Arthur Schnitzler (15 mai 1862, Leopoldstadt, Vienne – 21 October 1931, Vienne) est un écrivain et auteur dramatique né de parents juifs. Il fit des études en médecine à l’université de Vienne. Il nourrit un intérêt particulier pour l'âme, la psyché. C'est lui qui a entretenu une correspondance épistolaire avec Stefan Zweig* que Romain Rolland appella «chasseur d'âmes». Il a aussi tenu un Journal (publié en français par Rivages poche, «Petite Bibliothèque). Sa thèse porta sur le traitement hypnotique de la névrose.
En 1893, il abandonna son poste à l’hôpital pour ne garder que quelques patients privés et pour se consacrer à la littérature. Plusieurs de ses ouvrages ont été portés à l’écran: La ronde, La dame aux orchidées, Le retour de Casanova, Christine, Mademoiselle Else, Double Rêve (Traumnovelle). Sterben (Mourir, 1895) est le récit du jeune lieutenant Gustl qui, incapable de venger son honneur après avoir été insulté par un chef cuisinier, exprime ses pensées suicidaires. Fraulein Else (1924) est un long monologue d’une fille forcée de se montrer nue devant un ami de son père à cause des dettes de sa famille. En vertu de son devoir de fille, elle cède à la demande paternelle, mais se donna la mort par la suite. Le suicide de sa fille mariée en 1930 fut pour Schnitzler une grande épreuve dont il ne se remettra pas. Il meurt à Vienne le 21 octobre 1931.
Durant le régime nazi, ses œuvres furent interdites en Allemagne et en Autriche. Marc Chabot consacre un chapitre de son livre à Mademoiselle Else (En finir avec soi, p. 81-91). D’après Jean Améry*, Schnitzler crée des personnages qui «aspirent à progresser sur le chemin de la liberté*, mais ils finissent par mourir […]. En réalité, [il est] le grand découvreur de l’absurdité de la vie et de la mort» (Porter la main sur soi, p. 146). Le romancier autrichien jouit de l’estime profonde de Freud* qui lui écrit dans une lettre datée du 14 mai 1922: «En me plongeant dans vos splendides créations, j’ai toujours cru y trouver, derrière l’apparence poétique, les hypothèses, les intérêts et les résultats que je savais être les miens. Votre déterminisme comme votre scepticisme […], votre sensibilité aux vérités de l’inconscient […], tout cela éveillait en moi un sentiment étrangement inquiétant.» Cette impression indéfinissable était, sans doute pour Freud, «une sorte de crainte de rencontrer [son] double» (lettre citée par Max Schur dans La mort dans la vie de Freud, Paris, Gallimard, 1975, p. 404).
C'est «comme si l'intérêt pour la psychanalyse irriguait toute la Vienne de cette époque. C'est bien à lui que Freud écrit dans une lettre: Vous êtes un explorateur des profondeurs psychologiques, honnête, impartial et téméraire. [...] Les rapports entre Schnitzler et Freud ne sont ni très étroits ni très cordiaux et même si Schnitzler admirait « a grandeur» de l'analyste dont il avait lu L'interprétation des rêves dès sa parution en 1900, il avait tendance à se méfier des psychanalystes qu'il considérait souvent comme des poseurs ou des charlatans.» (Pierre Deshusses, «Rêve et contre-rêve», introduction à Arthur Schnitzler, Double Rêve, Rivages poche, «Petite Bibliothèque», 2010, p. 9-10)
Ce récit (Double Rêve) a été choisi par Stanley Kubrick(1928-1999) «pour servir de canevas à son ultime film Eyes Wide Shut» (op. cit., p. 7)
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