L'Encyclopédie sur la mort


Monnier Sophie

Monnier Sophie«D'une grande beauté, mariée à un vieillard président à la Chambre des Comptes à Dôle, Sophie Monnier aima Mirabeau, alors au fort de Joux, s'enfuit avec lui en Hollande, puis arrêtée en 1777, fut enfermée chez Mlle Douay où elle accoucha. Elle se donna la mort en 1789 à la suite d'un nouvel amour».

La maison de Mlle Douay, n° 26, rue de Chantilly à Paris, était «une maison de santé pour femmes folles et une maison de discipline pour femmes s'étant mal comportées» (Jacques Hillairet, Connaissance du Vieux Paris. Rive droite / Rive gauche. Les îles et les villages, Paris, Rivages, 2001, «Rive droite», p. 326-327).

Après leur exil à Amsterdam, les amants ont été reconduites de force en France où Mirabeau a été emprisonné à Vincennes et Sophie, cloîtrée au couvent des Saintes-Claires à Gien. De sa prison, Mirabeau écrit des lettres à Sophie dans lesquelles il se révélait un amoureux jaloux:

«... je suis susceptible, inquiet [...] et surtout jaloux, et tu dois me le pardonner. Oui, je le suis; pourquoi? Je l'ignore. C'est sans doute une faiblesse inséparable de l'amour. [...] Je le dirais volontiers comme l'Amour disait à Psyché, qui lui demandait: "Des tendresses du sang peut-on être jaloux?":


Je le suis, ma Psyché, de toute la nature:
Les rayons du soleil vous baisent trop souvent;
Vos cheveux souffrent trop les caresses du vent;
Dès qu'il les flatte, j'en murmure;
L'air même que vous respirez
Avec trop de plaisir passe par votre bouche;
Votre habit de trop près vous touche.»
 

(Benjamin Gastineau, Les Amours de Mirabeau et de Sophie de Monnier, suivis des lettres choisies de Mirabeau à Sophie, de lettres inédites de Sophie, et du testament de Mirabeau, Paris, Chez tous les Libraires, 1863, p. 218-219).

Préoccupé de la santé de Sophie, Dr Ysabeau demanda, avec instance, à Mirabeau une entrevue avec Sophie au couvent de Gien. Celui-ci se présenta, mais fit ses adieux à son amante en l'accusant de son nouvel amour avec M. de Rancourt. Sophie protesta vainement de son innocence et de sa fidélité.


«Le 9 septembre 1789, profitant de l'absence du docteur Ysabeau, Sophie résolut de mettre fin à son martyre*. Elle congédie sa domestique, la soeur Louise, et se renferma dans sa cellule où elle alluma deux réchauds remplis de charbon. Craignant que la nature ne trahit au dernier moment les desseins de son inébranlable volonté, elle se lia les jambes et le corps à son lit; et attendit dans cette position les effets de l'asphyxie. Sa domestique étant rentrée trop tard malheureusement, donna l'alarme dans le couvent et dans la ville. Le procureur du roi au baillage vint constater le suicide de la marquise de Monnier.

[...]

Le 10 septembre 1789, toute la population, sans distinction de classes, suivit, éplorée le cortège funèbre de Sophie du Ruffey.
Jamais femme ne fut à ce point regrettée. Sa mémoire est aussi vivante aujourd'hui qu'au dernier siècle, et pas un voyageur ne visite la contrée où elle est morte sans entendre vanter l'éclat de sa beauté, les grâces de sa personne, l'élévation de son caractère; la supériorité de son esprit, ses douces vertus, l'inépuisable charité de son âme.

[...]

Mirabeau revint des emportements d'une aveugle jalousie, de ses injustes préventions contre Sophie» (B. Gastineau, op. cit., p. 156-157).

COTTIN, Paul, Sophie de Monnier et Mirabeau, d'après leur correspondance secrète inédite (1775-1789), Paris, Plon-Nourrit, 1903, 282 p.; RICHEPIN, JEAN, Sophie Monnier, Maîtresse de Mirabeau, Paris, Marpon et E. Flammarion, «Les grandes Amoureuses», circa 1890, 48 p.

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Date de création:-1-11-30 | Date de modification:2012-04-20