Crossing the Water (La traversée), écrit le 4 avril 1962, est un poème du recueil qui porte le même titre et qui été composé par Ted Hughes, le mari de Sylvia après le décès de celle-ci. Les images de la noirceur («black») à répétition obsèdent la poète, avec ici et là une allusion aux ombres, à la froidure, au silence et à l'absence du regard, Elles expriment une atmosphère de mort dont toute la nature semble enveloppée. «L'esprit de noirceur» n'est pas seulement dans la nature, il est aussi «en nous».
CROSSING THE WATER
Blach lake, black boat, two black, cut-paper people.
Where do the black trees go that drink here ?
Their shadows must cover Canada.
A little light is filtering from the water flowers.
Their leaves do not wish us to hurry:
They are round and flat and full of dark advice.
Cold worlds shake from the oar.
The spirit of blackness is in us, if is in the fishes.
A snag is lifting a valedictory, pale hand;
Stars open among the lilies.
Are you not blinded by such expressionless sirens ?
This is the silence of astounded souls.
LA TRAVERSÉE
Lac noir, barque noire, deux silhouettes de papier découpé, noires.
Jusqu'où s'étendent les arbres noirs qui s'abreuvent ici?
Leurs ombres doivent couvrir le Canada.
Une petite lumière filtre des fleurs aquatiques.
Leurs feuilles ne souhaitent pas que nous nous dépêchions:
Elles sont rondes et plates et pleines d'obscurs conseils.
Des mondes glacés tremblent sous la rame.
L'esprit de noirceur est en nous, il est dans les poissons.
Une souche lève en signe d'adieu une main blême;
Des étoiles s'ouvrent parmi les lys.
N'es-tu pas aveuglé par de telles sirènes sans regard?
C'est le silence des âmes interdites.
Source: Sylvia Plath, Arbres d'hiver précédé de La Traversée. Présentation de Sylvie Doizelet. Traductions de Françoise Morvan et Valérie Rouzeau. Édition bilingue, Paris, Gallimard, «Poésie», 1999, p. 38-39.
Blach lake, black boat, two black, cut-paper people.
Where do the black trees go that drink here ?
Their shadows must cover Canada.
A little light is filtering from the water flowers.
Their leaves do not wish us to hurry:
They are round and flat and full of dark advice.
Cold worlds shake from the oar.
The spirit of blackness is in us, if is in the fishes.
A snag is lifting a valedictory, pale hand;
Stars open among the lilies.
Are you not blinded by such expressionless sirens ?
This is the silence of astounded souls.
LA TRAVERSÉE
Lac noir, barque noire, deux silhouettes de papier découpé, noires.
Jusqu'où s'étendent les arbres noirs qui s'abreuvent ici?
Leurs ombres doivent couvrir le Canada.
Une petite lumière filtre des fleurs aquatiques.
Leurs feuilles ne souhaitent pas que nous nous dépêchions:
Elles sont rondes et plates et pleines d'obscurs conseils.
Des mondes glacés tremblent sous la rame.
L'esprit de noirceur est en nous, il est dans les poissons.
Une souche lève en signe d'adieu une main blême;
Des étoiles s'ouvrent parmi les lys.
N'es-tu pas aveuglé par de telles sirènes sans regard?
C'est le silence des âmes interdites.
Source: Sylvia Plath, Arbres d'hiver précédé de La Traversée. Présentation de Sylvie Doizelet. Traductions de Françoise Morvan et Valérie Rouzeau. Édition bilingue, Paris, Gallimard, «Poésie», 1999, p. 38-39.