L'Encyclopédie sur la mort


Immigration et santé au Canada

Le phénomène de l'immigration peut avoir , chez certaines personnes plus exposées à la fragilité (personnes âgées, femmes, réfugiés, ayant souffert de la guerre ou de la famine) des effets négatifs comme la dépression et le risque suicidaire, résultant d'un stress excessif. La présente étude donne des multiples données importantes susceptibles de nous éclairer sur l'expérience traumatisante de l'immigration. Cependant, il ne faudrait pas généraliser ces conséquences néfastes ni les associer à tous les immigrants. Bien au contraire, ce sont presque exclusivement des sous-groupes fragilisés par des traumas précédant leur arrivée au pays d'adoption qui sont concernés. On peut regretter que le document associe trop facilement la dépression et le suicide à la maladie mentale. Aujourd'hui, on a tendance à faire d'un trop grand nombre de la population (natifs, citoyens, résidents, immigrants et réfugiés) des «malades qui souvent s'ignorent » fort légitimement. Un cinquième de la population serait ainsi «malade». Dans notre société, qui ose se dire encore bien portants?
Santé mentale – Introduction
L'arrivée et le réétablissement dans un nouveau pays occasionnent souvent une période de réajustement et de stress important (Groupe canadien, 1988; Conseil canadien de la santé multiculturelle, 1989) Certaines théories soulignent les effets négatifs et stressants du processus sur la santé… –p. 34

Recherches canadiennes

En 1986, le Groupe canadien chargé d'étudier les problèmes de santé mentale des immigrants et des réfugiés a passé en revue les données issues de plus de 1 000 travaux de recherches au niveau national et international. Environ la moitié de ces études font état de taux plus élevés de détresse chez les immigrants que chez les résidents natifs… –p. 35

Le Projet de réinstallation des réfugiés (PRR) est une étude longitudinale de 10 ans portant sur le réétablissement et la santé mentale des réfugiés de l’Asie du Sud-Est au Canada…Au moment de la première enquête, les taux de dépression chez les réfugiés [de cette région étaient équivalents à ceux…de la culture…majoritaire. Toutefois, les réfugiés qui vivaient au Canada depuis 10 à 12 mois au moment de l'enquête ont obtenu des résultats supérieurs aux autres sur l'échelle de dépression*, ce qui indiquerait que certaines phases du réétablissement sont caractérisées par un risque accru pour la santé mentale. –p. 35

La migration pourrait être plus néfaste pour les femmes* que pour les hommes (Kliewer, 1991)…Les femmes immigrantes de première génération présentent des taux de mortalité par suicide supérieurs à ceux de leurs homologues canadiennes de naissance. –p. 36

Déterminants de la santé mentale

L'immigration [est] un processus commençant par une période initiale de joie et de soulagement, suivie d'une période caractérisée par les regrets, des sentiments de perte et des difficultés d'adaptation et se terminant finalement par un stade d'acceptation et de réorganisation (Adler*, 1975; Pedersen, 1995; Smart et Smart, 1995). ..Le risque de maladie mentale*…augmente après une période initiale d'« incubation » (Beiser et Hyman, 1997). –p. 36

Les impondérables entourant l'expérience du réétablissement…déterminent les risques d'apparition d'un problème de santé mentale. Ces impondérables, d'après le modèle de processus de stress adapté à l'expérience des immigrants (Beiser, 1990), comprennent les atouts personnels, les stress antérieurs et postérieurs à la migration et la disponibilité d'un soutien familial* et communautaire. Les stress pré-migration, tels que les expériences de catastrophe, l'internement dans un camp de réfugiés, et les stress post-migration tels que la pauvreté, le chômage et la séparation familiale, éléments fréquents du processus de réétablissement des réfugiés, mettent en péril la santé mentale. –pp. 36-37

