Herbert Silberer, psychanalyste autodidacte, né à Vienne (Autriche) le 28 février 1882, issu du monde athlétique et du journalisme sportif, est devenu, en 1910, membre de la Société psychanalytique de Vienne. En 1914, Il a écrit Probleme der Mystik und ihrer Symbolik (Problèmes du mysticisme et de ses symboles), un ouvrage sur les rapports entre la psychologie, le mysticisme et les traditions ésotériques en particulier les traditions occidentales. Il s'est pendu le 12 janvier 1923. La raison de ce suicide serait le rejet de ses idées par Freud. Selon l'historien Paul Roazen, Sigmund Freud* aurait écrit une lettre à Silberer pour lui signifier qu'il ne voulait plus le rencontrer. Or selon B. Nitzschke, Wilhelm Stekel* a prétendu que cette lettre de Freud était plutôt adressée au père de Silberer, appelé Victor. Quarante ans après sa mort, Carl G. Jung écrit: «Herbert Silberer a eu le mérite d'avoir découvert, le premier, les voies secrètes qui conduisent de l'alchimie à la psychologie ou à l'inconscient» (Jung, 1955-57, p. 792).
Selon Christine Maillard, Silberer était familier des travaux indianistes de Paul Deussen sur les Upanisad et le Vedânta, de Richard Garbe sur le Sâmkhya ainsi que de la traduction par Leopold von Schröder de la Bhagavad-Gitâ. S'éloignant du modèle freudien, Herbert Silberer voulut intégrer à la réflexion psychanalytique les données de l’ésotérisme alchimique occidental. Il a retenu l’idée de l’Âtman-brahman, c’est-à-dire: l’identité suprême d’un sujet transcendantal individuel avec l’absolu transpersonnel. Ainsi, pour lui, l’Orient est cette source où puiser la possibilité de désocculter la tradition ésotérique occidentale. Par sa conception d’un inconscient où les symboles « anagogiques » ont une valeur opératoire à la manière de l’alchimie, Silberer est assurément plus proche des conceptions romantiques de l’inconscient (réservoir de représentations mythologiques) que de Freud. Finalement, sur un autre plan que l’approche ethno-raciale des aryanistes, Herbert Silberer utilise l’Inde pour ressaisir ce que l’Occident paraît selon lui avoir perdu: le moyen d’agir sur l’inconscient. Christine Maillard analyse la pratique de Silberer ainsi: «Le recours à l’altérité (orientale), dans laquelle on reconnaît une forme quintessenciée et idéale de ce qu’on est soi-même, permet l’auto-définition et l’auto-situation dans une continuité traditionnelle (occidentale), que la comparaison avec le modèle oriental permet de reconstituer et d’identifier.» (Régis Poulet, La psychanalyse et l’Orient le 6 novembre 2006)
http://www.larevuedesressources.org/spip.php?
article621&PHPSESSID=c8d9514877f69d0a76931032ef7a9ded
Oeuvres d'Herbert Silberer
Report on a method of eliciting and observing certain symbolic hallucination phenomena, 1909, extraits traduits et inclus sous le titre «Deux approches du symbolisme: H. Silber et Ernest Jones», p. 101 à 128, dans Les rêves: Voie royale de l'inconscient, Tchou, 1979.
Bibliographie
Christine Maillard, L'Inde vue d'Europe, histoire d'une rencontre (1750-1950) Paris, Albin Michel, «Planète Inde», 2008.
Christine Maillard, «Doctrines indiennes et ésotérisme occidental dans l'œuvre du psychanalyste viennois Herbert Silberer» dans L'Inde inspiratrice, Strasbourg, PUS, 1996, p.145-153 et p.149.
Dans Sciences, sciences occultes et littérature (1890-1935), Recherches germaniques - Revue scientifique de l'Université Marc Bloch, Strasbourg, Numéro Hors série N°1 (2002) - Textes réunis par Christine Maillard:
Christine Maillard, «Introduction. Sciences, sciences occultes et littérature (1890-1935) : une relation complexe» et «Résurgences de l'alchimie dans le premier tiers du XXe siècle. Unité du réel et transmutation du sujet - sciences, psychanalyse, littérature».
G. Borel, «Un grand analyste méconnu : le docteur Herbert Silberer (1882-1923)», dans Action et pensée, revue de l'institut international de psychanalyse Charles Baudouin, n° 8, avril 1986.
Michael Turnheim, «Herbert Silberer, 1882-1923. L'interprète fourvoyé» dans Revue du Champ freudien, Ornicar, Paris, 1985, vol. 11, n°32, p.169-181.
Bernd Nitzschke, «Freud et Herbert Silberer : hypothèses concernant le destinataire d'une lettre de Freud de 1922» dans Revue Internationale d'Histoire de la Psychanalyse, n°2 (1989).
Julian Varendonck, «The fallacy of Silberer's threshold symbolism» dans International Journal of Psycho-Analysis, vol. 4, n°3 (1923).