Les nouveaux groupes religieux au Québec
L’émergence des nouveaux mouvements religieux peut être considérée comme une réponse à la crise de la modernité. La cassure subite des valeurs traditionnelles, l’objectivation de la personne et de l’humain en général, le rapide processus de sécularisation ont subitement privé le Québécois du cadre normatif socio-religieux qui, jusqu’au début des années ‘60, donnait sens à ses actions individuelles et garantissait un consensus social. Après une période d’euphorie générée par la libération d’une structure socio-religieuse et d’un cadre éthique jugés opprimants, un sentiment d’inquiétude et d’angoisse s’est abattu comme une pluie froide sur le Québec. Après que la morale du «Y a rien là» et du «c’est cool» eut vite épuisé ses possibilités d’interprétation, on s’est retrouvé Gros-Jean comme devant, avec son angoisse et ses questions, sans cadre de référence théorique pour y faire face. Les nouveaux mouvements religieux viennent s’inscrire dans cette béance et entendent proposer une réponse globale à l’interrogation et à l’aliénation actuelles.
Deux familles spirituelles
Notre exploration sur le terrain nous permet au premier abord de discerner, dans la jungle des nouvelles «religions», deux grandes familles spirituelles ayant, chacune, des traits spécifiques aux niveaux doctrinal, éthique, mystico-spirituel et socio-politique. L’une et l’autre de ces familles sont nées ou ont reçu un nouveau souffle de la contre-culture qui a profondément secoué le continent américain au milieu des années ‘60. Il semble évident que la contre-culture a popularisé des mouvements de renouveau spirituel de tout acabit - chrétiens, hindous, ésotériques - pour faire face au problème d’identité et à la confusion morale résultant de la crise de la modernité. Les nouveaux mouvements religieux se sont avérés les plus durables des nouveaux phénomènes sociaux survenus au cours des années ‘60. Il en est ainsi parce qu’ils tentent de proposer des alternatives à une philosophie sociale en désintégration. Comme conséquence, ces mouvements ont gagné des adhérents, même parmi les adultes d’âge moyen et de condition aisée dont la confusion morale, encore qu’elle soit moins aiguë que celle des jeunes, est néanmoins sérieuse et largement répandue. Cela est clair dans le cas du «mysticisme» oriental: vulgarisé par la culture «hippie» dans les années ‘60, il a développé des institutions stables et favorisé la participation de professionnels d’âge moyen. A mesure qu’elles universalisent leur appel aux différentes couches de la société, les nouvelles «religions» subissent l’impact d’un processus d’institutionnalisation et de réconciliation avec les institutions dominantes, comme par exemple la famille, le système de carrière, etc.1
Il est intéressant de noter au départ que ces deux grandes familles spirituelles, nées ou revitalisées dans le contexte de la contre-culture, ont développé un antagonisme, parfois farouche, au cours de la dernière décennie. Aux Etats-Unis, cet antagonisme s’exprime souvent en hostilité ouverte;2 ici, au Québec, il est plus larvé, oins visible, mais tout aussi réel. Cet antagonisme laisse insoupçonné, au départ, de profondes différences entre les deux grandes familles spirituelles dont nous parlons.
Première famille spirituelle
Les groupes de la première famille présentent des traits communs qu’il est facile de reconnaître au premier coup d’oeil. Ce sont généralement des groupes fortement structurés qui opèrent souvent comme des institutions enrégimentées et dont l’univers de pensée et le système éthique s’inspirent principalement du vieux fonds judéo-chrétien. Ils retiennent du christianisme traditionnel certains éléments doctrinaux et spirituels. En particulier, ils considèrent la bible comme l’ultime source de référence, même s’ils l’interprètent à la lumière d’une «révélation» subséquente ou à partir de principes particuliers dont les plus communs sont le fondamentalisme, l’éclectisme et le concordisme. Ce sont des groupes à tendance eschatologiste, voire millénariste.
Comme ils prétendent s’aboucher directement au christianisme primitif en sautant à pieds joints par-dessus l’histoire de l’Eglise, ces groupes tendent à se libérer des superstructures historiques du christianisme qu’ils considèrent volontiers comme des superfétations anti-évangéliques. S’inspirant d’un radicalisme sans compromis, ils prétendent à une pureté originelle, ce qui souvent les met dans une situation conflictuelle par rapport aux Eglises établies.
Ces groupes réaffirment, d’une manière stridente, les données de l’absolutisme moral traditionnel. Ils articulent une protestation fervente contre les tendances permissives de la culture ambiante. Ils stigmatisent volontiers, comme des manifestations de Satan et de l’Antéchrist, certains éléments de la structure sociale, et ils ont une tendance innée à considérer certains événements socio-politiques comme des prodromes de la fin du monde. Ils ont du mal à reconnaître la valeur des institutions civiles. Alors, ils se mettent en retrait de la société dans un esprit de tolérance ou de détachement; ou au contraire, sous l’influence d’un enthousiasme apocalyptique, ils attaquent les institutions et tentent de les remplacer par un ordre social nouveau. Tous les intérêts séculiers sont rapportés à leur univers spirituel pour y être jaugés et jugés. Et ce qui n’est pas conciliable avec la doctrine et les intérêts des groupes, est ou bien rejeté ou bien évité.
