Dans l'acte amoureux, on retrouve le jeu de la vie et de la mort, deux contraires qui s'appellent. Ainsi en est-il de chaque expérience humaine qu'elle soit joyeuse ou douloureuse. La face lumineuse et la face ténébreuse de l'existence s'interposent.
L'acte d'amour
L'extase brève et fugitive de l'acte amoureux, sa flambée passagère dans l'ardeur du désir, son extinction rapide, c'était pour lui le fond de toute expérience humaine, c'était devenu le symbole de toutes les joies et de toutes les souffrances de la vie. Il pouvait s'abandonner à cette détresse, à ce frisson en présence des choses qui passent avec la même passion qu'à l'amour; et cette mélancolie, elle aussi, était de l'amour, elle aussi était de la volupté. Tout comme la jouissance d'amour, à l'instant le plus délicieux de son épanouissement suprême, est sûre de décroître l'instant d'après et de disparaître dans la mort, de même la solitude de l'âme et l'abandon à la mélancolie* sont sûrs de faire place soudain au désir, à une nouvelle adhésion à la vie et à sa face lumineuse. La mort et la volupté ne font qu'un. La Mère de la vie; on pouvait dire aussi que c'était la tombe, la putréfaction. (Narcisse et Goldmund, Traduit de l'allemand par Fernand Delmas, Calmann-Lévy, « Le Livre de Poche », 1948, p. 139)
Hermann Hesse a des rapports fraternels avec la mort. Appartenance et libération sont les maîtres sentiments évoqués par le poème adressé à sa soeur aimée qui portant se drape de froideur et lui apparaît en étrangère lointaine. Dans son désir d'éternité ce poète s'abandonne librement à la mort.
Mort, ma soeur
Tu viendras me chercher, moi aussi,
Je ne serai pas oublié
La fin n'est que souffrances infinies
Puis la chaîne est brisée.
Tu es encore lointaine, étrangère
Oh, mort, ma très chère soeur,
Tu planes sur ma misère
Tel un astre de froideur.
Mais un jour, tu te rapprocheras
Emplie d'un désir sans fin
Viens près de moi, aimée, je suis là,
Prends-moi car je t'appartiens.
(Hermann Hesse, Éloge de la vieillesse, Calmann-Lévy, 2000, p. 177)
La vie est un cheminement par étapes et une succession de métamorphoses. Vivre, c'est rester éveillé à la nouveauté
Nous ne devons pas nous efforcer de retenir le passé
Nous ne devons pas nous efforcer de retenir le passé ou de le reproduire. Il faut être capable de se métamorphoser, de vivre la nouveauté en y mettant toutes nos forces. Le sentiment de tristesse qui naît de l'attachement à ce qui est perdu n'est pas bon et ne correspond pas au véritable sens de la vie.
(Hermann Hesse, Éloge de la vieillesse, o.c., p. 87)
Vivre
Vivre devrait ressembler selon moi à un acte de transcendance, à une progression étape par étape. Il faut traverser les espaces les uns après les autres en les laissant chacun derrière soi comme le musicien qui écrit, joue, achève puis abandonne les uns après les autres les thèmes et les tempi, sans jamais de lassitude, de repos, toujours vif, pleinement présent. J'ai découvert l'existence de ces étapes, de ces espaces en analysant l'expérience de l'éveil à la nouveauté. J'ai noté par exemple que les instants qui marquent la conclusion d'une période de notre vie ont une tonalité un peu terne, semblent porter en eux le désir de la fin qui incite à passer à autre chose, à s'éveiller, à prendre un nouveau départ.
(Hermann Hesse, Éloge de la vieillesse, o.c., p. 89)
L'extase brève et fugitive de l'acte amoureux, sa flambée passagère dans l'ardeur du désir, son extinction rapide, c'était pour lui le fond de toute expérience humaine, c'était devenu le symbole de toutes les joies et de toutes les souffrances de la vie. Il pouvait s'abandonner à cette détresse, à ce frisson en présence des choses qui passent avec la même passion qu'à l'amour; et cette mélancolie, elle aussi, était de l'amour, elle aussi était de la volupté. Tout comme la jouissance d'amour, à l'instant le plus délicieux de son épanouissement suprême, est sûre de décroître l'instant d'après et de disparaître dans la mort, de même la solitude de l'âme et l'abandon à la mélancolie* sont sûrs de faire place soudain au désir, à une nouvelle adhésion à la vie et à sa face lumineuse. La mort et la volupté ne font qu'un. La Mère de la vie; on pouvait dire aussi que c'était la tombe, la putréfaction. (Narcisse et Goldmund, Traduit de l'allemand par Fernand Delmas, Calmann-Lévy, « Le Livre de Poche », 1948, p. 139)
Hermann Hesse a des rapports fraternels avec la mort. Appartenance et libération sont les maîtres sentiments évoqués par le poème adressé à sa soeur aimée qui portant se drape de froideur et lui apparaît en étrangère lointaine. Dans son désir d'éternité ce poète s'abandonne librement à la mort.
Mort, ma soeur
Tu viendras me chercher, moi aussi,
Je ne serai pas oublié
La fin n'est que souffrances infinies
Puis la chaîne est brisée.
Tu es encore lointaine, étrangère
Oh, mort, ma très chère soeur,
Tu planes sur ma misère
Tel un astre de froideur.
Mais un jour, tu te rapprocheras
Emplie d'un désir sans fin
Viens près de moi, aimée, je suis là,
Prends-moi car je t'appartiens.
(Hermann Hesse, Éloge de la vieillesse, Calmann-Lévy, 2000, p. 177)
La vie est un cheminement par étapes et une succession de métamorphoses. Vivre, c'est rester éveillé à la nouveauté
Nous ne devons pas nous efforcer de retenir le passé
Nous ne devons pas nous efforcer de retenir le passé ou de le reproduire. Il faut être capable de se métamorphoser, de vivre la nouveauté en y mettant toutes nos forces. Le sentiment de tristesse qui naît de l'attachement à ce qui est perdu n'est pas bon et ne correspond pas au véritable sens de la vie.
(Hermann Hesse, Éloge de la vieillesse, o.c., p. 87)
Vivre
Vivre devrait ressembler selon moi à un acte de transcendance, à une progression étape par étape. Il faut traverser les espaces les uns après les autres en les laissant chacun derrière soi comme le musicien qui écrit, joue, achève puis abandonne les uns après les autres les thèmes et les tempi, sans jamais de lassitude, de repos, toujours vif, pleinement présent. J'ai découvert l'existence de ces étapes, de ces espaces en analysant l'expérience de l'éveil à la nouveauté. J'ai noté par exemple que les instants qui marquent la conclusion d'une période de notre vie ont une tonalité un peu terne, semblent porter en eux le désir de la fin qui incite à passer à autre chose, à s'éveiller, à prendre un nouveau départ.
(Hermann Hesse, Éloge de la vieillesse, o.c., p. 89)