Tipu Ake ki te Ora

Andrée Mathieu

Tipu Ake ki te Ora, un modèle de gestion pour les organisations innovatrices

Peter Goldsbury a fréquenté l’école primaire de Te Whaiti. Ses parents y étaient responsables d’un pensionnat qui dispensait un enseignement secondaire, axé sur l’agriculture et la menuiserie, aux jeunes garçons maoris de la Nouvelle-Zélande. Il a quitté Te Whaiti pour poursuivre sa carrière en génie, gestion de projets, administration des affaires, conseil technique et enseignement. En 1999, dans le cadre d’un atelier de gestion de projets qu’il animait à l’Université de technologie de Auckland (AUT), il a accompagné un groupe d’éducateurs indonésiens dans son village natal, où il a renoué avec d’anciens amis. Seule une grande ouverture d’esprit et de cœur pouvait lui permettre de remarquer que le processus de transformation de son école dépassait les limites des sciences conventionnelles de l’organisation, dont l’approche est terriblement linéaire. Quand je l’ai rencontré le printemps dernier, Peter débordait d’enthousiasme à ce sujet : «En un an ma vieille école primaire et la communauté de Te Whaiti Nui-a-Toi m’ont appris plus de choses sur le fonctionnement, la transformation des organisations et la mise en pratique des projets que tout ce que j’ai appris en plus de trente ans de carrière! Pendant toutes ces années, j’ai exploré les pratiques des entreprises occidentales et plusieurs modèles comme ceux de Maslow, Gantt, Juran, Demming, The Project Management Institute, Drucker, Covey, la théorie du chaos et de la complexité et combien d’autres... Mais ce que j’ai trouvé à Te Whaiti dépasse largement tout ce que j’avais pu observer jusque-là! Je me suis rebranché sur la sagesse autochtone et j’ai compris qu’elle me donnait un nouveau cadre de compréhension de mes trente années d’expérience comme ingénieur et gestionnaire». 

Mais le chemin vers la sagesse collective est loin d’être rectiligne, comme Peter l’a appris à ses dépens: «C’est un grand privilège d’avoir été choisi pour partager cette immense sagesse. Ce travail est vite devenu une passion gratifiante, mais il n’a pas été facile pour moi, un pakeha (néo-zélandais d’origine européenne) de traduire, ne serait-ce qu’une fraction de leur pensée holistique et organique, dans un langage théorique compréhensible par des organisations qui opèrent dans un monde linéaire préoccupé par les faits, les individus et les dollars! La communauté de Te Whaiti fonctionne sur un plan organisationnel très différent. Tipu Ake s’inspire des interconnections entre les gens, la nature et la spiritualité, bien qu’il renferme aussi un grand nombre de principes modernes sur le leadership, le travail en équipe, l’innovation, la flexibilité et le changement». La plupart des modèles contemporains empruntent la voie d’une progression linéaire en direction d’un objectif. Tipu Ake est un modèle cyclique qui se concentre sur les comportements plutôt que sur les processus. Il comprend sept niveaux inter reliés, de telle sorte qu’on peut circuler d’un niveau à l’autre ou agir à tous les niveaux simultanément. Les gens de Te Whaiti expliquent leur modèle en utilisant la métaphore d’un totara(arbre) géant croissant à partir d’une modeste petite graine.

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