Ces groupes proposent une vision du monde dichotomique. Ils mettent l’accent sur la discontinuité, la rupture, la séparation du sacré et du profane, du surnaturel et du naturel, de la grâce et de la nature, de Dieu et du monde, de l’ordre rédemptionnel et de l’ordre créationnel. Ils proposent une éthique fortement marquée par une disjonction conceptuelle entre la non-signifiance de l’action séculière dans le monde empirique et le sens octroyé à un royaume spirituel gouverné par un Dieu parfait.
Point étonnant dès lors que ces groupes parlent le langage de l’engagement, de la conversion, de la décision. «Prendre une décision pour Jésus», «Accepter Jésus comme sauveur», «Dire oui à Jésus»: autant d’expressions qui indiquent que l’on se situe sur un registre ascétique et que l’expérience religieuse proposée par ces groupes est de nature éthique.
Il semble que cette famille spirituelle exerce une attraction particulière sur les citadins de la classe moyenne inférieure, dont le niveau de culture est élémentaire, et sur des personnes dont l’arrière-fond religieux est conservateur.
Dans cette famille spirituelle, mentionnons les groupes suivants: les Témoins de Jéhovah, les Adventistes, les Mormons, le Temple de l’Evangile, le Tabernacle chrétien de l’Evangile des derniers temps, l’Eglise de l’unification (Moonisme), l’Eglise du Réveil, les Enfants de Dieu, l’Eglise missionnaire du plein Evangile, le groupe de Moïse sur la Montagne de l’Eternel, etc.
Deuxième famille spirituelle
A côté de cette famille spirituelle et religieuse qui propose une expérience de foi, caractérisée, d’une part, par la dimension éthique et eschatologique et, d’autre part, par sa référence au substrat judéo-chrétien, d’autres groupes présentent des liens de parenté indéniables entre eux. De par l’attitude générale qu’ils engendrent, de par le type de religiosité qu’ils favorisent et de par la structure des éléments qui les composent, ces divers groupes forment une véritable famille religieuse et spirituelle.
Ces groupes ne puisent pas leurs symboles fondamentaux et leurs idées inspiratrices au grand courant judéo-chrétien, mais aux religions orientales, à la tradition ésotérique ou spiritualiste, à la psilogie ou à la science (ou science-fiction). Ils nous apparaissent souvent comme des amalgames syncrétistes ou des agrégats d’éléments empruntés aux traditions spirituelles et religieuses les plus diverses.
Ces groupes se présentent comme les dépositaires de la vérité ultime, dont les religions établies ne sont que des manifestations extérieures relatives. Ils se posent comme des moyens d’union avec le divin. Ils font montre d’une certitude intérieure qui les rend indépendants de l’Eglise institutionnelle ou de toute religion établie. D’ailleurs, ils prétendent être le coeur, l’essence même des religions. De là découle la conviction que l’entrée dans un de ces groupes n 1 exige pas la rupture d’avec l’Eglise. Aussi, ces groupes clament-ils, à qui veulent les entendre, qu’on peut se joindre à eux tout en restant chrétien, catholique ou musulman; ou même, qu’ils sont les vrais chrétiens, les vrais musulmans ou les vrais hindous. Les vrais, c’est-à-dire les parfaits. Les religions institutionnalisées sont vues uniquement comme des voies objectives (et minables) vers la Vérité absolue.
Ces groupes tendent à projeter une vision de l’univers dans laquelle la multiplicité des êtres est réduite à une unité métaphysique ultime qui dissout les polarités et impute au monde physique une qualité illusoire ou épiphénoménale. De cette connexion métaphysique entre l’Absolu et le fini, l’un et le multiple, découle la conviction de la possibilité d’établir une union, une fusion entre l’homme et le divin. D’où la primauté accordée à la vie intérieure, à l’éveil spirituel, à l’exploration du psychisme et de la conscience. Ces groupes insistent sur la communion expériencielle avec le «je» profond qui est volontiers considéré comme une manifestation ou un fragment du divin, de la Conscience cosmique, de l’Énergie universelle.
Les groupes de cette famille religieuse favorisent une expérience spirituelle centrée sur la personne, sur le sujet. Ils proposent des expériences d’intériorité, grâce à diverses techniques (méditation, jeûne, posture, régime alimentaire) qui permettent à l’adepte d’accéder à des niveaux supérieurs de conscience, à des états bienheureux d’illumination.
La primauté donnée à la conscience et la conviction du caractère illusoire du monde conduisent au subjectivisme égocentrique et au relativisme moral. Ces groupes apparaissent souvent comme des extensions ou des systématisations religieuses des tendances relativistes et libérales de la culture ambiante. L’absence de code moral, dans ces groupes, est chose bien connue. La seule norme éthique, c’est la loi de la conscience et de l’expérience intérieure. Cela n’implique nullement que les adeptes de ces groupes sombrent dans l’immoralité ou l’hédonisme sauvage. D’ailleurs cet a-nomisme ou anti-nomisme n’est pas absolu. Bien des groupes proposent, à côté des techniques de libération, certaines normes morales qui sont conçues, non comme des impératifs catégoriques ou des absolus métaphysiques, mais comme des instruments aptes à promouvoir l’éveil spirituel. Les adeptes de cette famille spirituelle peuvent parfois s’imposer une discipline de vie fort rigide.
Sauf, peut-être, pour quelques rares exceptions, ces groupes ne sont pas de tendance eschatologique. Ils ne se préoccupent pas de la fin, mais de l’origine du monde et de l’homme; ils s’intéressent moins au futur qu’au passé primordial; fascinés qu’ils sont par les problèmes de la genèse de l’homme et du monde, ils cherchent dans les origines l’explication du présent. Ils veulent percer le voile de la vérité originelle absolue et prétendent se rattacher à une sorte de passé intemporel. Pour eux, le temps est cyclique: cercle clos, éternel retour, perpétuel recommencement. D’où la doctrine communément admise de la réincarnation et du karma.
