd’hui encore nous pouvons apprendre de Goethe que nous n’avons pas le droit de laisser dépérir tous les autres organes en faveur d’un seul : l’analyse rationnelle; qu’il importe plutôt de saisir la réalité par le moyen de tous les organes qui nous sont donnés et de nous fier au fait que cette réalité reflètera alors aussi l’essentiel : « le un, le bien, le vrai ». Espérons que cet avenir réussira mieux que notre temps, que ma génération a réussi[34].

Ces organes auxquels réfère Heisenberg, ce sont précisément ceux que Goethe s’appliquait à développer, par des exercices spirituels, et qui lui permettaient de saisir l’Unité. Car l’unité existe déjà, mais elle n’est pas perceptible par les sens. Pour y accéder, il faut renforcer nos capacités cognitives, apprendre à diriger le regard par la pensée, développer nos organes de perception jusqu’à ce qu’« ultimement, nous contemplions l’idéel dans le réel comme phénomène archétypal »[35].

Heisenberg n’est pas le seul à reconnaître l’importance de sortir du carcan imposé par la pensée discursive. Selon Hans-Peter Dürr, physicien et directeur du prestigieux Institut Max-Planck de Munich au moment d’écrire ces mots : « Grâce à notre raison – et pas seulement à notre entendement —, notre qualité d’homme nous permet en effet de nous orienter suffisamment et nous donne la possibilité de décider et d’agir librement »[36]. C’est-à-dire, précise-t-il plus loin, que : « La science, avec sa méthodologie analytique, son mode de pensée qui fragmente et vise à l’exactitude, échoue à appréhender la signification proprement dite de la réalité, laquelle n’est accessible que par les rapports mutuels du tout avec tout, par la fusion de l’élément particulier dans le tout »[37]. C’est en raison de ces limites et aussi de toutes les découvertes issues de la physique quantique, qui ont mis en évidence les « limites de principe » de la pensée scientifique et son incapacité à éclairer la globalité de la réalité que Dürr affirme que « pour ne pas rester aveugle dans la variété, nous ne devrions pas renoncer à considérer le monde globalement et intuitivement – ce qui nous est parfaitement possible et nous permettrait de distinguer plus facilement les formes, de procéder plus surement aux évaluations »[38]. Il ne s’agit pas là d’une option, mais d’une nécessité, estime Dürr :

La prédominance de l’approche scientifique, l’expérience directe d’un progrès technique époustouflant nous barrent aujourd’hui la vue du transcendantal et de sa nécessité pour notre vie. Mais, avec la montée des dangers, ce manque devient plus sensible. Dans la variété confuse d’un monde technique de plus en plus complexe, l’appel d’une orientation plus nette se fait de plus en plus clair. Chez l’homme de la société moderne, l’exigence croît de connaître à nouveau – derrière ce monde de pensées de plus en plus éclaté et émiette – le « un » essentiel ou, comme le dit Werner Heisenberg, l’« ordre central »[39].

Si la science à laquelle nous exposent les médias d’information continue de reposer sur l’ancienne vision « classique et mécanico-déterministe du XIXsiècle, poursuit Dürr, [ce] n’est pas un hasard. Car le nouveau paradigme, celui qui nous est imposé par la physique quantique, ne peut plus être concilié avec nos représentations habituelles et ne peut être que difficilement décrit dans notre langue usuelle »[40]. Dans ce nouveau paradigme, le monde matériel qui apparaissait, pour la science, comme la réalité, « se dévoilait de plus en plus comme une illusion et se volatilisait dans une réalité où ce n’était plus la matière qui dominait, mais la forme »[41]. Par conséquent, la connaissance scientifique et la pensée qui la sous-tend, à savoir l’entendement, la pensée analytique, « n’embrassent qu’une structure, un “comment”, mais non le contenu, l’être, le “quoi” de l’ultime réalité »[42]. L’ultime réalité, poursuit Dürr, se comprend, selon Erwin Schrödinger et David Bohm, comme « esprit ». « Le monde physique apparaît comme une concrétisation de la transcendance »[43]. Cependant, pour saisir cette transcendance, la pensée habituelle ne suffit pas et le langage courant fait défaut. C’est pourquoi dans les écrits des physiciens réunis dans l’anthologie Physique et transcendance et auxquels réfère Dürr, les idées exprimées, bien qu’elles s’inspirent des résultats de la physique quantique, « débordent d’une connaissance scientifique assurée »[44]. Cependant, soutient Dürr, « elles montrent peut-être aussi pourquoi cela est inévitable et pourquoi cela ne doit pas être préjudiciable à ce qu’elles peuvent contenir de vérité. On ne peut parler de la transcendance que par métaphores et par images. Si nous pouvons reconnaître la vérité derrière ces images, c’est parce que nous descendons tous le même courant de la conscience »[45].

