Dans Violence et subjectivité, J.- C. Goddard met en évidence le «caractère meurtrier» (Hölderlin) ou le «facteur létal» (Lacan*) de la tragédie et du verbe tragique. L'auteur se demande quel est cet «effroyable originel» exprimé dans le cri qui, dans la tragédie, monte du choeur incarnant la foule ? Cet «effroyable» n'est nul autre que le crime collectif du meurtre de l'enfant*. (Chapitre premier «Dionysos enfant», p. 11-31)
Ce Dionysos est pour Nietzsche* «l'enfant mis en pièces par les Titans et vénéré dans cet état sous le nom de Zagreus». Voilà la perte irréparable, l'effroyable réalité de la foule, qui est l'unique réalité: le meurtre et la dévoration festive de l'enfant. C'est là aussi l'involontaire absolu: le crime imputable à tous, le crime pour ainsi dire générique. En 1960, dans son Séminaire sur L'éthique de la psychanalyse, Lacan relevait qu'Antigone*, dans toute la pièce de Sophocle, est appelée «la gosse», et que lorsque le choeur fait éclater l'hymne à Dionysos, lors de son avant-dernière entrée , si les auditeurs croient que c'est un hymne à la libération et que «tout va s'arranger», c'est qu'ils ignorent «ce que représente Dionysos et son cortège farouche», c'est-à-dire la foule dionysiaque meurtrière. (op. cit., p. 22)
[Le meurtre de l'enfant] se ritualise dans la belle image d'une «victime terriblement volontaire», c'est-à-dire terriblement crue, d'un martyr* «sans pitié ni crainte» d'une victime qui opère d'elle-même et en elle-même la transfiguration de la cruauté originelle... (op. cit., p. 26)
[L'auteur met en évidence] le caractère proprement «athlétique» de la station [du héros tragique, en l'occurrence Antigone] qui se tient ainsi au centre, ou au milieu de la foule, à la place infiniment séparé du sacré [...] Car le propre de la victime* sacrificielle est, précisément parce qu'elle est isolée et absolument dés-unie, de n'être plus personne; le neutre (le neutre de l'enfant). Cet «athlétisme» est celui de la mort tragique en quoi consiste cette station - puisque le sacré est présence du dieu dans la figure de la mort. Non pas de la mort que se donne le héros tragique, mais de la mort en laquelle il se trouve déjà vivant [...]; un mort qui est mort parmi les vivants, vie parmi les morts.
[Le meurtre de l'enfant] se ritualise dans la belle image d'une «victime terriblement volontaire», c'est-à-dire terriblement crue, d'un martyr* «sans pitié ni crainte» d'une victime qui opère d'elle-même et en elle-même la transfiguration de la cruauté originelle... (op. cit., p. 26)
[L'auteur met en évidence] le caractère proprement «athlétique» de la station [du héros tragique, en l'occurrence Antigone] qui se tient ainsi au centre, ou au milieu de la foule, à la place infiniment séparé du sacré [...] Car le propre de la victime* sacrificielle est, précisément parce qu'elle est isolée et absolument dés-unie, de n'être plus personne; le neutre (le neutre de l'enfant). Cet «athlétisme» est celui de la mort tragique en quoi consiste cette station - puisque le sacré est présence du dieu dans la figure de la mort. Non pas de la mort que se donne le héros tragique, mais de la mort en laquelle il se trouve déjà vivant [...]; un mort qui est mort parmi les vivants, vie parmi les morts.