Jazz
Cette musique afro-américaine (comme la désignent les dictionnaires) a été créée au début du XXe siècle par les Noirs du Sud des États-Unis. Elle est basée sur l'improvisation et la mise en valeur de rythmes tellement spécifiques qu'il suffit de l'entendre une fois pour la distinguer instantanément des autres formes de musique. Le jazz est une musique de contestation où la liberté totale, l'improvisation sont maîtres. Mais même si les Blancs l'ont adopté, il est avant tout l'expression d'un groupe culturel distinct, celui des Noirs américains. Alors que les mélomanes classiques sont en général rebelles aux formes extrêmes du rock, beaucoup reconnaissent le jazz comme une musique originale et créatrice. Il a été le lieu d'expression de plusieurs virtuoses reconnus mondialement, Louis Armstrong (1900-1971), Duke Ellington (1899-1974) et Charlie Parker* (1920-1955).
Sidney Bechet fut l'un des plus importants pionniers créoles du jazz, lequel a connu une évolution très rapide. Il est une synthèse de plusieurs types de musique comme le ragtime, le blues, les marches militaires et les negro spirituals. Bien qu'il soit apparu à la Nouvelle-Orléans avec des artistes comme Buddy Bolden, Manuel Perez, Alphonse Picou, on dit que c'est à Chicago qu'il s'est épanoui, grâce à la prohibition!
On sait que le 18e Amendement de la Constitution américaine prohiba, en janvier 1919, sur tout le territoire des États-Unis, l'usage de l'alcool titrant à plus de 0.5%. Cette loi avait été demandée avec insistance par les milieux évangéliques pour des raisons morales et sociales: accroître la capacité de travail et le pouvoir d'achat des salariés en réduisant l'alcoolisme. Elle ne sera abolie qu'en l933 par le président Roosevelt et, entretemps, fut combattue dans les milieux interlopes par des gansgters dont le plus célèbre est Al Capone. Il se livra à Chicago à une intense contrebande de boissons alcooliques qui donna lieu à une criminalité très violente. Al Capone fut emprisonné de 1932 à 1939.
Les Al Capone des années vingt s'étaient entichés de ces rythmes et ils s'offraient volontiers, à Chicago en particulier où s'était organisée la résistance à la loi sur la prohibition, des soirées avec les meilleurs jazzmen de l'époque. Ces jazzmen étaient de jeunes musiciens, blancs pour la plupart, qui, en adaptant le style de la Nouvelle-Orléans, créeront le style Chicago. Quelques noms: Benny Goodman, Gene Krupa, Bud Freeman. C'est à New York au même moment que commence à triompher Louis Armstrong.
Les années 40 seront les années de ce qu'on a appelé le middle-jazz, ou mainstream ou jazz classique. Fletcher Henderson renouvelle le langage du jazz. C'est l'époque de Duke Ellington, de Count Basie et de son orchestre où se révèle le saxophoniste Lester Young. La technique de tous ces musiciens atteint la perfection. Le jazz devient une musique de divertissement et de danse; les salles de danse se multiplient, les Big Bands également.
Mais un groupe de musiciens fait éclater les structures de l'improvisation. C'est la naissance du jazz moderne, le be-bop, auquel sont rattachés les noms de Thelonious Monk (1920-1982), Kenny Clarke (1914- ), Dizzy Gillespie (1917- ) et Charlie Parker (1920-1955), entre autres. Le rythme et l'harmonie y sont beaucoup plus complexes, on recourt à des accords inhabituels. La phrase mélodique utilise des intervalles plus étendus. Parallèlement se développe un style de vie qui est aussi une danse, le swing, dont le clarinettiste Benny Goodman sera le roi. Le Be Bop suscitera une réaction vers un style plus décontracté, le mouvement «cool». Plusieurs musiciens y sont associés: Gil Evans, le saxophoniste Gerry Mulligan, le pianiste Lennie Tristano, les saxophonistes les Four Brothers qui feront une synthèse des jeux de Parker et de Lester Young. En 1958, le grand trompettiste Miles Davis (1926- ) enregistre une pièce charnière dans l'évolution du jazz, Milestones, où il s'affranchit de la structure classique plus rigide et, à partir de deux accords étendus, ouvre la voie à une plus grande liberté mélodique. Les musiciens blancs de la West Coast adopteront le cool mais essaieront d'emprunter à la musique classique ses techniques de composition pour enrichir le jazz.
Par ailleurs, Charles Mingus (1922-1979) apporte des innovations dans le jeu de l'orchestre qui annonce, tout comme les idées de Davis, le free jazz. Mais avant d'être libre, le jazz connaîtra un retour vers ses racines noires, qu'on appellera le hard-bop. Des formations comme celles de Max Roach, Art Blakey, et Adderley feront la conquête d'un vaste public. Le saxophoniste John Coltrane ainsi que Ornette Coleman (1930- ) révolutionnent le jazz en le dégageant de ses formes classiques. Taylor, né en 1933, ira encore plus loin en opérant une rupture avec le rythme même. Ce sera le free jazz, un mouvement, comme le rock qui en découle d'ailleurs, tout autant politique que musical, de «libération à l'égard des conventions et de l'ordre établi». Taylor, Don Cherry, Albert Ayler et d'autres inventent «une musique violente, chaotique, convulsive, qui n'accepte comme seul principe que celui de l'improvisation collective».
« St. Louis Blues » de W. C. Handy est l'une des chansons qui a connu le plus grand nombre d'enregistrements au XXe siècle. Il en est cependant une qui domine toutes les autres : la version de Bessie Smith en 1925, avec Louis Armstrong (1900-1971) qui l'accompagne au cornet - exemple de coopération entre trois grands (compositeur, chanteuse et instrumentiste) de cette nouvelle musique baptisée jazz. Le sens du mot est obscur, mais à l'origine il avait certainement une connotation sexuelle. Née à La Nouvelle-Orléans au début du XXe siècle, cette musique unissait des éléments venus du ragtime, des chants d'esclaves et des fanfares. L'une de ses caractéristiques est sa fluidité ; les musiciens en public ne jouent jamais le même air de manière tout à fait identique, mais improvisent et exécutent des variations sur les thèmes et sur les paroles.
Bénéficiant de compositeurs et d'interprètes de génie - Jelly Roll Morton (1885-1941), Duke Ellington (1899-1974), Louis Armstrong et Benny Goodman (1909-1986), Bix Beiderbecke (1903-1931), Billie Holiday (1915-1959) et Ella Fitzgerald (1918-1996) - le jazz régna sur la musique populaire américaine de 1920 à 1950 environ. Dans les années 1930 et 1940, la forme la plus populaire fut le style « swing » des grands orchestres, comme ceux de Glenn Miller (1909-1944) et William « Count» Basie (1904-1984). Vers la fin des années 1940, une nouvelle forme de jazz, plus intellectuelle et surtout instrumentale, appelée « bebop », commença à attirer le public. Parmi ses adeptes figuraient le trompette Dizzy Gillespie (1917-1993) et le saxophoniste Charlie Parker (1920-1955). Le trompette Miles Davis (1926-1991) incorpora dans ses compositions de multiples influences, notamment classiques, en particulier dans ses « Sketches from Spain ».
Source: "11. L'exportation de la culture populaire", Portrait des États-Unis, Agence d'information des États-Unis, septembre 1997 (domaine public)