L’expérience dont il est question est bien celle de la pensée pure, de la pensée intuitive, cette fenêtre ouverte sur l’esprit dont nous sommes tous issus. La citation suivante, de Werner Heisenberg et publiée sous le titre Ordre de la réalité, va dans ce sens :

Ce qu’il y a de plus intéressant, écrit Heisenberg, ce sont les domaines de la science pure, dans lesquels il n’est plus question d’applications pratiques, dans lesquels au contraire la pensée pure part à la recherche des harmonies cachées du monde. Ce domaine intime, où la science et l’art sont à peine encore discernables, est peut-être le seul lieu, pour l’humanité d’aujourd’hui, où la vérité lui apparaît dans toute sa pureté et non plus voilée par les idéologies et les désirs humains[46].

Ainsi, poursuit Dürr, pour compléter cet extrait, « La physique et la transcendance désignent seulement deux domaines différents d’une seule réalité, qui va du niveau inférieur, où nous pouvons encore parfaitement objectiver, au niveau supérieur, “où le regard s’ouvre à des parties du monde sur lesquelles on ne peut plus parler qu’en paraboles” » (Dürr 1994, p. 121).

La pensée doit devenir un art.

Ce qu’il nous faut comprendre ici, c’est que pour comprendre le vivant, pour saisir l’unité, il faut non pas entretenir une pensée qui ne soit qu’application de procédures préétablies, une pensée « technique », ou une technique de penser. Il faut que la pensée devienne un art. Car un des caractères propres à la véritable œuvre d’art est son imprévisibilité, c’est-à-dire qu’on ne peut connaître l’œuvre qu’une fois qu’elle est terminée. Il en est de même de la véritable pensée, qu’il nous est impossible de connaître avant de l’avoir créée. Un art qui exige, certes, une certaine discipline et des exercices pour pouvoir atteindre sa maturité, pour s’assurer de pouvoir la conduire vers un véritable accomplissement. Un art, néanmoins, qui nécessite de se détacher de toute prescription procédurale pour accepter de pénétrer l’objet de recherche et de le suivre là où il est nécessaire d’aller pour le comprendre.

L’artiste, qui est toujours pris pour le rêveur, celui qui a la tête dans les nuages, etc. est au contraire extrêmement présent. Il est en connivence, même avec les choses dont on nous a appris qu’elles n’étaient pas importantes, les choses inutiles […].

Mais dans cette connivence il y a, en même temps, une petite distanciation, une notion d’intervalle pour percevoir les choses. Si on a le nez dessus, on ne voit plus rien. Il y a donc toujours cet aller retour…Il y a action, réflexion, action, non-action, plein d’actions […].

Prenons un exemple : un peintre est devant sa toile. Il peint. Il y a dualité. Par moments, c’est le peintre qui décide. S’il a envie de faire cela, il fait cela. À d’autres moments, c’est la peinture en train de se faire qui demande, qui commande de faire ceci ou cela. Et puis il y a d’autres moments de pur bonheur où il n’y a plus de dualité, mais une sorte d’osmose.

Après, il y aura un temps de regard où il faut bien s’extraire. Regarder cette peinture comme si ce n’était pas moi qui l’avais faite, mais presque comme si c’était quelqu’un d’autre. Ce n’est pas une dualité douloureuse[47].

Comme le peintre assiste, d’une certaine façon, au dévoilement de son œuvre dans un mouvement d’avancée et de retrait, celui qui veut connaître le vivant doit s’investir. Ainsi, si on veut comprendre un être humain, comprendre sa pensée, il ne suffit pas d’écouter ce qu’il dit en gardant ses distances et en cherchant à situer son discours dans un schéma préétabli, par la sociologie et la psychologie, en l’analysant et en établissant des liens avec d’autres pensées. Il faut se laisser absorber par la pensée de l’autre, fusionner avec elle et de revenir à soi, dans des allers-retours qui permettent à la fois de vivre dans la pensée de l’autre tout en demeurant soi-même.