Ces groupes parlent le langage de la connaissance, de l’illumination, de la mystique, de la conscience, contrastant fort en cela avec les groupes de la première famille spirituelle qui tiennent le discours de la décision, du devoir. Ici, on ne parle pas de conversion, mais de transformation, de passage graduel vers la vérité ultime, de processus d’élévation vers un état supérieur de conscience cité à méditer, à entrer dans son temple L’adepte est intérieur, à se connaître lui-même, suivant l’axiome communément admis: «Se connaître, c’est connaître Dieu». C’est par l’accession à des états supérieurs de conscience que se réalise cette connaissance. Ces, expériences d’états de conscience supra-normale constituent le trait essentiel, la caractéristique fondamentale que l’on retrouve chez tous les groupes de cette famille spirituelle. Cela nous apparaît comme une note spécifique de ce qu’on appelle la «nouvelle conscience religieuse».
Cette famille spirituelle est de nature à attirer des gens de tendances libérale et réformiste, à exercer une force d’attraction chez les citadins de condition aisée et de culture plus sophistiquée. L’orientation socio-politique de ces groupes, se caractérise par une sorte de quiétisme. On ne prône généralement pas de programme socio-politique et on offre des légitimations au statu quo, bien que les adeptes puissent individuellement être engagés dans des processus de réforme ou dans des mouvements sociaux.
Cette seconde famille spirituelle est représentée, au Québec, par une large variété de groupes d’importance numérique fort différente. Mentionnons à titre d’exemple: l’Ordre rosicrucien A.M.O.R.C., la Société théosophique, la Société anthroposophique, la Société Atlantis, le Mouvement du Graal, la Société montréalaise d’ontologie, Dharmadatou, Centre Sri Chimnoy, le Mouvement pour la conscience de Krishna, Eckankar, Ora, les Ecouteurs du cosmos, Centre Anubis Schénuba, les Sciences cosmiques, la Mission de la lumière divine, la Scientologie, la Science chrétienne, la Science du Mental, etc.
Dans le sillage de ces groupes religieux et dans le prolongement de leur inspiration fondamentale, on trouve des groupes quasi religieux dont la similarité avec eux peut facilement donner le change. L’insistance sur les phénomènes de conscience provoque une convergence de la religion et de la psychothérapie. Plusieurs auteurs américains ont attiré l’attention, d’une part, sur l’orientation néo-mystique du discours pseudo-thérapeutique contemporain qui, selon l’expression de Peter Berger, «cherche le salut dans les soi-disant profondeurs de la conscience humaine elle-même ... «3 et, d’autre part, sur l’influence du mysticisme oriental sur les nouveaux développements en psychothérapie.4 Les perspectives néo-mystiques semblent offrir, aux yeux de plusieurs, un cadre plus efficace pour la psychothérapie des non-psychotiques que l’éthique catholique traditionnelle ou le modèle médical.
De plus, la pratique de la méditation et le développement de la conscience entraînent une dépollution de l’esprit, une purification qui favorise l’éclatement des obstacles à l’éveil spirituel. Cette idée plus ou moins explicite de pollution de l’esprit relie les nouveaux mouvements religieux de type mystique aux groupes de guérison et de santé globale (holistic health) et aux mouvements pour l’écologie et l’environnement. La redécouverte du caractère lumineux de la nature est un phénomène quasi religieux. La nature est devenue sacrée et la cité profane. Est sacré ce qui n’est pas souillé, profané par l’homme. La nature vierge est sacrée: elle offre des lieux de communion directe avec les racines de la réalité. La rage des écologistes contre les profanateurs de ces lieux est à l’égal de celle que provoquaient les violateurs du Temple de Jérusalem. Aussi certains groupes écologiques sont-ils quasi religieux, quasi mystiques: ils sont, sinon dans la traînée des nouveaux mouvements religieux mystiques, du moins en relation d’affinité avec eux. D’ailleurs, le thème du retour à la nature est un motif important dans les nouveaux mouvements spirituels.
Ces mouvements quasi religieux sont fort nombreux: groupes psychothérapeutiques, groupes d’exploration de la conscience, mouvements de guérison, groupes de santé intégrale, groupes écologistes et naturistes. A titre d’exemple, mentionnons Arica, Silva Mind Control, Atelier du contrôle mental, Obetex, Alliance Tournesol, Envol, Psychosynthèse (Assajoli), Est (Erhard Seminars Training), Esalen Institute, Instituts de Yoga, Centre Coresprit, Le Village Planétaire, etc. Les auteurs américains désignent ces groupes quasi religieux sous le nom de «Groupes de potentiel humain» (Human Potential Groups).
