Europe

Être européen selon André Suarès

"Goethe et Stendhal sont les premiers européens depuis la fin du moyen âge. Car au temps de la chrétienté, les grands chrétiens furent hommes de l’Europe, si Europe il y avait: saint Bernard, je suppose. Chaque pays pourra continuer d’avoir ses bons serviteurs, qu’il appelle ses grands hommes; mais il n’y aura plus, en art ni en poésie, de grand homme qui ne soit européen. Il faut désormais porter l’esprit de l’Europe dans l’œuvre même où triomphe le génie d’un peuple ou d’une race.

Être européen, ce n’est pas lire et parler cinq langues, pût-on écrire avec talent dans toutes. Ni passer la vie à errer de pays en pays, être connu à Londres, avoir des amis à Berlin, la gloire à Genève et un lit à Rome. Ni paraître enfin sujet de toutes les nations, plus que le citoyen de sa propre patrie. Il s’agit d’être libre citoyen de toutes, en esprit.

Je ne sais qu’une façon d’être bon européen: avoir puissamment l’âme de sa nation, et la nourrir avec puissance de tout ce qu’il y a d’unique dans l’âme des autres nations, amies ou ennemies. Les plus ennemies nous sont amies en ce qu’elles ont de grand; et si nous sommes à la beauté, leurs plus belles œuvres sont à nous. Il n’y a que des amitiés pour un vaste esprit.

Être européen: être allemand avec Goethe et Wagner; italien avec Dante et Michel-Ange; anglais avec Shakespeare; scandinave avec Ibsen; russe avec Dostoïevski: prendre à soi toutes ces puissances, et ne point se perdre à force de s’y répandre. Mais d’abord, se rendre maître du trésor, et n’en pas être la gardien asservi; en posséder les magies diverses et contraires, au lieu de s’y éparpiller au hasard; en un mot, y faire l’ordre. Voilà ce que j’appelle être européen […]"

André Suarès, Portraits et Préférences. De Benjamin Constant à Arthur Rimbaud, cité d'après l'édition de Paris, Gallimard, 1991, p. 87-88.

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