«Dans une chambre ou au Rwanda, dans un lit ou en Somalie, dans un champ ou en Éthiopie, "la vie n'en finit pas de mourir." Un coeur en guerre, comme un pays en guerre, ne laisse rien à l'avenir. [...] L'espoir n'est jamais naïf comme on voit, ni jamais annulé. Même froid, l'été triomphe de l'hiver. Le pire des automnes contient le germe du printemps. "Enfin, écrit-elle en ce sens, advient le temps!"» (Bruno Roy, «Préface», À corps et à cris, p. 12-13)
Rwanda
La télé déroule ses nouvelles
Sa pub d'abondance voisine indécente
Ce paysage rwandais jonché de
cadavres
Fleuves d'embâcles humains
Rues pavées de morts
Charniers d'églises
Où l'odeur putride se substitue à
l'encens.
La mort en sursis rôde à chaque
carrefour
Grondements de mortiers et d'artillerie
L'air respire la mort à pleins poumons
L'lnterhamwé joue à tuer
S'éclipsent les villes
Châteaux de cartes
La machette mutile
la vie à peine éclose
Bascule dans un néant d'enfer
La télé consomme le meurtre sans
broncher
Vite anesthésié par la publicité.
Somalie
Aucun cri
Aucune plainte
Corps en détresse agglutinés
Sable sur sable
Soleil de plomb
Yeux hagards
Aucun cri
Aucune plainte
Mains décharnées
Lèvres pendantes en attente
La mort à fleur de peau
Aucun cri
Aucune plainte
Le temps s'épargne
Etire la souffrance
Mine les corps
Grandit le silence
Aucun cri
Aucune plainte.
Ethiopie
Au lointain les cargaisons d'un ailleurs
Ne seront jamais d'ici
Que sable chaud collé à la peau
Ainsi s'étiole l'enfant noir
Désert de la faim
En rendez-vous de mort vive.
Souvenance automnale
Irrémédiable
L'été glisse
Dans la morsure du temps
Animées
D'un dernier soubresaut
Les feuilles s'affolent
Sur la chaussée transie
Les fleurs
Désertent
S'étiolent les gens
Le sol crispe leurs pas
Le temps s'encapuchonne
A pas feutrés
La mort s'acharne
L'été
Fuit.
Deux poèmes inédits:
Bagdad
Dans la ville fantôme de Bagdad
où le néant tient lieu de toit
livide un enfant
agonise auprès
d’une mère éventrée
tandis que
sans vergogne
d’autres fusils
clouent
d’autres destins
barbelée du désespoir
je suis cette lune éteinte
épiée au carrefour
des obus de la haine
au seuil de la paix
criblée d’attentes vaines
je suis cette étoile
j’attends
et j’espère
dans ce rai de lumière
Darfour
chair collée à l’os
les yeux de la mort
hurlent en silence
dans ce néant
aucune main tendue
à la désespérance
des seins taris
seules les mouches
partagent ce funeste voyage
désert dans ce désert
les mots s’essoufflent
en spectres
de l’oubli
où l’Amérique
assoiffée d’or noir
reste sourde
à l’appel
du noir silence
pétrissant ces gémissements
La télé déroule ses nouvelles
Sa pub d'abondance voisine indécente
Ce paysage rwandais jonché de
cadavres
Fleuves d'embâcles humains
Rues pavées de morts
Charniers d'églises
Où l'odeur putride se substitue à
l'encens.
La mort en sursis rôde à chaque
carrefour
Grondements de mortiers et d'artillerie
L'air respire la mort à pleins poumons
L'lnterhamwé joue à tuer
S'éclipsent les villes
Châteaux de cartes
La machette mutile
la vie à peine éclose
Bascule dans un néant d'enfer
La télé consomme le meurtre sans
broncher
Vite anesthésié par la publicité.
Somalie
Aucun cri
Aucune plainte
Corps en détresse agglutinés
Sable sur sable
Soleil de plomb
Yeux hagards
Aucun cri
Aucune plainte
Mains décharnées
Lèvres pendantes en attente
La mort à fleur de peau
Aucun cri
Aucune plainte
Le temps s'épargne
Etire la souffrance
Mine les corps
Grandit le silence
Aucun cri
Aucune plainte.
Ethiopie
Au lointain les cargaisons d'un ailleurs
Ne seront jamais d'ici
Que sable chaud collé à la peau
Ainsi s'étiole l'enfant noir
Désert de la faim
En rendez-vous de mort vive.
Souvenance automnale
Irrémédiable
L'été glisse
Dans la morsure du temps
Animées
D'un dernier soubresaut
Les feuilles s'affolent
Sur la chaussée transie
Les fleurs
Désertent
S'étiolent les gens
Le sol crispe leurs pas
Le temps s'encapuchonne
A pas feutrés
La mort s'acharne
L'été
Fuit.
Deux poèmes inédits:
Bagdad
Dans la ville fantôme de Bagdad
où le néant tient lieu de toit
livide un enfant
agonise auprès
d’une mère éventrée
tandis que
sans vergogne
d’autres fusils
clouent
d’autres destins
barbelée du désespoir
je suis cette lune éteinte
épiée au carrefour
des obus de la haine
au seuil de la paix
criblée d’attentes vaines
je suis cette étoile
j’attends
et j’espère
dans ce rai de lumière
Darfour
chair collée à l’os
les yeux de la mort
hurlent en silence
dans ce néant
aucune main tendue
à la désespérance
des seins taris
seules les mouches
partagent ce funeste voyage
désert dans ce désert
les mots s’essoufflent
en spectres
de l’oubli
où l’Amérique
assoiffée d’or noir
reste sourde
à l’appel
du noir silence
pétrissant ces gémissements