Essentiel
«[...]Les femmes regardaient Booz plus qu'un jeune homme,
Car le jeune homme est beau, mais le vieillard est grand.
Le vieillard, qui revient vers la source première,
Entre aux jours éternels et sort des jours changeants;
Et l'on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
Mais dans l'oeil du vieillard on voit de la lumière.» [...]
Victor Hugo,
Booz endormi.
Enjeux
Le seul véritable enjeu de la vieillesse, c'est la
sagesse, car celle-ci ne saurait être apprise ni par le jeune ni par l'adulte:
«Jeune, on n'est pas capable d'apprendre la sagesse. Ce qu'on apprend quand on est jeune, c'est à réciter et à lire, ce n'est pas la sagesse. Si l'on pouvait alors apprendre la sagesse, ce serait assurément la preuve d'une intelligence très précoce. Mais une pareille précocité est rarissime. Adulte, on n'est pas [non plus] capable d'apprendre la sagesse. Ce qu'on apprend alors, c'est ce qu'on voit et ce qu'on entend, ce n'est pas la sagesse. Si l'on pouvait alors apprendre la sagesse, ce serait assurément la preuve d'une maturité peu commune. Mais cette maturité est rarissime (...) À soixante ou soixante-dix ans, non seulement richesse et honneurs paraissent comme nuages flottants, mais naissance et mort semblent se suivre comme matin et soir. Tout ce que nous avons appris, vu, pensé, ce à quoi nous nous sommes efforcés jadis et dont nous n'avons pas su profiter, tout cela nous pouvons aujourd'hui en tirer parti. Les prétentions de nos cinq sens ayant été éliminées, tout notre coeur se révèle peu à peu [dans sa pureté]. C'est comme un tissu de soie écrue tombé dans la boue: si on le lave, il retrouve facilement son état naturel; comme une perle perdue dans une chambre: si on la cherche, on la retrouve aisément. Par conséquent, c'est dans la vieillesse qu'on peut véritablement apprendre à devenir sage.»
Tang Zhen,
Écrits d'un sage encore inconnu [Titre original:
Quianshu], traduit du chinois par Jacques Gernet,
Connaissance de l'Orient, Gallimard/Unesco, Paris, 1991.