Typologie sociologique
On ne, peut délimiter un phénomène qui se manifeste sous des formes multiples et variées sans entrer dans une sorte de cercle vicieux qui consiste à partir de l’unité présumée des diverses formes permettant de les désigner par un terme commun, et à utiliser la signification de ce terme générique pour définir l’unité dans la multiplicité. Cela nous fournit un critère qui nous permet d’inclure un groupe et d’en exclure un autre. D’abord, l’évidence s’impose à nous d’une façon persuasive; ensuite, notre concept s’impose à l’évidence d’une façon normative. Jusque là, nous avons donc établi un certain découpage historique et géographique; nous pouvons et devons maintenant parvenir à un découpage typologique. De cette typologie qui est un recul abstractif par rapport au réel - nous pourrons revenir critiquement au découpage historique. Ce mouvement de va-et-vient qui part de l’unité présumée et sentie à l’unité postulée et, de là, revient critiquement à l’unité présumée, constitue un cercle herméneutique qui a ses pièges, mais dont nous ne pouvons nous dispenser si nous voulons parvenir à une bonne intelligence du phénomène actuel des nouveaux mouvements religieux.5 Il va sans dire que les limites de cet article ne nous permettent pas de parcourir tout ce périple herméneutique; nous ne pourrons pas revenir critiquement sur le découpage historique que nous avons esquissé plus haut.
Eglise - secte - mysticisme
Plusieurs typologies ont été proposées qui mettent, chacune, en relief un point de vue ou un aspect particulier des nouveaux groupes religieux. Les auteurs font volontiers appel à la typologie d’Ernst Troeltsch qui ramène les développements historiques du christianisme à trois grands types: l’Eglise, la secte, le mysticisme.6 L’Eglise, comme type socio-religieux - Troeltsch pense à l’Eglise catholique médiévale -, est un corps social conservateur qui accepte aliquo modo la cité séculière et essaie d’y trouver une place d’où elle pourra se faire entendre. Elle incorpore des éléments de l’éthique ambiante et devient ainsi partie intégrale de l’ordre social qu’elle détermine et stabilise. Dans son dësir d’universalité, elle ne peut éviter le compromis avec l’Etat et le système social établi. L’Eglise s’associe aux classes dirigeantes. Elle domine le monde et est dominée par lui. L’Eglise a tendance à devenir synonyme de société. Elle est une institution universelle, dotée d’une vérité absolue, d’un pouvoir sacerdotal et d’un système sacramentel de grâce. On naît dans l’Eglise.
La secte, comme type religieux, est une communauté à laquelle on se joint par une décision libre. On ne naît pas dans une secte, on y entre sur la base d’une conversion. La secte est un petit groupe de personnes qui aspirent à la perfection intérieure; elle renonce à dominer le monde; elle s’associe habituellement aux classes inférieures de la société. Elle est ou bien indifférente ou bien hostile à l’Etat et elle s’oppose au système ecclésiastique. Elle rejette tout compromis avec le monde qu’elle considère comme mauvais. La secte est une religion de laïcs, libre des puissances mondaines et capable aussi bien d’oublier le monde dans l’ascèse que de le combattre dans le radicalisme. La secte propose l’obéissance littérale aux Evangiles synoptiques dont elle retient les aspects radicaux. La secte préfère l’isolement au compromis.
Le mysticisme, comme type religieux, est un principe spirituel indépendant. Dans l’Eglise catholique, il s’est développé sous l’égide du pouvoir ecclésiastique ou en connexion avec les Ordres religieux. Dans le catholicisme, il ne tient pas par lui-même. Dans le protestantisme, le mysticisme s’est vu comme le produit de l’idée du sacerdoce des fidèles et fut capable de prendre un statut autonome. Le mysticisme développe un discours qui prend la place de la religion concrète, de ses dogmes et de ses mythes. Il se voit comme le coeur de toute religion et se présente comme un moyen d’union à Dieu. Il se sent indépendant de la religion populaire et a tendance à balayer les éléments d’historicité. Aussi, cette forme de religion devient-elle anhistorique, sans forme et individualiste. D’où l’idée d’une Eglise invisible connue de Dieu seul, qui guide les fidèles sans signes extérieurs ni moyens humains. Quand le mysticisme donne naissance à des groupes, ceux-ci forment des cercles intimes d’édification dont le but est de favoriser la réalisation personnelle. L’idéal éthique du mysticisme, c’est la liberté absolue de l’esprit, sans contrôle et sans discipline communautaire. Le mysticisme est une structure d’intériorité qui prétend se passer de forme institutionnelle, de système doctrinal et sacramentel. Il éprouve une complète indifférence ou impuissance face aux problèmes sociaux qu’il considère en dehors de la sphère religieuse.
Cette typologie, établie à partir de l’éthique sociale du christianisme, recoupe globalement - avec bien des nuances cependant - les deux grandes familles religieuses que nous avons identifiées sur le terrain. En appliquant cette typologie, on pourrait dire que les groupes de la première famille sont d’allure sectaire et ceux de la deuxième, de tendance mystique. La typologie troeltschéenne est toutefois d’usage limité, parce qu’elle se réfère à un contexte historique précis: l’histoire du christianisme, depuis ses débuts jusqu’en 1800. Le mysticisme de Troeltsch ne se réfère de fait qu’à la mystique chrétienne, plus précisément, à la mystique protestante. Ce mysticisme est davantage associé au protestantisme qu’au catholicisme puisqu’il est présenté comme le produit de principes du protestantisme: libre examen, individualisme, laïcisme, sacerdoce des fidèles. Le mysticisme chrétien à la Troeltsch ne semble pas susciter d’importants phénomènes aujourd’hui. Mais l’intuition du mysticisme et l’expérience qu’il propose ont été reprises, sous d autres formes, par beaucoup de nouveaux groupes religieux.