C’est pourquoi une des grandes nourritures, ou plutôt une des voies d’accès à l’intuition, à la pensée vivante, est la méditation. Comme le peintre doit se laisser emporter dans la vie des couleurs pour réaliser son œuvre, parce qu’elles en sont la source nourricière, la pensée intuitive doit faire de même, par la méditation, qui consiste à renoncer aux impressions sensorielles pour ne s’adonner « qu’à la vie de la pensée »[48]. Une vie de la pensée qui doit, « grâce à une ferme concentration sur certaines pensées faciles à saisir dans toute leur étendue, être portée à une vitalité à une intensité que seule, d’ordinaire, a la vie sensible extérieure »[49]. Ainsi, la méditation permet de vivre dans la pensée et de la rendre mobile, vivante, imagée, la libérant ainsi de son caractère abstrait.

 

 



[1] Charles Taylor, L’Âge séculier, traduit de l’anglais par Patrick Savidan, Montréal, Boréal, 2011, p. 180.

[2] Extrait du Faust de Goethe, cité dans Johann Wolfgang von Goethe, La métamorphose des plantes et autres écrits botaniques; traduit de l’allemand par Henriette Bideau, 4e édition, Paris, Triades, 1999, p.22.

[3] Wolfgang Schad, Man and Mammals, Toward a Biology of Form, translated form the German by Carroll Scherer, illustrated by Christian Brügger and Ulrich Winkler, Adelphy University, Garden City, New York, Waldorf Press Publischers, 1977, p. 278.

[4] Alain BOUTOT, « Sciences – Science et philosophie », Encyclopaedia Universalis [en ligne], consulté le 20 novembre 2013.URL : http://www.universalis-edu.co,/encyclopedie/sciences-science-et-philosophie/

[5] Edmund Husserl, La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale, traduit de l’allemand et préfacé par Gérard Granel, Paris, Gallimard, 1976, p.10.

[6] Erwin Schrödinger cité dans Robert M. Augros et George N. Stanciu, La nouvelle histoire de la science, traduit par Georges Allaire avec la collaboration de Serge Tisseur, Sainte-Foy, Les éditions Le Griffon d’argile, 1987, p.102.

[7] Guy Debord, La Société du spectacle, Paris, Buchet-Chastel, 1967, p.9

[8] Gerald Hüther, Neurobiologie et éducation : conférence du Prof. Dr. Gerald Hüther (vostfr), dans le cadre de la zweite Konferenz des Denkwerks Zukunft, Berlin, 15 janvier 2011. http://www.lessymboles.com/neurobiologie-et-education-conference-du-prof-dr-gerald-huther-vostfr/

[9] Erwin Schrödinger cité dans Robert M. Augros et George N. Stanciu, La nouvelle histoire de la science, traduit par Georges Allaire avec la collaboration de Serge Tisseur, Sainte-Foy, Les éditions Le Griffon d’argile, 1987, p.84

[10] Olivier Reboul, « Sentiment », Encyclopaedia Universalis [en ligne], consulté le 27 mars 2013. URL : http://www.universalis-edu.com/encyclopédie/sentiment/

[11] Ibid.

[12] Dr Carla Hannaford, La gymnastique des neurones, le cerveau et l’apprentissage, traduit de l’anglais par Marie-Cécile Baland, Paris, Jacques Grancher Éditeur, 1997, p. 68

[13] Noël Mouloud, « Jugement », Encyclopaedia Universalis [en ligne], consulté le 29 février 2016. URL : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/jugement/.

[14] Ibid.

[15] Olivier Reboul, L’endoctrinement, coll : L’éducateur, Paris, Presses Universitaires de France, 1977, p. 103.

[16] Ibid.

[17] Rudolf Steiner, La philosophie de la liberté, traduction française par Georges Ducommun, Genève, Éditions Anthroposophiques Romandes, 2e édition, 1983, p. 107.

