L'Encyclopédie sur la mort


Vivant jusqu'à la mort ( Paul Ricoeur)

Paul Ricoeur, Vivant jusqu'à la mort, Paris, Editions du Seuil, 2007

Paul Ricoeur débute cette méditation en 1996 au moment où commence à s’éteindre doucement sa compagne Simone. Il éprouvait alors une grande angoisse et pour rester vivant multipliait voyages et écrits. La rédaction du texte a été interrompue délibérément en avril 1997 car cette méditation, cette ascèse devenait insupportable. Simone Ricoeur est décédée en janvier 1998. La santé de Paul Ricoeur décline doucement. Devenir capable de mourir était alors son souci. Il a déclaré quelques jours avant sa mort : « Je suis entré dans le temps de l’essentiel. » Cette période fut difficile, une lutte douloureuse traversant l’abattement, la peur, la solitude de celui qui s’en va et affirmant sa volonté d’honorer la vie jusqu’à la mort.

Ce texte est une méditation philosophique sur la mort où P. Ricoeur tient à affirmer une réflexion purement philosophique comme autosuffisante et récuse l'attribut de philosophe chrétien et les représentations de la mort et de l'après-vie, rattachées à cette tradition religieuse. La tâche de la réflexion philosophique est d'analyser, de clarifier. Cette clarification conceptuelle a déjà valeur thérapeutique. P. Ricoeur s'impose une sobriété de l'imagination, une analyse critique des représentations.

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Assister à la mort est une épreuve ponctuelle, événementielle. Survivre, faire le deuil* est un long trajet. C'est l'anticipation de l'agonie qui est le noyau concret de la peur de la mort. P. Ricoeur propose le témoignage de médecins spécialistes en unités de soins palliatifs*. Que disent-ils: Tant qu'ils sont lucides les malades en train de mourir ne se perçoivent pas comme moribonds, comme bientôt morts, mais comme encore vivants. La capacité de penser encore préservée n'a pas tant le souci de ce qu'il y a après la mort mais le souci de la vie à s'affirmer encore.

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La mort est vraiment la fin de la vie dans le temps commun à moi vivant et à ceux qui me survivront. La survie c'est les autres. Détachement nécessaire à l'égard de l'inessentiel, se rendre disponible pour le fondamental, le transfert sur l'autre de l'amour de la vie. P. Ricoeur reprend ainsi les valeurs fondamentales du christianisme : détachement, générosité tout en rejetant tout l'imaginaire de la survie, de la consolation. Il fait référence à la confiance en Dieu. L'existence aurait un sens, une intelligibilité, une justification. Il parle de chaque existence qui ferait mémoire, trace en Dieu et rejette aussitôt cette idée de peur de la représentation d'une telle mémoire comme une survie dans une temporalité parallèle. Un seul but pour P. Ricoeur, le renoncement parfait. Insistance sur l'éthique positive du détachement, du transfert sur l'autre de toutes les attentes vitales et de la gaieté jointe à la grâce espérée d’exister vivant jusqu’à la mort .

Dimanche 14 octobre 2007
«Fiche de lecture P. Ricoeur»
G. AIMO-BOOT

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Date de création:-1-11-30 | Date de modification:2012-04-18