Depuis que le christianisme a pris le tournant de l’historicité -et parfois de l’historicisme - l’élément mystique n’y trouve plus son compte. Aussi, les personnes de tempérament mystique sont-elles tentées, sinon forcées, de chercher des formes d’expression en dehors de la tradition judéo-chrétienne. Troeltsch indique que le mystique prend pour acquis les formes objectives de la religion établie, même s’il n’est intéressé que par l’expérience intérieure. Il n’a pas besoin d’inventer ses formes d’expression. Mais à présent que le mysticisme occidental n’accepte plus les formes judéo-chrétiennes, il se doit de créer des structures parallèles qui l’encadrent dans l’espace et le perpétuent dans la durée.
Eglise - secte
Les catégories de Troeltsch ont été reprises, développées et raffinées par plusieurs auteurs, comme Joachim Wach, Leopold Von Weise, Howard Becker et, surtout, J. Milton Yinger. Dans ses livres Religion, Society and the Individual7 et Religion in the Struggle for Power,8 Yinger développe la typologie Eglise-secte en suivant le principe d’éloignement par rapport au christianisme universel. A l’extrême limite du type sectaire, se trouve le culte. Ce mot désigne l’expérience religieuse individuelle et non institutionnalisée de personnes unies par des émotions religieuses communes. Ces personnes forment des groupes instables: ils se désintègrent lorsque les membres meurent ou se transforment en systèmes de techniques. Si le culte parvient à un haut degré d’organisation et devient conscient de son identité, il forme une secte. Après quelques générations, la secte subit une transformation graduelle en s’ajustant aux conditions sociales et en adoptant certaines caractéristiques du modèle ecclésial. La secte devient alors une secte établie, qui se rapproche du type Eglise. Pour ce qui est du type Eglise, la spécification s’opère à partir de la qualité et de l’étendue réelle de son universalité. Il y a d’abord la Dénomination dont l’universalisme, quoique encore très limité, cherche à s’élargir. Vient ensuite l’Ecclésia dont l’universalisme beaucoup plus développé, reste encore limité par les frontières de race, de classe ou de géographie. A l’extrême, se trouve l’Eglise universelle qui réalise l’universalisme le plus achevé en accomplissant l’unité de la société - telle l’Eglise catholique du Moyen Age.
L’applicabilité de cette typologie à notre champ de recherche est limitée, d’une part, par le fait que ces catégories ont été développées, comme celles de Troeltsch, à l’intérieur de la tradition chrétienne - et en référence aux différents modèles d’incarnation historique de cette tradition et, d’autre part, par le fait que, dans ce contexte, les groupes ne peuvent être vus que comme rupture d’avec l’église établie; enfin, par le fait que cette typologie ne considère les groupes religieux que sous l’angle de leurs relations avec la cité séculière et l’ordre socio-économique. Les catégories de Yinger ne peuvent donc être que d’un intérêt limité pour les autres religions, même si les recherches de Max Weber ont montré de nombreux points de similitude entre les diverses religions au niveau de leur signification sociale.9
Malgré cette limitation, plusieurs auteurs proposent de se servir de la typologie de Yinger pour comprendre les nouveaux mouvements religieux.10 Ces auteurs se sont intéressés, en particulier, à corriger et à développer le concept yingérien de culte en le mettant en rapport avec les nouveaux phénomènes religieux. Appliquée à notre champ de recherche, cette typologie de Yinger, corrigée et adaptée, semble recouper assez bien nos deux grandes familles spirituelles. Les groupes de la première seraient des sectes ou des sectes établies; les groupes de la seconde, des cultes.
Mais on n’est guère plus avancé. Car le problème demeure de l’extrême variété des définitions du culte. D’aucuns le définissent en termes de «déviation»;11 d’autres en termes de «rupture» radicale avec la culture religieuse ambiante;12 d’autres en termes d’»expérience» extatique ou chamanique;13 d’autres, enfin, en termes d’autorité doctrinale extra-ecclésiale.14 D’autres, encore, mettent l’accent sur le caractère vaporeux des cultes, sur leur individualisme, leurs frontières ambiguës, leur lâcheté institutionnelle.
Devant toutes ces difficultés, certains auteurs ont cru bon d’oublier les catégories de Troeltsch et de Yinger, et de suggérer des typologies nouvelles élaborées sans référence à la tradition judéo-chrétienne. Mentionnons d’abord Barbara Hargrove qui offre une typologie des nouveaux groupes religieux en les disposant sur une ligne continue dont les bouts constituent les pôles opposés; à une extrémité, le modèle «intégratif» et à l’autre, le «transformatif».15
Modèle intégratif - modèle transformatif
La religion intégrative doit offrir une forme spécifique d p organisation, dont les frontières précises permettent de discriminer facilement le membre du non-membre. Son discours comporte un code d’attitudes et de comportements qui spécifie clairement le genre d’action ou d’engagement qu’on attend des adeptes. Les groupes religieux intégratifs forment des communautés facilement identifiables. Le développement et le maintien de ce code supposent un foyer organisationnel suffisamment fort. D’où la tendance à développer une structure hiérarchique bien organisée ou un leadership charismatique puissant - et possiblement les deux. La pointe séculière des groupes intégratifs sera le cadre socio-politique qui servira de point de référence aux membres, pour leur action dans la société.
Par contre, la religion transformative a tendance à plus d’ouverture doctrinale et éthique. Allergique aux normes, elle insiste sur la croissance et la conscience, sur l’expérience et la méditation. La «communauté» se définit davantage en termes de relations interpersonnelles qu’en termes de frontière. Les formes d’organisation et les délimitations seront vagues au point qu’il sera difficile de savoir qui est membre ou qui ne l’est pas. La pointe séculière du groupe transformatif sera les groupes de croissance et d’exploration de la conscience (Human potential groups) .