[18] Rudolf Steiner, Pédagogie et connaissance de l’homme, traduction de Mireille Delacroix, Genève, Éditions Anthroposophiques Romandes, 2e édition, 1999, p. 58.

[19] Henri Focillon, Éloge de la main, coll : « Les classiques des sciences sociales », dirigée et fondée par Jean-Marie Tremblay, Site web : http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences _sociales/index.html, édition électronique réalisée à partir du texte de Henri focillon, « Éloge de la main » (1934), in Vie des formes, suivi d’Éloge de la main, Paris, Presses Universitaires de France, 1943, 7e édition, 1981, P.6. 

[20] Thomas De Konninck, De la Dignité Humaine, Paris, PUF Quadrige, 2002, p. 108.

[21] Henri Focillon, op. cit. p. 18

[22] André Leroi-Gourhan, Le geste et la parole, Technique et Langage, coll : Sciences d’aujourd’hui, dirigée par André George, Paris, Éditions Albin Michel, 1964, p.33.

[23] André Leroi-Gourhan, Le geste et la parole. La mémoire et les rythmes, Paris, Albin Michel, 1965, p. 61-62.

[24] Maurice Merleau-Ponty, L’œil et l’esprit, Préface de Claude Lefort, Paris, Gallimard, 1964, p. 27.

[25] Hannaford, op. cit. p. 119.

[26] John J. Ratey, M.D., A User’s guide to the Brain, Perception, Attention, and the four Theaters of the Brain, New York, Vintage Books A Division of Random House, Inc., 2002, p. 148.

[27] Wolfgang Schad, Le regard périphérique ou le complément des lumières, Laboissière en Thelle, Triades, 2015, p. 90-91.

[28] Ibid. p. 93

[29] Cité dans Schad, op.cit.p. 94.

[30] Cité dans Arthur Zajonc, La méditation, une recherche contemplative, Laboissière en Thelle, Triades, 2012, p. 134

[31] Arthur Zajonc, Catching the Light, The Entwined history of Light and Mind, New York Oxford, Oxford University Press, 1993, p. 212

[32] Voici ce qu’écrivait Goethe à ce sujet, après avoir souligné l’attitude contradictoire de Kant « tantôt paraissant s’efforcer de contenir la faculté de connaissance dans les limites les plus étroites, tantôt indiquant d’un signe discret l’espace au-delà des limites qu’il avait lui-même tracées » : « Il est vrai, l’auteur semble indiquer l’existence d’un entendement divin; mais si dans le domaine moral nous sommes censés, par la foi en Dieu, en la vertu et en l’immortalité, nous élever vers une région supérieure et nous approcher du premier des êtres, il pourrait bien en être de même dans le domaine intellectuel, et que, par la contemplation d’une nature toujours créante, nous nous rendions dignes de participer par l’esprit à ses productions » dans : Goethe, La métamorphose des plantes …, 1999, p. 198-199.

[33] Goethe, La métamorphose des plantes …, 1999, p. 309.

[34] Wolfgang Schad, Penser le vivant * Qu’est-ce que le goetheanisme? Yverdon, Éditions Tycho Brahé, p. 58

[35] Arthur Zajonc, Catching the Light…op. cit. p. 202

[36] Hans-Peter Dürr, De la science à l’éthique, physique moderne et responsabilité scientifique, traduit de l’allemand par Claude Dhorbais, coll : Sciences aujourd’hui, Paris, Albin Michel, 1994, p. 20.

[37] Ibid, p. 28.

[38] Ibid.p. 57.

[39] Ibid.p. 111-112

[40] Ibid. p. 113.

[41] Ibid. p. 116.

[42] Ibid. p.117.

[43] Ibid. p.116.

[44] Ibid. p.120.

[45] Ibid. p.120.

[46] Cité dans Dürr, op. cit. p. 121.

[47] Jean-Loup Cornilleau, « Le nez au vent » dans Miguel Angel Molina & Ivan Toulouse, Théories de la pratique, ce qu’en disent les artistes, Paris, l’Harmattan, p. 70-71.

[48] Rudolf Steiner, Bases de la pédagogie, cours aux éducateurs et enseignants, Traduction française, Genève, Éditions Anthroposophiques Romandes, 1988, p. 98.

[49] Ibid. p. 98.

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