Les budgets du ministère de la Santé ne disent pas la vérité
Malgré toutes les compressions budgétaires imposées dans le réseau de la santé et des services sociaux, la maladie coûte toujours un peu plus cher au trésor québécois: quelque 16 milliards de dollars en 1999. Tout indique que les dépenses s'accroîtront au cours des prochaines années. Comment guérir les maux de ce réseau?
Le dossier que livre Isabelle Paré dans son article, paru dans Le Devoir du 29 avril 2000, s’annonce bien étoffé et il apporte aussi son lot de questions sur un des fleurons de notre révolution tranquille. Son anamnèse des données du problème (Le Devoir, 2000-04-29) laisse pourtant perplexe et porte à mieux comprendre le diagnostic sommaire posé par Bernard Landry. Celui-ci déclarait il y a peu de temps que les problèmes du réseau de la santé relevaient autant de problèmes de gestion du système, qu’à ceux de son sous-financement. Ni le Ministère, ni les régies régionales, ni les établissements de ce lourd réseau ne peuvent établir autrement que par des estimations, le coût des interventions et des services rendus à la population! Le moins que l’on puisse dire, c’est que le principe de la gratuité semble omniprésent dans un système devenu incapable de répondre de ses actes.
«Aujourd'hui, le Québec se targue d'être la province qui dépense le moins pour ses services de santé, avec des dépenses publiques limitées à 1608 $ par habitant en 1999. Au Canada, les dépenses moyennes, incluant le Québec, sont de 1821$.»
«Les budgets du ministère de la Santé, comprimés par l'ère du déficit zéro, ne disent pas toute la vérité des dépenses réelles du gouvernement. Ce n'est pas 13,7 milliards, mais près de 16 milliards qu'a coûté l'an dernier le système de santé québécois, si l'on tient compte de toutes les sommes ajoutées pour colmater les crises, les déficits et les dépassements de programme.»
«Les Américains dépensent deux fois plus que nous pour la santé. C'est vrai qu'il y a chez eux une certaine surenchère liée aux poursuites judiciaires, mais l'écart est quand même du simple au double avec nous. Si on ne dépense pas plus au Québec, c'est qu'on est pauvre. Plus on est riche, plus on dépense pour la santé», tranche Claude E. Forget, économiste et ex-ministre des Affaires sociales au gouvernement Bourassa.
Si les sommes investies ou englouties dans le réseau québécois de la santé paraissent énormes, elles le sont plus encore quand on sait que la santé ne coûte rien au Québec: tout l'argent va pour la maladie. Si, depuis
un an, vous n'avez pas consulté un médecin, ne vous êtes pas présenté à l'urgence d'un centre hospitalier ou n'avez pas fait l'objet d'une hospitalisation, on pourrait croire que vous êtes en bonne santé. Malheureusement, le réseau de la santé n'y est sans doute pour rien.
Peut-être est-ce là la première raison qui explique l'écart qui nous distingue des autres provinces et d'autres pays qui consacrent une part plus importante de leur PIB aux soins de santé. Les chiffres et les statistiques ne signifient plus rien lorsqu'on les applique faussement. Au lieu de dire, comme le prétend l'ex-ministre Forget, que le Québec ne dépense pas plus parce qu'on est pauvre, il serait plus juste de dire que si on dépense autant au Québec en frais de santé, c'est que la pauvreté rend malade et que la maladie coûte de plus en plus cher.
Nom du patient: Réseau de la santé et des services sociaux.
Raison de la consultation: Patient refusé à l'urgence, faute de ressources.
Observation clinique: Épuisement général.
Pronostic: Très sombre.
Bilan de santé: Non disponible.
Plan de soins: Aucun remède connu. Référé en régions pour consultation. Expertise recherchée dans le secteur privé.
Recommandations: Suivre le patient de près. Revoir le patient avant l'Action de Grâces.