Cette typologie - qui insiste sur le modèle d’organisation et sur la forme d’appartenance - recoupe assez mal les deux grandes familles religieuses et spirituelles que nous avons identifiées. Une typologie établie à partir de la forme d’organisation et d’appartenance laisse dans l’ombre l’essentiel d’un fait religieux, en tant que religieux, et aboutit à un découpage du terrain qui comporte des différences significatives. Toutefois, sans oublier les nombreuses et importantes nuances qui s’imposent, on peut considérer la première famille religieuse comme étant plus volontiers de tendance intégrative, et les groupes de la seconde famille, comme étant le plus souvent d’allure transformative.
Groupes dualistes - groupes monistes
La typologie la plus suggestive, et peut-être la plus apte à éclairer notre propos, a été proposée par Thomas Robbins, Dick Anthony et James Richardson,16 et améliorée par Paul Schwartz.17 Ces auteurs voient, dans les nouveaux mouvements religieux, deux grands types de réponse à la rupture du système normatif socio-religieux traditionnel et à la crise des valeurs. La première réponse, qui réaffirme avec force l’absolutisme moral traditionnel avec sa hiérarchie des valeurs, s’incarne dans les groupes dualistes; la seconde réponse, qui professe le libéralisme et le subjectivisme moral, s’articule dans les groupes monistes. Le dualisme et le monisme dont on parle ne doivent pas être entendus dans un sens philosophique ou théologique; ils reçoivent ici une acception typiquement wébérienne. La distinction monisme-dualisme dérive d’une perspective éthique et se réfère à la vision du monde de Max Weber, dans laquelle l’autre monde est vu comme parallèle et séparé de ce monde. Ce dualisme éthique peut aller de pair aussi bien avec le monisme que le dualisme philosophiques, aussi bien avec le monothéisme théologique que le théisme philosophique ou l’athéisme humaniste - ceux-ci étant tous des avenues possibles dans la problématique engendrée par le dualisme éthique. Le dualisme éthique vise la disjonction conceptuelle entre l’insignifiance inhérente à toute action dans ce monde et la projection de sens dans un monde supérieur parfait, un royaume transcendant. Par contre, le monisme éthique ne cherche pas le sens d’un événement dans un monde séparé de la sphère de l’action humaine, mais en son sein. Comme sa contrepartie dualiste, il est généralement relié à une vision moniste du monde, mais distinct d’elle.
Les groupes dualistes articulent une protestation fervente contre les tendances permissives de la culture ambiante, par le biais d’un discours théocentrisme dualiste. Ils véhiculent une vision manichéenne du bien et du mal. D’un côté, le bien, Dieu, Jésus, le groupe; de l’autre, le mal, Satan, le monde, auquel les Eglises établies sont souvent assimilées. Ils voient dans diverses manifestations de la culture séculière l’oeuvre de l’Antéchrist et interprètent certains cataclysmes comme des signes avant-coureurs de la fin du monde. Les groupes dualistes gardent leur distance par rapport à la société et aux Eglises établies. Ils tendent au conservatisme social et politique.
Les groupes monistes projettent une image du monde où la multiplicité est résorbée dans l’unité fondamentale. La primauté est donnée à l’éveil et aux expériences de conscience. Ces mouvements, souvent associés aux notions d’immanence, conçoivent la divinité comme la profondeur de l’être personnel. Ils parlent le langage de la réincarnation et du karma, et axent leur démarche sur la connaissance.
Les groupes monistes se divisent en sous-catégories: les groupes «techniques» qui proposent des procédés répétitifs et standardisés, devant produire des expériences aptes à démontrer la validité des vues monistes; et les groupes «charismatiques» qui cherchent l’illumination moniste à travers l’émulation et la vénération de maîtres et de leaders qui sont considérés comme des exemples vivants, des personnifications des états supérieurs de conscience. Ce qui, aux yeux de Paul Schwartz, distingue encore plus fondamentalement les groupes «techniques» des groupes «charismatiques», c’est l’acceptation ou le rejet du rationaliste scientifique et technique comme voies de quête spirituelle. Les groupes «charismatiques» croient que le contact avec le sacré est incommensurable avec le rationaliste scientifique et la pratique de techniques, et, par conséquent, font volontiers appel au non-rationnel ou au trans-rationnel.18
Une seconde variable de la sub-typologie moniste implique la distinction entre les systèmes «à un niveau» et les systèmes «à deux niveaux». Les systèmes «à un niveau» promettent une illumination rapide et définitive (au cours d’une session, par exemple) sans faire appel à une éthique de dépassement et à une discipline personnelle. Ces groupes utilisent souvent le langage moniste pour rationaliser la poursuite d’objectifs hédonistes ou carriéristes. Par contre, les systèmes à «deux niveaux» représentent généralement une transplantation plus sérieuse et plus sophistiquée des schémas hindous ou bouddhistes, et tendent à définir la conscience cosmique moniste comme la caractéristique d’une évolution spirituelle avancée.
En interchangeant les variables «technique - charismatique» et les variables «un niveau - deux niveaux», on arrive à quatre sous-types monistes: les groupestechniques-à-un-niveau (EST, Méditation transcendantale), les groupes-charismatiques-à-un-niveau, les groupes techniques-à-deux-niveaux (Hate Krishna, Yoga Intégral, Dharmadatu) et les groupes-charismatiques-à-deux-niveaux (Mission de la lumière divine).
