L'Encyclopédie sur la mort


Francis Bacon, peintre

Gérald Brault

Gérald Brault consacre un poème à Francis Bacon, peintre irlandais et descendant collatéral du philosophe Sir Francis Bacon,né le 28 octobre 1909 à Dublin et décédé le 28 avril 1992 à Madrid. Dans ce poème, traversé par le thème de la vie et de la mort, l'auteur fait allusion à plusieurs oeuvres du peintre, notamment:

1944 : Trois études de figures au pied d'une crucifixion
1953 : Étude d'après le portrait du pape Innocent X par Velázquez
1957 : Étude pour un portrait de Van Gogh
1971 : Triptyque en hommage à George Dyer
1973 : Autoportrait et Portrait de Lucien Freud.

«Peindre le cri plutôt que l'horreur», déclarait Francis Bacon à David Sylvester en 1976. Effectivement, le motif du cri traverse l’œuvre de Francis Bacon. ses tryptiques et autoportraits, mais aussi le tableau d'un pape hurlant, une variation du « Portrait d’Innocent X » par Diego Velasquez (1599 - 1660).

«Le cri de la chair» est le titre d’une exposition consacrée à l'oeuvre de Bacon au Centre Pompidou à Paris. Or c'est aussi par un cri à tue-tête que Gérald Brault introduit son poème. Notons également que plusieurs esquisses du tableau d’Innocent X de Bacon figurent dans l'oeuvre de Philippe Sollers, connue sous le titre Les passions de Francis Bacon, Paris, Gallimard, «Monographies», 2001.
FRANCIS BACON
Brisé à jamais le portrait torturé crie à tue-tête
Cri étouffé dans la tête aux chairs rabattues
La bouche ouverte sur la vie sur la mort
Sans parole annonce la souffrance

Bacon sorcier des morsures sans tendresse
Tu mets fin à cette peinture pittoresque
L'image s'écoule comme fluide du corps
Il n'est plus utile de tracer le portrait futile

Francis bacon



Arrêt de mort du tableau pompier
Qui brûle aux enfers dantesques
Tes arabesques d'enfermement têtu
Ont cependant épargné Van Gogh
Le peintre martyr retiré et sans iris
Bleuit dans la nuit cézannienne
Il hanta à jamais les routes bannies
Qui ne mènent qu'au ciel bleu




Tes crucifiés regardent INNOCENT X
Bouche ouverte sur le monde pourri
Où meurt ton ami et modèle George Dyer
Célébré par un triptyque de belles cages libres

Nul oiseau à la Miro traverse ton plateau
Où les acteurs prisonniers se contorsionnent
Douleur de ne pas pouvoir parler haut
Tout ce silence de l'espace impossible

En août 1972 la vie s'écoule d'un triptyque
Pour retourner à la rivière souterraine
Source du corps animé par l'eau
Alchimiste sans pierre philosophale
Tu sais transmuer l'art en réel
Et sans personnage tu habites la scène

Tu fais de nous sable herbe
Poussière d'eau limpide rose bleue
Nouvel animiste de la caverne platonique
Ta beauté en creux se fait chair

Tremblant sur l'irréel monastique
Tu portes en relief le masque mortuaire
En guise de tête déformée par l'étude
Songeur des flaques d'être
Tu traces un espace linéaire
Où le magicien engouffre les accessoires

Théâtre aux décors semblables et inachevés
Les trapèzes supportent les ombres
De toutes les personnes de l'au-delà
Devenues les âmes mortes gogoliennes

Songeur je reprends le dernier mot rimbaldien
«j'irai sous terre et tu marcheras dans le soleil »
Lancé à sa soeur avant de quitter
Ton tableau sans ciel goûte l'enfer
Rien de fabuleux ni d'idéal
Sauf Lucien Freud dans sa balançoire
Oscillant sur fond d'ocre léger
Qui te fait signe de sa main disparue
Date de création:-1-11-30 | Date de modification:-1-11-30

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