L'impact des facteurs post-migration tels le chômage* se fait surtout ressentir 10 à 12 ans après l'arrivée…Les réfugiés de l'Asie du Sud-Est…qui ne travaillaient pas faisaient…partie d'un [sous-]groupe caractérisé de manière chronique par…la pauvreté et la dépression…Le chômage devient davantage une menace importante pour le bien-être mental avec le temps (Westermeyer, 1989; Aycan et Berry, 1996). –pp. 37-38

Réfugiés

Les réfugiés ayant vécu des événements traumatisants comme la guerre*, la famine et la migration forcée courent un risque* accru de problèmes de santé mentale, notamment de dépression durable, de SSPT et de suicide (Lin, 1986; Stein, 1986; McSpadden, 1987; Boehnlein et Kinzie, 1995). Le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est un problème de santé mentale qui peut être présent chez les réfugiés. Le SSPT est un trouble anxieux caractérisé par des symptômes particuliers, qui apparaissent si l'individu a été directement et personnellement exposé à un événement faisant intervenir la mort ou une menace de mort ou une lésion grave, s'il a été témoin de cet événement ou s'il a appris qu'un tel événement a été vécu par un membre de sa famille ou un proche. Les symptômes caractéristiques sont la reviviscence de l'événement traumatique (pensées et cauchemars répétitifs), l'évitement des stimuli associés à l'événement et un émoussement de la réactivité générale (p. ex., baisse d'intérêt envers les personnes et les activités). La prévalence du SSPT pourrait atteindre 90 % chez les groupes fortement traumatisés, tels les Cambodgiens et le syndrome peut persister pendant de nombreuses années après la migration (Kinzie et coll., 1990; Hauff et Vaglum, 1994; Sack et coll., 1994). –pp. 40-41

Femmes

D'après les observations du Groupe canadien (1988), les femmes immigrantes et réfugiées ont davantage de besoins en santé mentale que leurs homologues masculins… –p. 41

Franks et Faux (1990) rapportent un taux élevé de dépression chez les femmes appartenant à quatre groupes ethniques (originaires de Chine, du Vietnam, du Portugal et d'Amérique latine). –p. 41

Une recension des publications sur la grossesse et la santé mentale fait état de taux élevés de dépression post-partum chez les femmes immigrantes (Vissandjee et coll., à paraître).–p. 41

D'après une recension récente des recherches canadiennes sur la santé des femmes immigrantes et réfugiées, les symptômes psychiatriques attribuables aux traumatismes et aux traumatismes multiples tels que le viol constituent un problème de santé mentale important chez de nombreuses femmes réfugiées (Mulvihill et Mailloux, 2000). –p. 41

Bon nombre des déterminants du bien-être mental des femmes immigrantes canadiennes sont de nature systémique et comprennent notamment les obstacles culturels, linguistiques, économiques et informationnels à l'accès aux soins, le caractère inadéquat du soutien social et la violence (Sodhi, 1995; Bottorff et coll., 1998; George, 1998; Hyman et coll., 2000c; Mulvihill et Mailloux, 2000). –p. 41

Vissandjee et coll. se sont intéressés au rôle des fardeaux multiples et du stress. Cependant, les effets des déterminants tels que la discrimination, les tensions attribuables au rôle traditionnellement imparti aux femmes, la marginalisation dans l'emploi et la situation défavorable en matière d'éducation restent des sujets pratiquement inexplorés (Oxman-Martinez et coll., 2000) –p. 41

Il faudrait s'intéresser davantage à la manière dont les facteurs d'isolement tels que l'organisation du quartier, le climat, les tâches domestiques et le manque de possibilités d'emploi influent sur la santé mentale des femmes immigrantes (Dossa,1999; Tastsoglou et Miedema, 2000). –p. 41

Sommaire

Certains sous-groupes, notamment les réfugiés, les personnes âgées* et les femmes, courent un risque accru de problèmes de santé mentale après la migration. –p. 42
Date de création:-1-11-30 | Date de modification:-1-11-30

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