Cette typologie originale - peut-être un peu trop raffinée et sophistiquée - nous offre une grille sociologique apte à établir un découpage pertinent et utile du terrain religieux québécois. Appliquée à notre constat de départ, cette typologie nous permet de considérer à quelques exceptions près - les groupes de la première famille spirituelle et religieuse, comme des groupes dualistes, et ceux de la deuxième famille, comme des groupes monistes. Les groupes para-religieux entrent dans cette typologie comme des groupes quasi monistes.
Dévots - disciples - apprentis
A ces efforts de typologisation, il faut ajouter la typologie élaborée par Frederick Bird à partir de la qualité d’appartenance des membres à un groupe. On y trouve les «dévots», les «disciples» et les «apprentis».19 Les «dévots» cherchent à s’unir à l’Etre divin et à s’abandonner à Lui; grâce à cette relation, ils pensent devenir des personnes nouvelles. L’appartenance au groupe est exclusive et rejette radicalement toute dualité d’allégeance. Le groupe est un point de référence important et les activités communautaires jouent un rôle central pour le dévot qui supporte volontiers le groupe de son aide pécuniaire. On favorise le témoignage personnel à l’intérieur du groupe et à l’extérieur. Le but de ces témoignages est double: exprimer sa foi et gagner de nouveaux adeptes.
Alors que les dévots s’attachent à un maître spirituel ou à la vérité, les «disciples» s’attachent à une discipline. Les disciples cherchent l’expérience mystique et l’illumination de la conscience en mettant en oeuvre des techniques appropriées (méditation, yoga, régime alimentaire). Ils veulent parvenir à un état supérieur de conscience -ce qui exige un long et pénible effort. Ils poursuivent la réalisation d’états d’âme eustatiques plutôt qu’extatiques. Les réunions de groupe sont Importantes comme lieu d’apprentissage et de mise en oeuvre de la discipline appropriée. Les disciples se considèrent souvent moins comme membres du groupe que comme étudiants des techniques qu’il propose. Les disciples passent généralement à travers une série de rites d’initiation, dont chacun marque l’entrée dans une étape de transformation de la conscience.
Les «apprentis» recherchent, quant à eux, le pouvoir et le bien-être. Plutôt que de s’abandonner à l’Etre divin et de rechercher un état permanent de surconscience, les apprentis cherchent à domestiquer et utiliser, à des fins séculières immédiates, les esprits ‘ les forces secrètes et les pouvoirs cachés. Ils veulent devenir des hommes de pouvoir grâce à la maîtrise de techniques particulières qui leur donnent un ascendant sur leur entourage et leur permettent de dominer les autres. Ils s’assurent ainsi plus de succès dans les affaires, la carrière ou les relations sociales. Les réunions sont comme des cours, des classes où l’on apprend le maniement de certaines techniques. Un unique rite d’initiation plutôt formel sert à introduire l’apprenti à l’utilisation des techniques. On se qualifie pour cette initiation en payant des honoraires plus ou moins élevés.
Secte - gnose
Quant à nous, nous proposons de retenir la typologie de la secte pour désigner les groupes de la première famille religieuse et la typologie de la gnose pour qualifier ceux de la seconde. En effet, les groupes de la première famille offrent de nombreux points de similitude avec des groupes qui, au cours des siècles, sont apparus à la frange de l’Eglise établie et auxquels, à la suite de Troeltsch et de Yinger, nous appliquerons le nom de secte. Ce sont tous des groupes dont le substrat est judéo-chrétien et qui se réfèrent à la Bible comme à une instance d’interprétation privilégiée. Ils puisent leur symbolique, leur mythologie et leur imaginaire dans le réservoir chrétien traditionnel. Ils sont dans le sillage du Christianisme et gravitent autour de l’univers biblique. En tant que type chrétien, la secte est toujours, en régime chrétien, en contraste avec le type Eglise. Ces deux types ne se comprennent qu’en référence de l’un avec l’autre.
Par ailleurs, les groupes de la deuxième famille offrent un air de famille qui les apparente fort aux diverses manifestations de la gnose ancienne. Historiquement, le gnosticisme est un mouvement religieux qui, particulièrement vivace au IIe siècle de notre ère, a subsisté jusqu’au VIIe siècle. Considéré longtemps comme une hérésie chrétienne, le gnosticisme reçoit aujourd’hui une acception Plus large et plus positive. «Le gnosticisme, écrit le grand gnoséologue Charles Puesch, apparaît aujourd’hui désormais comme un phénomène général de l’histoire des religions, dont l’envergure dépasse infiniment les limites et le champ du christianisme antique et qui est, dans ses origines, extérieur, sinon intérieur, au christianisme.20
Comme phénomène religieux, la gnose est beaucoup plus large que le gnosticisme historique et elle peut revêtir toutes les formes: chrétienne, égyptienne, iranienne, hindoue, bouddhique, hébraïque, islamique, scientifique, spiritualiste, occulte. La gnose contemporaine se présente sous toutes ces formes. Quelles que soient ses modalités historiques, la gnose est, dans son essence, une voie de salut par la connaissance de soi, considéré comme fragment divin: elle est l’art de trouver le divin en soi-même, en développant les profondeurs secrètes et les puissances latentes de la conscience.21
Au terme de notre exploration typologique, nous pouvons regarder les divers groupes de la première famille religieuse comme des «sectes», des «sectes établies», des «mouvements intégratifs» ou des «groupes dualistes» et leurs membres sont des «dévots». Nous pouvons considérer ceux de la seconde famille comme des «mystiques», des «cultes», des «mouvements transformatifs», des «groupes monistes» ou des «gnoses». Quant aux groupes parareligieux, on peut les voir, dans le prolongement de ces typologies, comme des «quasi-mystiques», des «quasi-cultes», des «mouvements quasi transformatifs», des «groupes quasi monistes», des «quasi-gnoses»; et leurs adeptes sont des apprentis.»
