« Les préalables à un débat sensé sur l'euthanasie, et la pertinence du document de la Commsision de réforme du droit sur l'euthanasie, considérant le projet de loi C-384» dans L'aide médicale à mourir, Frontières, automne 2011-printemps 2012, vol. 24, n° 1-2, p. 18-30.
Michel T. Giroux, LL.B, M.A, Ph D. est directeur de l'institut de consultation et de recherche en éthique et en droit (ICRED)
Résumé
La Commision de réforme du droit du Canada (CRD) a publié, en 1982, un document de travail intitulé Euthanasie, aide au suicide et interruption de traitement. En 2009, la députée Francine Lalonde a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-384 intitulé Loi modifiant le Code criminel (droit de mourir dignement). Ce projet de loi a été défait. Une période de près de trente ans sépare ces deux documents. Quelles sont les préoccupations que partagent ces documents? Le projet de loi envisage-t-il l'aide au suicide d'une manière qui diffère de celle du document de la CRD? L'examen du document de la CRD, du projet de loi C-384 et des travaux de la Chambre des communes fait ressortir des difficultés persistantes dans nos discussions publiques. Certaines suggestions s'imposent à propos du débat souhaitable dans une matière aussi contentieuse que l'euthanasie et l'aide au suicide.
Mots-clés
discussion publique - euthanasie- aide au suicide - interruption de traitement - droit de mourir dans la dignité - Commisssion de réforme du droit du Canada - projet de loi C-384.
Exergues
« Les discussions portant sur l'euthanasie et l'aide au suicide achoppent sur trois obstacles récurrents : l'imprécision du vocabulaire employé, l'évitement de la circonstance limite et l'absence de distinction entre la règle de droit et les situations particulières ».
« Au Canada, il existe une incertitude face à la loi, puisque les dispositions pertinentes du Code criminel sont d'application générale, qu'elles n'ont pas été conçues précisément pour le contexte médical. De plus, la rareté de la jurisprudence nous prive de connaître l'interprétation que leur donneraient les tribunaux .
« Les tenants de la légalisation de l'euthanasie soulignent ce qu'ils estiment être l'illogisme de la loi. Le patient détient le droit de refuser un traitement et celui de requérir son interruption, afin de ne pas prolonger son agonie. Le fondement de ce droit est que le patient est maître de sa personne. Si l'autonomie décisionnelle permet une omission ou une absence d'action, pourquoi me permet-elle pas de poser un acte positif? »
« Le document de la CRD et le projet de loi C-384 comportent une similitude fondamentale et des paradigmes différents. Le document de la CRD reconnaît le caractère sacré de la vie, mais cette reconnaissance doit trouver une limite dans une préoccupation pour la qualité de vie ».
« La similitude, la relation, la caractéristique commune qui unit le document de la CRD et le projet de loi -384 se trouve dans la conjonction entre l'exercice de l'autonomie personnelle et l'appréciation de la qualité de vie ».
« Il n'est pas déraisonnable de penser qu'une décision rendue à cinq juges conre quatre pourrait être différente aujourd'hui, par contre, nous ne pouvons pas affirmer avec certitude que les progrès des soins pallatifs et l'évolution des mentalités généraliseraient une décision différente si la question revenait devant la cour ».