Notes
1 ROBBINS, Thomas, ANTHONY, Dick, RICHARDSON, James, «Theory and Research on Today’s New Religions», dans Sociological Analysis, 39 (1978) 100-101; RICHARDSON, J., STEWART, M., SIMMONDS, R. B., Organized Miracles: A Sociological Study of a Jesus Movement Organization, New Brunswick, N.J., Transaction Books, 1978.
2 A titre d’exemple, mentionnons le Spiritual Counterfiet Project (SCP) de Berkeley. C’est une branche d’une organisation spirituelle appelée Berkeley Christian Coalition connue auparavant sous le nom de Christian World Liberation Front (CWLF). Ce groupe, formé de «Jesus People», vit le jour à la fin des années ‘60. Le SCP- qui fait partie de l’une des deux grandes familles spirituelles mentionnées plus haut - s’est donné comme objectif spécifique de combattre les nouveaux mouvements religieux appartenant à l’autre famille spirituelle. Ce groupe, bien organisé et très influent, publie un important mensuel ayant pour titre SCP Journal. Il s’est rendu célèbre, ne particulier, en gagnant sa bataille juridique contre les groupes de Maharichi Mahesh Yogi qui voulaient introduire la Méditaiton Transcendantale dans les écoles publiques.
3 BERGER, Peter, A Rumor of Angels, Garden City, N.Y., Double day and Co., 1970, p. 49. Il écrit encore: «Le terme néo-mysticisme convient bien àce qui se passe aujourd’hui sous le couvert de la psychothérapie» (ibid.).
3 BERGER, Peter, A Rumor of Angels, Garden City, N.Y., Double day and Co., 1970, p. 49. Il écrit encore: «Le terme néo-mysticisme convient bien àce qui se passe aujourd’hui sous le couvert de la psychothérapie» (ibid.).
4 Cf. BACK, Kurt, Beyond Words: The Story of Sensitivity Training and the Encounter Movement, Baltimore, Pinguin, 1972; Cox. Harvey, Turning East, N.Y., Simon and Schuster, 1977.
5 JONAS, Hans, «Delimitation of the Gnostic Phenomenon: Typical and flistorical», dans Le Origini dello gnosticismo, Colloque de Messine 1967, pp. 91-108.
6 TROELTSCH, Ernst, The Social Teaching of the Christian Church, 2 vois., N.Y., MacMillan, 1931.
7 YINGER, J. Milton, Religion, Society and the Individual, N.Y., The MacMillan Co., 1957, pp. 142-155.
8 YINGER, J. Milton, Religion in the Struggle for Power, Durham, Duke University Press, 1946,pp. 16-25.
9 WEIBER, Max, The Sociology of Religions, Boston, Beacon Press, 1964.
10 Par exemple, ELLWOOD, Robert, Religious and Spiritual groups in Modern America, Englewood Cliff, N.J., Prentice Hall, 1973; WALLis, Roy, «Ideology, Authority and the Development of Cultic Movements», dans Social Research, 41 (1974) 299-327; ROBERTSON, Roland, «On the Analysis of Mysticism: Pre-Weberian and Post-Weberian Perspectives», dans Sociological Analysis, 36 (1975) 241-266; CAMPBELL, Colin, «Clarifying the Cult», dans British Journal of Sociology, 28 (1977) 375-388; JACKSON, John, JOBBING, Ray, «Towards an Analysis of the Contemporary Cults», dans David Martin (éd.), Yearbook of Religion in Britain, vol. 1, London, SCM Press, 1968, pp. 94-105.
11 LOFLANO, John, Doomsday Cult, N.Y., Irvington, 1978.
12 NELSON, Geoffrey, «The Spiritualist Movement and the Need for a Redefinition of Cult», dans Journal for the Scientific Study of Religion, 8 (1969) 152-160; «The Concept of Cult», dans The Sociological Review, 16 (1968) 351-362.
13 ELLWOOD, R., op. cit.
14 WEET, W. W., American Culture and Religion, Dallas, Southern Methodist University Press, 1951.
15 HARGROVE, Barbara, «Integrative and Transformative Religions», dans Jacob Needlernan (éd.), «Understanding the New Religions», N.Y., The Seabury Press, 1978, pp. 262-269.
16 ROBBINS, T., ANTHONY, D., RiCHARDSON, J., art. cit., pp. 95-122.
17 SCHWARTZ, Paul, «The Crisis of Everyday Reality and The Rise of New Religions», texte manuscrit présenté au Colloque sur la religion et la Société tenu le 9 octobre 1979, au Graduate Theological Union, Berkeley.
18 SCHWARTZ, P., op. cit., pp. 30-31.
19 BIRD, Frederick, «Charisma and Ritual in New Religious Movements»; dans Jacob Needleman (éd.), Understanding The New Religions, N.Y., The Seabury Press, 1978, pp. 173-189.
20 PUESCH, Charles, En quête de la gnose, t. 1, Paris, Gallimard, 1978, p. 235.
21 J’aurai l’occasion de justifier davantage mon point de vue dans un ouvrage sur les nouveaux groupes religieux du Québec, qui doit paraître l’automne prochain.